18 mai 2012
Carnet de l’Ascension
En ce moment après minuit, le vent agite les frênes, disperse les effluves des lilas et secoue les volets. Inutile d’allumer un cigare dans ces conditions. Le gros chat vagabond s’est sans doute réfugié dans une de ses cachettes et Tigrette, la jeune chatte qui s’est installée dans la maison à Noël après la disparition subite de sa mère, est rentrée se coucher à l’étage comme à son habitude. Le vétérinaire qui l’a stérilisée et vaccinée estime qu’elle est née en octobre dernier. Comme elle n’apprécie guère le vent, je n’ai pas eu besoin de l’appeler longtemps avant de verrouiller la maison. Hier soir, elle a regardé avec circonspection un hérisson grassouillet qui finissait les restes de la gamelle du gros chat semi-sauvage qu’il est hélas hors de question de laisser pénétrer dans la maison.
Cet après-midi, j’ai fumé un Bundle et relu les notes et annexes d’un recueil de trois nouvelles humoristiques et mélancoliques à paraître en septembre en écoutant des pièces extraites de Selva morale e spirituale de Claudio Monteverdi, notamment les Gloria, Adoramus et Beatus vir (par les Arts Florisssants, direction William Christie, dans la collection Musique d'abord chez Harmonia Mundi) qui me mettent littéralement en joie malgré les vieux chagrins propres au commun des mortels.
En relisant les trois nouvelles, je me suis encore vaguement interrogé sur ce curieux destin que je partage avec tant d’autres de manière totalement déraisonnable, qui consiste à vivre avec des personnages inventés. Je me suis même amusé à en dresser une liste improvisée, désordonnée, probablement incomplète, issue de plusieurs de mes ouvrages et que je j'intègre à cette page de carnet, histoire d’en rajouter un peu dans l’étrangeté heureusement pas encore trop inquiétante :
Mes personnages
L’enseigne de vaisseau Mhorn (Preben Mhorn)
Samia
Marius
Le libraire Bartholomé
L’homme qui sent la patate
Effron Nuvem
Le petit gros
L’employé assassiné
Graziella
La jeune fille aux sandales de sable
Louis
Helga
Prune (Anita)
Le promeneur noctambule
L’adjudant Kaiser
La marchande de fruits et légumes
La prostituée
Ricardo
Rozana
La vieille dame (tante Martha)
Le chauffeur de la Rolls verte
La jeunette
L’africain vendeur ambulant de bimbeloterie
Marius le Bernois
Tante Marcia
Fortunat
Madame Tumbelweed
Le chat Sir Alfred
Le voisin écrivain
Alma Lorenz
Le major
L’ordonnance Gildo (Ermenegildo, Ermé)
Ange Consagude (Patron de bar)
Le narrateur écrivain en panne
Rosalba Damparo
Judith
Blandine Desblanche
Le capitaine de police Varan
La jeune brocanteuse Orane
Le rédacteur Antoine Morasse
Le chef d’agence du journal
L’auteur
Earl Lediable
Le gros chien noir
La vieille Jacinthe
Le maire
Le garde-champêtre
L’organiste Edgar Portevent
Antoine Cafardo (désinfection, dératisation)
Le diacre Maximin Bedon
Le pharmacien Adolphe Hénol
Le professeur Alastair Bang (entomologiste)
La gouvernante
La remplaçante de la gouvernante
Le correspondant de presse ivrogne
Le jeune serveur mélancolique
Andrade
Julius
Le poète Alvaro Alvarez
Et dire qu'on me croit solitaire !
Photos : autoportrait avec Tigrette qui adore l'ordinateur, hérisson indifférent au flash, autoportrait au Bundle.
02:07 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : carnet, blog littéraire de christian cottet-emard, personnages, fiction, roman, nouvelle, littérature, édition, écriture, chat, vent, frêne, arbre, cigare, bundle, hérisson, lilas, monteverdi, selva morale e spirituale, arts florissants, william christie, harmonia mundi, musique d'abord
27 avril 2012
Tu écris toujours ? (70)
Conseils aux écrivains tentés par la politique
(Cet épisode de Tu écris toujours ? est paru dans le trimestriel le Magazine des livres n°34, février-mars-avril 2012).
Vous savez ce qu’on dit : le journalisme mène à tout à condition d’en sortir. Vous en êtes donc sorti très vite, enchanté par la perspective de ce grand tout qui se révéla finalement peu de chose en raison de votre choix hasardeux au moment de votre reconversion. Le petit jeune que vous étiez préféra la littérature à la politique, ce qui est bien compréhensible, mais le petit vieux que vous êtes en train de devenir se prend parfois à douter voire à regretter, ce qui peut tout aussi bien se comprendre.
Eh bien rassurez-vous, il n’est pas trop tard pour démarrer une carrière d’élu car si la gloire littéraire est une affaire de vieux messieurs, il en va de même de la politique. Certes, devrez-vous renoncer à votre superbe isolement et renouer avec le contact humain qui est une bonne chose à condition de ne pas en abuser. Après ce premier pas franchi, vous devrez retrouver d’anciennes connaissances, vous savez, tous ces gens qui semblaient ne plus vous reconnaître dans la rue, non pas parce que vous aviez changé de visage après une opération de chirurgie esthétique mais à cause de la disparition de votre signature dans les colonnes du Républicain Populaire Libéré du Centre. Attention, une démarche pénible est indispensable à ces retrouvailles : réintégrer la rédaction du Républicain Populaire Libéré du Centre, par la petite porte s’il le faut, même en acceptant de courir la pige locale. Au bout de quelques jours, le réseau social reprendra aussi vite qu’une mayonnaise remontée à l’huile. Les notables et les élus du peuple qui semblaient tous atteints d’une épidémie de myopie au lendemain de votre départ de la presse recouvreront subitement une excellente vue en vous croisant de nouveau au goûter des anciens, aux conseil municipal et aux vœux de la société crématiste Les Feux follets. Miraculeux ! Et je ne vous parle pas de la brochette des directeurs de la communication qui vous dispenseront à nouveau leur onctueuse politesse traduite en ces molles poignées de mains qui firent écrire à un auteur célèbre « Il avait la main froide comme un serpent ».
Ainsi réinvesti au centre de la vie locale, vous prendrez la présidence d’une association, de préférence pas trop active et modérément utile qui ne risquera point de vous distraire de votre vrai but, engloutir une portion ou quelques miettes du gâteau du pouvoir politique. L’idéal est la présidence honoraire qui consiste à jouir du titre sans l’obligation d’exercer le mandat. Dans ce cas, allez-y gaiement, cumulez les présidences honoraires. Après ces petites corvées, vous passerez vite aux choses sérieuses. À ce stade, vous devrez vous montrer attentif à quelques signes tels que des accolades marquées de la part d’élus influents lors d’un vin d’honneur ou de quelque cacahuète partie, ou encore d’ostensibles apartés auxquels vous convieront des personnalités à la fin d’une inauguration ou lors d’un entracte. Quelques mois avant le début d’une élection, un élu populaire vous invitera à un petit-déjeuner au cours duquel vous aurez l’impression de passer un examen. C’est désagréable mais tout de même préférable aux petits-déjeuners auxquels les entreprises, sous prétexte de convivialité et de décontraction au travail, « invitent » leurs collaborateurs terrorisés à grignoter des viennoiseries en se regardant en chiens de faïence pour tenter de détecter les voyageurs au départ du prochain wagon à destination de Pôle Emploi. Ah oui, vous êtes désormais loin de la littérature et vous devrez peut-être envisager de discrètes expéditions chez le libraire et à la maison de la presse pour purger ces points de vente des rares exemplaires encore en rayon de votre dernier roman dans lequel vous brossiez à gros traits quelques portraits satiriques désormais compromettants.
Vous voilà maintenant sur orbite.
Pourquoi n’ai-je quant à moi pas suivi le même chemin ? Parce que je n’ai jamais eu de goût pour la politique. Dès l’enfance, durant les réunions de famille, j’ai constaté comme beaucoup que la politique gâchait le dessert et parfois le repas entier. La politique vaut-elle qu’on avale de travers un gâteau cuisiné avec amour par le maître ou la maîtresse de maison ? Évidemment non, ce qui est d’autant plus vrai que la politique n’existe plus. L’économie l’a remplacée. Ceci dit, pour en revenir à votre tentation de nouveau départ en politique, je peux comprendre qu’en irréductible littéraire que vous êtes, vous soyez séduit par l’idée de vous lancer dans une activité qui n’existe plus.
Extrait de TU ÉCRIS TOUJOURS ? (FEUILLETON D’UN ÉCRIVAIN DE CAMPAGNE). Précédents épisodes parus en volume aux éditions Le Pont du Change à Lyon (Un recueil de 96 pages, format 11 x 18 cm. 13 € port compris. ISBN 978-2-9534259-1-8). En vente aux éditions Le Pont du Change, 161 rue Paul Bert, 69003 Lyon. BON DE COMMANDE
01:40 Publié dans FEUILLETON : tu écris toujours ? | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : magazine des livres, lafont presse, tu écris toujours ?, feuilleton, christian cottet-emard, blog littéraire, conseils aux écrivains, éditions le pont du change, lyon, paris, humour, littérature, presse, chronique, édition, vie littéraire, politique, écrivain, auteur
04 mars 2012
Printemps des poètes : les éditions Sang d'encre et Joël Bastard à Oyonnax (Ain).
Communiqué
Rencontre avec la maison d’édition « Sang d’encre ».
Vendredi 9 mars, 18h.
Section adulte de la médiathèque du centre culturel Aragon d'Oyonnax.
Suite à la Journée de la femme, la médiathèque vous propose de découvrir en section adulte la jeune maison d’édition SANG D'ENCRE qui publie des ouvrages à résonance essentiellement poétique : poèmes, récits poétiques, nouvelles… Faire accéder le plus large public à la forme poétique dans ce qu'elle a de beau et d'émouvant, tel est l’objectif de cette maison d’édition. Jackie Plaetevoet, auteure, poète, invitera les lecteurs à découvrir les diverses collections de sa maison d’édition dont le fil rouge est l'alliance entre écriture et art plastique, graphique (peinture, dessin, gravure, encre) puis nous proposera une lecture poétique laissant la part belle aux auteurs féminins de son catalogue.
Lecture poétique par Joël Bastard
Vendredi 16 mars, 18h.
Section adulte de la médiathèque du centre culturel Aragon d'Oyonnax.
Poète, romancier et auteur dramatique, Joël Bastard nous convie à une lecture découverte de son oeuvre poétique. Joël Bastard écrit depuis l’adolescence et parallèlement exerce de nombreux métiers comme facteur, quincaillier, peintre en bâtiment, fakir, camionneur, manoeuvre, galeriste… Il se consacre uniquement à l’écriture depuis 2000. Il réalise de nombreux livres d'artiste avec Patrick Devreux, Joël Leick, Evelyn Gerbaud, Tony Soulié, Ricardo Mosner, Jean-Luc Parant, Georges Badin, Jane Le Besque, Koschmider, Alexandre Hollan, Patricia Erbelding... Il collabore avec des musiciens comme comme Erik Truffaz, Malcolm Braff, Christian Graf, Christine Python, Carlos Baumann, Marcos Jimenez… Quand il ne voyage pas, il vit dans une ferme isolée des Monts Jura.
Bibliographie :
Beule, Gallimard, 2000
Se dessine déjà, Gallimard, 2002
Le sentiment du lièvre, Gallimard, 2005
Casaluna, Gallimard, 2007
Manière, Gallimard, 2009 ( roman )
Au dire des pas, L'idée bleue, 2004 ( épuisé )
Papillotes sans chocolats, Ficelle, 2006, 2007 et 2008
La compagnie des eaux, Le Trident Neuf, 2009
All is one, Le miel de l'ours, 2009
Bakofè, Al Manar, 2009
Bâton rouge, avec Tony Soulié, Virgile, 2010
Derrière le fleuve, Al Manar, 2010
Théâtre Blitz, Passage d'Encres, 2011
Sans revenir, avec Georges Badin, AEncrages, 2011
Photo de Joël Bastard prise ici.
12:10 Publié dans Agenda/Rendez-vous | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : édition, sang d'encre, littérature, poésie, printemps des poètes, jackie platevoet, joël bastard, patrick devreux, joël leick, evelyn gerbaud, tony soulié, ricardo mosner, jean-luc parant, georges badin, jane le besque, koschmider, alexandre hollan, patricia erbelding, erik truffaz, malcolm braff, christian graf, christine python, carlos baumann, marcos jimenez, oyonnax, ain, rhône-alpes, centre culturel aragon, médiathèque d'oyonnax, blog littéraire de christian cottet-emard