08 octobre 2008
Le fleuve ses berges désertes herbues une péniche qui va passer une écluse plus loin
Elle a déjà traversé bien des villes mais son vrai voyage est dans la campagne
Le fleuve est calme puisqu’il peut accueillir les péniches
Quand il devient dangereux et qu’on ne peut dompter ses colères le fleuve est abandonné à son chaos
Les péniches glissent alors sur des canaux faussent ainsi compagnie à l’ire des eaux
Que tu regardes la péniche du bord du fleuve ou du canal cela n’a pas d’importance elle glisse elle crée le paysage qu’elle frôle de sa lourde silhouette
Sans elle pas de chemin de halage pas d’écluse pas de plan incliné pas de pont tournant ou basculant pas de passerelle d’eau
Le fleuve lui-même se transforme avant son sillage
Pour mieux dire le lent cheminement de la péniche tu devrais employer des termes moins vagues te documenter sur le jargon des mariniers cela ferait plus vrai
Mais tu n’as rien à voir avec cette sorte de vérité car tu n’es qu’un passant sans autre qualité que celle de ton regard
Tes yeux se contentent de cette seule réalité qu’est la péniche sur le fleuve ou sur le canal et ton rêve en fait déjà toute une histoire
Tu étais là au moment de la péniche c’est tout et tu peux en nourrir ta pensée jusqu’à la fin de ta vie
Un jour quelque chose en rapport avec la vie quotidienne déborde
L’histoire la petite l’intime va s’écrire dans les marges le regard s’attarde sur des changements de perspective
Tout ce qui arrive reste vrai mais dans le désordre
C’est à ce moment qu’on a le plus de chance de consacrer du temps au passage de la péniche
Beaucoup plus lent un nouveau rythme s’instaure avec grâce
Devant cette angoissante et merveilleuse beauté de l’instant reconstruit il faut passer lentement si l’on veut mais sans s’arrêter trop longtemps
Ce temps étrange de la péniche tu ne sais pourquoi s’impose à toi
Il ne te serait sans doute guère utile de le savoir seule t’importe la conscience de cet étonnement
Que vient faire cet horizon fluvial dans ton rêve ?
© Éditions Orage-Lagune-Express pour la version 2008 de cet extrait.
Dessin de Frédéric Guenot.
00:58 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : fleuve, péniche, poésie, écluse, halage, mariniers, cottet-emard
Commentaires
J'étais hier soir dans "Le pétrin de la foudre" avec son flamboyant expressionisme :
"de plombs et d'ombre tout en or" "et mets le feu à la chapelle" "au volant de sa cage de Faraday" "contre une part de vie" "ont souri dans la terre" "pour célébrer ses trahisons"
Et nous voilà, lenteur de la péniche aidant, dans un naturalisme coulant au grès de l'état d'âme et de l'horizon fluvial- sortant du "Pétrin" je serais presque tenté d'y voir une cynique ingénuité...!
Écrit par : jacki | 08 octobre 2008
Par les temps qui courent ça fait drôlement du bien une belle chose comme ça, lue ce matin.
Écrit par : PAG | 11 octobre 2008
Par les temps qui courent ça fait drôlement du bien une belle chose comme ça, lue ce matin.
Écrit par : PAG | 11 octobre 2008
Merci PAG et Jacki, même si maintenant, je change de taille de chaussettes à cause des chevilles qui enflent !
Écrit par : christian cottet-emard | 12 octobre 2008
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