29 juillet 2008
Tu écris toujours ?
Conseils aux écrivains attirés par la lumière
Méfiez-vous de votre vocation poétique, n'essayez pas de rattraper un TGV en voiture et faites livrer vos Havanes à domicile...
(La suite dans le Magazine des livres n°11 qui vient de sortir en kiosques).
Extrait de Tu écris toujours ? (feuilleton d'un écrivain de campagne), inédit.
18:46 Publié dans FEUILLETON : tu écris toujours ? | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : feuilleton, presse, christian cottet-emard, magazine des livres, blog littéraire
14 juillet 2008
Pourquoi Mhorn s'appelle-t-il Preben ?
Un de ces jours de canicule, la mère de Preben Mhorn, dans les derniers mois de sa grossesse, avance péniblement dans le parc public de la petite cité industrielle. Elle finit par s'asseoir sur un banc, au bord de l'étang, et elle regarde l'eau aussi lisse et opaque que le ciel vert-de-grisé. Pas une feuille ne bouge dans les grands frênes autour de l'étang.
Un parc dans une ville déserte, un été de plomb, un banc au bord d'une flaque d'eau huileuse et ce gros ventre si lourd à transporter, ainsi s'écoulent ses journées. La voilà qui somnole dans la chaleur. Un gros poisson de vase a effleuré la surface du plan d'eau. La mère de Preben sent ses yeux se fermer sur les cercles qui trahissent la présence de l'animal.
Tout est trempé, il y a de l'eau partout, mais de l'eau tiède et rien que de l'air chaud à respirer. La jeune femme dévale un torrent puis un fleuve en crue. Un enfer de bouillonnements et de gargouillis. Un fleuve fangeux, le fleuve des Enfers, le Styx, l'Achéron ou le Cocyte. À moins que ce ne soit le Phlégéton et son flot de flammes. Alors, lui revient en mémoire l'arrêt devant l'étang. Dans sa descente des eaux en furie, elle agrippe les nageoires du poisson de vase et elle l'enfourche. Le poisson saute d'un gigantesque bon et projette partout de l'écume boueuse. Il retombe au milieu d'un cercle qui se répercute à l'infini à la surface paisible d'un fjord bordé de fraîches et sombres forêts. Le Nord ! Le Septentrion ! Un enfant d'une grande beauté sort de l'eau du fjord. Un enfant avec un prénom du Nord : Preben.
- Et comment l'appelons-nous ce beau garçon ? demande la sage-femme.
- Preben. Il s'appelle Preben, répond la jeune femme dans un souffle.
Et voilà pourquoi l'enseigne de vaisseau Mhorn s'appelle Preben. À cause de la canicule dans les montagnes orageuses et du poisson de vase.
(Extrait de : Le Grand variable, éditions Editinter, 2002. Épuisé)
Photo MCC
00:33 Publié dans Mes personnages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le grand variable, littérature, blog littéraire, christian cottet-emard, editinter, naissance, grossesse
02 juin 2008
Le vol nuptial de la pipistrelle
Quel dommage de n’avoir pas consacré ta vie à l’étude du vol nuptial de la pipistrelle
Mais comme te l’a souvent fait remarquer ton père tu n’as aucune patience il aurait fallu suivre en sciences naturelles et même en arithmétique seulement voilà
Tu tournais la tête vers la fenêtre avec vue sur le clocher même le glas une bonne partie de la matinée te semblait aimable comparé aux heures d’école
Ce soir de feuillage tendre les pipistrelles volent par deux parfois une troisième les poursuit
D’habitude la pipistrelle sort seule vole mange et se fiche pas mal du reste
Tu aurais pu décréter rien d’autre ne compte que le vol nuptial de la pipistrelle et je me fiche du reste tu serais devenu un spécialiste tes parents seraient fiers de toi tu ne serais pas un songe-creux
Comme tout est compréhensible ce soir
Si proche le monde des toits
Si nettes les vaguelettes des tuiles les cheminées sur fond de ciel mauve où gribouille comme sur une ardoise magique l’amoureuse pipistrelle
L’amoureuse pipistrelle bouche d’ombre de la non moins amoureuse phalène
© Éditions Orage-Lagune-Express 2008.
12:39 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : pipistrelle, crépuscule, soir, ciel, phalène, poésie, blog littéraire