22 mai 2009
Jours et nuits de grand vent.
Dans le chemin, les anémones pulsatilles ont étiré leurs corolles en petits plumeaux qui capturent la rosée. On pourrait croire qu’il s’agit d’autres plantes, mais non, ce sont bien toujours les anémones. Elles se transforment pour mieux revenir identiques à elles-mêmes, dans un an. Pendant que les lilas enveloppent la maison de parfum, les jonquilles finissent leur brève saison sur les hauteurs. Les narcisses, moins nombreux mais plus odorants, leur succèdent. Le grand pré derrière la maison m’a pris de vitesse et je me retrouve avec trois mille mètres carrés de foin. Plus question de parler de tonte mais de fauchage... Tout autour, les frênes, qui sont les derniers à dérouler leurs feuilles et les premiers à les perdre, s’ébrouent dans les courants d’air chaud. Certaines nuits, la lune semble poussiéreuse entre les nuages d’orage. Le feuillage tout neuf du tilleul filtre le halo du dernier lampadaire du village. Dans la zone sombre du ciel, quelques lointains éclairs. Effet de fœhn. Au printemps, ma grand-mère appelait ce phénomène « le vent foliéru » (le vent des feuilles) et en automne « le vent défoliéru » (le vent qui les enlève). En ces jours et ces nuits de vie intense, dans les bourrasques joyeuses et parfumées, je l’entends : « tiens, voilà le vent foliéru ! »
Photos : jonquilles dans le Haut-Jura (photos MCC, mai 2009).
01:39 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : anémones, foehn, vent, nature, frêne, blog littéraire christian cottet-emard, carnet
Commentaires
Autant la nature m'ennuie en tant que peintre, autant elle me ravit en tant qu' homme, merci, Christian pour ce petit texte qui pourrait être le journal d'un naturaliste mais qui est bel et bien une oeuvre littéraire tant il met l'eau à la bouche et le sel de la terre sur le bout de la langue. Ha ! ce qu'on est bien dans la nature ! J'ai passé tous ces jours dehors, devant ma caravane, la dite caravane qui a, en plus de servir de couchage, la faculté de me rappeler qu'il ne faut pas grand chose pour être heureux (je veux même dire le moins de chose possible)...
D'une radio nasillarde posée sur ma table de camping, j'ai entendu sur France culture aujourd'hui, lors de l'émission "Des papous dans la tête" (exemple d'émission drôle, légère et distrayante sans pour autant être carabinée de people et de grossièreté racoleuse) cette phrase de Maupassant que je trouve particulièrement savoureuse :
"Le train venait de quitter Gènes, allant vers Marseille et suivant les longues ondulations de la côte rocheuse, glissant comme un serpent de fer entre la mer et la montagne, rampant sur les plages de sable jaune que les petites vagues bordaient d’un filet d’argent, et entrant brusquement dans la gueule noire des tunnels ainsi qu’un été dans son trou."
Comme dit lors de l'émission, " ainsi qu’un été dans son trou" c'est tout de même une belle trouvaille... pour noter cette différence de lumière, de soleil, de chaleur avec brusquement le noir et la fraîcheur du tunnel.
Écrit par : Jacki Maréchal | 24 mai 2009
Le vent foliéru qui joue dans les es anémones pulsatilles: très joli.
Écrit par : alain bagnoud | 26 mai 2009
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