08 juillet 2007
Points forts, points faibles
« Règle fondamentale aux échecs, dans la vie, en littérature : renforcer les points forts, jamais les points faibles. »
- Philippe Sollers - (Carnet de nuit, Folio).
19:31 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Sollers, Carnet de nuit
Commentaires
Je ne voudrais pas jouer les empêcheurs de sollériser en rond, mais amusons-nous tout de même…
Je vois mal ce que "renforcer" un point "faible" pourrait vouloir dire, car j'aurais plutôt tendance à vouloir affaiblir la faiblesse. Alors bien sûr, renforcer les points forts, ce peut être une règle (je me méfie quand même toujours un peu de ceux qui, d'un coup, vous balancent un universel, les échecs, la vie, la littérature, bigre ! On ratisse large !). D'accord, d'accord, on voit bien que M. Sollers entend par là qu'il vaut mieux donner de la force à ce qui l'est déjà, plutôt que s'évertuer (se tuer ?) à rapetasser ce qui est faible. Mais je me demande aussi si l'on ne peut tirer de là un certain cynisme, voire pire. Exit le "maillon faible"… Je me méfie des lieux communs d'un nietszchéisme mal digéré. Non, non, je ne fais pas un procès d'intention, loin de moi cette pensée. Mais dès qu'on parle du fort et du faible, moi, que voulez-vous, j'ai un faible pour celui qui, dans la vie, subit les échecs en en tirant quelque force. Bien sûr, on peut aussi tirer de là quelques bêtises, mais quand même. Je ne dis pas qu'il ne faut pas cultiver sa force, au contraire, mais cela ne va pas, pour moi, sans un rapport dialectique à la faiblesse qui est aussi en nous et nous constitue, exposés à la rupture, au tragique, à la mort.
Mais je m'emballe. Peut-être cette phrase doit-elle être remise dans son contexte, car de quelle force s'agit-il ? et de quelle faiblesse ? Aux échecs, dont je ne sais pas grand-chose, on peut concevoir qu'il faille "sacrifier" un point faible pour laisser se développer les forts. Tout au service du Roi !Mais dans la vie ? Ne sait-on pas que de grands artistes étaient d'un grande fragilité, forme de faiblesse qui éclaire ce qui au fond est angoisse existentielle, ce "gouffre" dont parle Baudelaire ? Et s'ils n'avaient pas eu ce point faible, auraient-ils été de grands artistes ? Certes, ils ont renforcé leur points forts, mais n'est-ce pas pour faire de leur fragilité une œuvre ? Et "dans la littérature" ? Quelle littérature ? et quoi, dans "la" littérature ? Le style ? le contenu ? La trame ?etc.
Tiens, il y a un peu de soleil dehors. Je vais fêter ça.
Écrit par : J.-J. M. | 11 juillet 2007
Cette phrase m'a renvoyé à de vieilles questions, lorsque nos bons maîtres d'école d'une époque qu'ils ne comprenaient déjà plus nous expliquaient qu'il y avait plus de mérite à travailler sur nos lacunes plutôt que sur nos dons (ineptie encore largement en vogue de nos jours). Ces gens qui n'étaient pas tous mal intentionnés ne mesuraient sans doute pas la largeur du boulevard qu'ils ouvraient ainsi à la médiocrité.
Un peu de soleil ? Veinard ! ici, on se croirait à la Toussaint !
Écrit par : Christian Cottet-Emard | 12 juillet 2007
Là, d'accord. J'ai aussi subi cela. Mais c'est assez compliqué, car il m'arrive, hélas trop souvent, de constater que les lacunes empêchent les dons de s'épanouir. Au fond, ce n'est pas tant "travailler sur nos lacunes plutôt que sur nos dons", que le fait d'étouffer ceux-ci en ne voyant que celles-là qui est en jeu. Cela revient à de l'humiliation. Ce qui la nourrit, c'est ce qui menace tout enseignant s'il n'est pas vigilant : la psychorigidité. Bachelard dit que ce qu'il y a de terrible chez un enseignant, en particulier, dit-il, chez les profs de sciences, c'est qu'ils ne comprennent qu'on ne comprenne pas ce qu'ils ont pourtant si clairement expliqué !
Le soleil est bien là - stop - je répète : le soleil est bien là.
Écrit par : J.-J. M. | 12 juillet 2007
Ca s'appelle "Solairiser", en rond forcément ! oui il est bien là !
Écrit par : Ray | 12 juillet 2007
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