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12 février 2013

Jean-Jacques Nuel et ses doubles ou l'auteur en stéréoscopie

Chiendents 28

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La revue d’art et de littérature Chiendents consacre son numéro 28 à « Jean-Jacques Nuel, auteur en stéréoscopie ». Ce dossier de 40 pages illustré de photos comprend : un entretien avec Stéphane Prat, une étude de Christian Cottet-Emard, des articles critiques sur les livres publiés, des extraits de Courts métrages (Le Pont du Change, 2013), de Portraits d’écrivains (Editinter, 2002), des romans Le Nom (A Contrario, 2005) et L’autoroute (inédit).

Ce numéro a été coordonné par Stéphane Beau, qui en parle sur son blog.

Chiendents 28 peut être commandé auprès de l’éditeur : Editions du Petit Véhicule, 20 rue du Coudray, 44000 Nantes, pour la somme de 5 €  (3 € + 2 € de port).

Dans ce numéro :

Jean-Jacques Nuel et ses doubles ou l’auteur en stéréoscopie
Par Christian Cottet-Emard


Les deux tendances du roman français de ce début de siècle, le minimalisme de l'écriture intime et de l'autofiction opposé au regain de la fiction narrative parfois nommée nouvelle fiction, se télescopent dans l’œuvre en prose de Jean-Jacques Nuel, non seulement dans son recueil de récits Portraits d’écrivains (éditions Editinter, 2002) mais encore dans son roman Le Nom (éditions A Contrario, 2005).

Sur une trame réduite à sa plus simple expression, les quatre lettres d'un nom, l'écriture de Jean-Jacques Nuel, tendue comme la corde indispensable à la note juste, parvient à tisser (avec quel métier !) tous les fils romanesques (identité, racines, quête des origines) noués aux grands thèmes nueliens (solitude de l'écrivain, inquiétude de la création). À l'instar de ses précédents ouvrages, le premier roman de Jean-Jacques Nuel fait penser à ces tableaux dits stéréoscopiques, en particulier au virtuose Dali de dos peignant Gala de dos éternisée par six cornées virtuelles provisoirement réfléchies par six vrais miroirs. Dans Le Nom, l'auteur assez proche de cet effet stéréoscopique, se recentre sur le singulier sans toutefois employer la première personne pour mieux incarner son personnage d'écrivain improbable, si peu sûr de sa propre existence et de la réalité fugace et mouvante que son écriture tente de fixer qu'il en vient à se raccrocher à son seul nom, trace tactile plus que palpable sur une vitre embuée qui vaut bien une page blanche. Lorsque, de la pointe de l'index, l'auteur reclus dans son petit appartement inscrit son nom sur la buée avec, dans le fond, les contours flous de la grande ville, il réalise assez vite qu'il vient de mettre au jour la principale matière de son œuvre en devenir. Dépouillée de ses scories narratives, de la redondance de l'autobiographie et des artificielles péripéties de la fiction, l'opus du personnage-auteur de Jean-Jacques Nuel se résumera donc à cet unique nom, d'abord calligraphié au stylo avec l'application mâtinée d'étonnement à laquelle s'exerçait le geste de l'écolier, puis dupliqué à l'infini par la magie informatique et numérique.
J'emploie à dessein le terme de magie même s'il s'avère impropre car cette vertigineuse démultiplication du nom dans des volumes entiers adoptant la présentation formelle de tous les genres littéraires évoque évidemment l'activité d'un certain apprenti sorcier qui, par l'utilisation de la magie, commande aux objets d'effectuer à sa place une corvée ménagère avec le résultat que l'on sait. Dans le roman de Jean-Jacques Nuel, la magie est une formule, ce fameux nom dont l'inscription sur tous les supports disponibles (feuilles de papier, toiles vierges, vitres, murs) caracole avec frénésie jusqu'à ce que cette accumulation délirante, cette véritable prolifération, finisse par se cogner à un premier obstacle du réel, la boîte aux lettres qui ne peut plus avaler d'un seul coup les paquets de tapuscrits envoyés aux éditeurs. À ce stade du récit, la déferlante du nom ralentit enfin quand l'auteur se retrouve à l'air libre où l'attend, lors d'une visite rituelle au cimetière, une autre folie du nom, celle que nous connaissons tous, gravée celle-là, non plus dans la vitesse éphémère de l'écran et du papier mais dans l'énigme éternelle de la pierre où persiste et signe ce qui, contre toute logique, veut absolument vivre.

Dans Portraits d’écrivains, le personnage récurrent de l’univers nuelien, l’auteur en mal de reconnaissance confronté au vertige de l’anonymat et de l’insignifiance, se tient plus à distance du gouffre auquel l’anti-héros du Nom échappe certes de justesse mais en se penchant sur un autre vide, celui de la tombe. Jean-Jacques Nuel relie ainsi le destin particulier de l’écrivain ou de l’écrivant à celui du commun des mortels dans le monde en trompe-l’œil de la moderne solitude.

Qu'il soit piéton d'un jour de trop, en mal d'une langue impossible ou arpenteur du marché de la poésie, le passant de Jean-Jacques Nuel est en errance mais non sur le départ. Ce marcheur nous accompagne au centre de l'expérience de l'homme contemporain : la solitude peuplée des villes et les voyages immobiles de l'attente. Tout lecteur attentif au monde des revues littéraires a une grande chance de se trouver un jour face à l'un de ces Portraits d'écrivains que Jean-Jacques Nuel confie aux titres les plus variés, des plus confidentiels aux plus connus, l'un de ces instantanés s'étant même révélé voici quelques temps aux familiers de la revue de Philippe Sollers, L'Infini. À quel fixateur, pour rester dans la métaphore photographique, Jean-Jacques Nuel a-t-il bien pu avoir recours pour donner une telle netteté à ce personnage multiple et forcément évanescent qu'est l'écrivain en devenir, celui qui n'a pas encore les faveurs du grand public ni même, souvent, celles des éditeurs ? Comme celui qui travaille longtemps sous la lampe rouge en quête de ce que l'ombre et la lumière porteront à la vision, Jean-Jacques Nuel a fini par épaissir une silhouette, à lui donner ce grain que le papier réclame et ces contours que la lecture pourra remplir. C'est dès lors à une sorte de naissance que nous assistons, celle d'un des personnages les plus représentatifs de notre époque, l'auteur en lutte permanente pour l'existence et, peut-être, pour la reconnaissance. En se multipliant — il y a de plus en plus de candidats à ce statut d'écrivain correspondant à un bien illusoire prestige — ce créateur de personnages devient lui-même un personnage. Là réside sans doute la difficulté du projet littéraire de Jean-Jacques Nuel mais aussi son originalité. Il a bien conscience que sa créature ne peut prendre corps que par l'emploi d'un style dépouillé, tout ornement superflu risquant de faire échouer la tentative. Après la parution de La Gare aux éditions Orage-Lagune-Express, cela apparaît tout autant dans ce puzzle en pleine composition qu'est Portraits d'écrivains où se construit l'image d'un anti-héros bien d'aujourd'hui car tranquillement rétif aux chimères du gagnant.

À bien relire Jean-Jacques Nuel, il apparaît que la figure stylisée de son personnage d’écrivain déambulant dans une dimension intermédiaire entre fiction et réalité dépasse largement le cadre de la fantaisie romanesque parce qu’elle s’inscrit dans un rapport au monde et à la société que ne renieraient pas le Bernardo Soares (Pessoa) du Livre de l’intranquillité, le Bartleby d’Herman Melville et le Marcovaldo d’Italo Calvino.






09 février 2013

Carnet des actualités

L’actualité c’est simple, me direz-vous : « si vous saturez, tournez le bouton » , ce que je fais bien sûr, notamment sur France-Musique dont je choisis les programmes les moins bavards — devinez pourquoi ? — pour écouter de la musique, aussi bizarre que cela puisse paraître, et non pour entendre une énième retransmission des engueulades à l’Assemblée à propos du mariage pour tous. Tourner le bouton, pas si simple.... Pas de problème chez soi, mais à l’extérieur où tout est de plus en plus sonorisé, c’est une autre affaire. Donc, puisque l’actualité s’invite sans vergogne dans l’espace sonore public, laissons-la déborder un peu dans cet espace semi-public ou semi-privé (comme on voudra) qu’est ce petit blog.carnet,information,presse,actualité,radio,france-musique,journal,manifestation,cortège,banderole,mariage pour tous,fermeture de classe,école,politique,économie,horreur économique,viviane forrester,éditions fayard,blog littéraire de christian cottet-emard,village,foot,totalitarisme financier,sdf,sans domicile fixe,leurre,leurre de pêche,mariage gay,mariage homosexuel

J’aurais pu écrire « les actualités » mais en réalité, une seule domine toutes les autres : le mariage pour tous. À chaque nouvelle vague de logorrhée sur ce sujet, une image s’impose à moi, vieille de deux ou trois ans déjà, celle d’un jeune SDF très maigre et très mal en point qui grelottait de froid accroupi contre une vitrine un soir pluvieux de fin d’automne à Lyon. Lui donner une pièce ? Inutile au vu de son degré apparent d’épuisement. Le recueillir ? Évidemment impossible. Comme tout le monde, j’ai donc passé mon chemin en remisant mon malaise dans un coin de ma tête. Le rapport entre ce SDF et le baratin à propos du mariage pour tous ? La grosse manifestation des opposants au mariage pour tous. Voilà des gens qui sont capables de prendre des jours de congé et des autocars avant l’aube en plein hiver, de se taper cinq ou six-cents kilomètres de route et de s’agglutiner dans des cortèges géants pour un motif aussi secondaire que le mariage pour tous.

Pour moi, le vrai problème est que ces foules gonflées à bloc soient apparemment incapables de la même mobilisation pour refuser que des SDF crèvent de froid dans notre société si civilisée, que des citoyens se retrouvent privés de tout revenu et que ceux qui sont encore sur le pont soient tous les jours à la merci de n’importe quel petit chef susceptible de les envoyer sous les ponts. Il faut croire que ces risques les concernent beaucoup moins que les risques du mariage pour tous.

Apparemment, c’est cela la politique, activité à laquelle il me semble impossible de s’intéresser tant que, dans nos pays riches, tout le monde n’aura pas droit à un revenu minimum universel permettant au moins de manger et de dormir à l’abri à celles et ceux qui, de plus en plus nombreux, ne pourront de toute façon plus jamais s’adapter à la loi de la jungle du « totalitarisme financier » (*).

(*) Cf. L’Horreur économique, Viviane Forrester, éditions Fayard, 1996. 

P.S. : Puisque j’en suis à bavarder sur les manifestations géantes, j’en profite pour en évoquer une (plus petite) à laquelle j’ai récemment participé. Je me trouvais moi-même un peu ridicule au milieu de ce cortège dans les rues de mon petit village dont l’école risque de perdre une classe mais le ridicule ne tue pas. La preuve, j’écris et je publie des livres, je tiens ce blog depuis huit ans, je donne parfois mon opinion personnelle et je suis toujours vivant !

Pourquoi me suis-je joint à cette manif de campagne à laquelle, de l’aveu des organisateurs, n’ont pas participé autant de parents d’élèves qu’on aurait pu l’espérer ? Après tout, je n’ai plus d’enfant à l’école primaire et je suis depuis longtemps persuadé que le bonheur est désormais une affaire privée même si j’ai gardé une vieille tendresse pour les banderoles et la contestation. De fait, elle était plutôt sympathique cette manif villageoise mais quelque peu pathétique aussi, notamment lorsque me parvenaient dans le cortège quelques bribes de conversations du plus pur style « entre potes » : « ouais c’est clair, il nous faudrait une victoire. Ça peut pas continuer comme ça. Avec ce qu’ils ont pris comme raclée l’autre jour, va falloir qu’ils mettent le turbo. »
Finalement, tant qu’ils ne ferment pas le stade de foot !

Vignette : leurre de pêche.

07 février 2013

TRACES FRÉQUENTABLES, JACKI MARECHAL (ŒUVRES RÉCENTES)

Exposition du 14 FEVRIER au 13 MARS 2013

GALLERY 555
G A L E R I E  D ' A R T  C O N T E M P O R A I N

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Des expositions dans de nombreux musées et galeries, en France et en Europe, font de Jacki Maréchal un grand témoin de notre temps. "Pierre Soulages m’a dit un jour : « la peinture, ça ne se regarde pas, ça se fréquente ». C’est bien ainsi qu’il faut voir la peinture de Jacki Maréchal, qui est décidément très fréquentable."

- Jacques RIGAUD (1932-2012) ancien directeur de cabinet au Ministère de la Culture et Fondateur du Musée d’Orsay -

Le jeudi 14 février, vernissage de l'exposition en présence de l'artiste à partir de 18h.

GALLERY 555
Galerie d'art contemporain
18 place de la Fontaine
74 350 CRUSEILLES
 
Adresse mail: gallery555@orange.fr
Contact: +33 (0)6 82 83 97 65
Site internet: www.gallery-555.com