12 décembre 2006
Sur une plage des Landes
Tu as longtemps cru que la poésie était un diamant à extraire de la boue
Qu’il fallait s’acharner à le trouver puis à le tailler jusqu’à la perfection qui n’est pourtant pas du monde des humains
Mais non le diamant naît des catastrophes et les provoque
Vois plutôt sur la plage des Landes ce petit joyau vert poli qui fut un éclat de verre
La même vague millénaire le dépose aujourd’hui tout lisse et lumineux à tes pieds
Sans doute un fragment de canette de bière
Combien de décennies entre celle ou celui qui goûta la mousse de cette bière sous les parasols d’un petit bistrot et toi qui te promènes dans l’écume de mer ?
Tu n’as qu’à te baisser pour t’offrir ce bijou d’océan
Car personne ne jugera utile d’exploiter de tricher de blesser ou de tuer pour le garder dans la main
Joyau de sable retournant doucement au sable après s’être offert au hasard de ton pas comme toute poésie qui n’est et ne saurait être diamant
(Copyright : Orage-Lagune-Express, 2006)
11:45 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Poésie, océan, Landes, bière, diamant, joyau, bijou
Commentaires
J'aime beaucoup...
Écrit par : Pascale | 12 décembre 2006
Merci.
Écrit par : Christian Cottet-Emard | 12 décembre 2006
Au risque de paraître…, mais non, voici, en écho :
Encre (paru dans Encres Vagabondes)
Une goutte d’encre est un lac où un ange a chu si brillamment que la corolle noire de l’impact a le poli de la bakélite, la gracile élégance d’une ombelle fraîchement vernissée, en son centre, — en son ventre où disparaît, engloutie, l’aile agile et frêle du messager divin à jamais immergé dans une obscurité liquide et sirupeuse, collant aux plumes, tenant de l’huile usée et du goudron sécrétés par les soutes d’un jadis si majestueux paquebot, éclatant de blancheur lisse, étoilée, rehaussée du sourire perlé des coquillages servis dans des grands plats d’argent sur le rebord desquels, parmi les algues et les poissons en incrustation d’émail, les guirlandes électriques multicolores bercées par la brise mystérieuse, les lèvres nacrées des femmes en vison, les cols satinés des smokings et les épaulettes d’or des uniformes d’apparat se pressaient, s’agglutinaient et s’évanouissaient en un chapelet de reflets, jouant déjà la scène du naufrage, du fatal destin des lourdes chaloupes au chargement livide, — les coquilles, jetées par-dessus bord depuis le pont des cuisines, attendant patiemment leurs nouveaux hôtes, et légèrement les corps s’enfonçant, se frayant un chemin vertical, hésitant et nécessaire, enrobés d’une solitude qui est celle des astres, auréolés d’un lent nuage verdâtre de poussière marine, impalpable et fuyant suaire de leur déliquescence, premier signe de l’inéluctable entropie dont la pierre renferme les strates, ces cris oppressés de la matière qui, en se disloquant, s’affine et, sur la berge, alanguie, s’étale, poudre de nacre scintillante, pure, et conserve un instant l’empreinte incertaine et fugace de l’aile d’un ange imprudent, tandis que les corps rongés et mous, un à un, gonflés d’un ironique besoin de s’élever, remontent à la surface et jouent dans les vagues.
Écrit par : J.-J. M. | 13 décembre 2006
Bel et angoissant écho marin...
Écrit par : Christian Cottet-Emard | 14 décembre 2006
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