01 mai 2023
Carnet / Sacré Bruno !
L’écriture des scènes de sexe est une des difficultés des écrivains. Même les meilleurs y échouent parfois, alors évidemment, les médiocres et les mauvais… Dans la catégorie des meilleurs, l’un d’eux, Jim Harrison, réussit bien mieux ses scènes de gueuleton que ses instantanés érotiques rapides et un peu bâclés.
Si Jim Harrison rame sur ses scènes de sexe, on comprend que notre ministre de l’économie, romancier à ses heures vraiment perdues, s’y casse les dents avec l'énumération de ses fantasmes de vieil abonné à Playboy bien volontiers accueillie (pour le coup) par Gallimard dans la collection blanche. Pour ceux qui n’auraient pas lu, allez vous documenter sur Facebook histoire de rigoler un peu.
En d’autres temps, un ministre en exercice tenté de filer la gaudriole de fiction aurait au moins pris un pseudonyme, je ne sais pas moi, quelque chose d’un peu discrètement vieille France comme Bruno Saint-Vit de la Rosette par exemple… Eh bien non, le ministre de l’économie préfère avancer à nu en « littérature » . Et pour la suite, après Marlène dans Playboy, Bruno dans Playgirl ? Pas étonnant qu’Élisabeth ait les boules !
01:49 Publié dans carnet, NOUVELLES DU FRONT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : carnet, billet, humeur, humour, blog littéraire de christian cottet-emard, playboy, playgirl, presse, magazine, actualité, ministre, économie
28 avril 2023
Conseils aux auteurs ratés
Il nous est tous arrivé au moins une fois dans notre vie de penser à quelqu’un sans raison particulière et de le voir rappliquer le jour même voire quelques instants après. J’étais exactement dans cette situation l’autre jour, le nez écrasé contre ma porte d’entrée et l’œil rivé à l’œilleton dans lequel se déformait de la plus hideuse manière le visage d’une vieille connaissance, l’auteur abonné aux circulaires de refus des éditeurs du monde entier, le genre de type très déprimé à qui on a envie de répondre je ne suis pas là s’il s’avise d’appuyer sur le bouton de la sonnette. Ne pas céder à toutes nos pulsions constitue la base de la civilisation. J’ouvris la porte et dis Ah quelle bonne surprise... Mais entre donc. Que me vaut le plaisir de ta visite ?
— Ils m’ont encore refusé. Je n’en peux plus. Tu veux que je te dise ? Je crois bien que j’ai raté ma vie.
— Impossible.
— Pardon ?
— Impossible. Comment veux-tu rater (ou réussir, d’ailleurs) quelque chose que tu n’as pas entrepris ?
— Je ne comprends pas.
— C’est pourtant simple, ni toi ni moi n’avons entrepris nos vies. Nous n’avons pas entrepris de naître et de vivre, donc nous ne pouvons réussir ou rater quelque chose que nous n’avons pas entrepris. Nous n’y sommes pour rien, nous naissons et nous vivons, c’est tout.
Le pauvre garçon n’avait pas l’air convaincu, probablement parce que je ne l’étais pas moi-même. (Si nous devions croire en toutes les vérités que nous infligeons à autrui à longueur de journée, nous renoncerions tous à la parole et toute la classe politique se volatiliserait). Je tentai donc quand même de redonner le moral à mon interlocuteur en lui suggérant que dans une autre vie, peut-être pourrait-il se réincarner sous la forme d’un auteur à succès, comme mon voisin. « Tu parles ! Je suis tellement nul que c’est en limace que je me réincarnerai !
— Tu vois, tu es toujours négatif. Tu pourrais choisir un autre animal, un écureuil par exemple.
— Pourquoi un écureuil ?
— Parce qu’il vaut mieux sauter dans les arbres avec la queue en panache que passer son temps à ramper dans le mouillé en laissant des traces gluantes. »
Je rapporte cette conversation pour montrer à quel point l’obstination des éditeurs à refuser les manuscrits des auteurs ratés peut s’avérer vraiment préjudiciable à la tranquillité de personnes compréhensives dans mon genre alors obligées d’accueillir, d’écouter, de consoler et de conseiller bénévolement les recalés qu’ils fabriquent à la chaîne.
Ceci dit, face au grand dépressif qu’est l’auteur raté, vous avez intérêt à trouver les bons arguments pour éviter qu’il n’attente à ses jours en sortant de chez vous, ce qui ferait désordre auprès des voisins. « Malgré tes échecs auprès des éditeurs, tu as au moins produit une œuvre, dis-je à mon visiteur. J’aurais plus de raisons que toi de me plaindre, moi qui rêvais d’écrire et qui me suis contenté de procrastiner. J’avais bien une idée de roman mais mon voisin a été plus rapide et c’est lui qui a touché le gros lot. Avant d’accéder à la gloire et à la fortune, il était comme toi, un auteur raté. Son best-seller raconte l’histoire d’un auteur raté qui tombe amoureux d’une jeune, belle et riche héritière. Tu vois, ce n’est pas si compliqué. »
Transformer le handicap en une force, voilà le meilleur conseil que vous puissiez donner à un auteur raté qui vient vous servir à domicile sa soupe à la grimace et l’amère tisane de ses états d’âme. Pour les cas les plus sévères, je préconise le travail manuel. En effet, l’auteur raté ne doit pas passer sa journée à ruminer, surtout s’il a décidé de venir faire ça chez vous. On peut gagner beaucoup à le distraire de son sentiment d’échec en lui confiant de petits travaux qui lui permettent de retrouver l’estime de soi. Vous faites ainsi une bonne action et des économies, au prix où est la main-d’œuvre...
Au dernier auteur raté qui a cru bon de larmoyer dans mon salon, j’ai proposé de monter ma cuisine achetée en pièces détachées chez Iyaka. En le regardant travailler depuis mon poste d’observation du monde favori, mon fauteuil, au coin du feu en fumant un bon cigare, j’ai pensé à la belle carrière qui aurait pu être la sienne chez Iyaka s’il n’avait pas persisté dans celle d’auteur raté. Pour être sûr qu’il avait repris confiance en lui, je lui montrai les lames encore empaquetées d’un parquet flottant destiné au deuxième étage de ma maison.
J’avais tellement bien réussi à motiver le brave garçon qu’il se déclara prêt à attaquer tout de suite mais comme je me sentais un peu fatigué de l’avoir vu s’agiter toute la journée avec ses outils bruyants, je l’invitai à revenir le lendemain, après ma sieste si possible. Je ne rechigne pas à donner de mon temps pour aider mon prochain mais tout de même, il ne faut pas exagérer.
Les services de presse sont à demander à contact.ccottetemard@yahoo.fr
Pour les gens d'Oyonnax et sa région, ce livre récemment paru est disponible au prix de 10 € au kiosque de l'hôpital d'Oyonnax.
- ASIN : B0BTRRBS4V
- Éditeur : Orage-Lagune-Express (diffusion Independently published).
- Langue : Français
- Broché : 210 pages
- ISBN-13 : 979-8376160671
- Poids de l'article : 236 g
- Dimensions : 11 x 1.35 x 18.01 cm
Également en vente par correspondance sur :
- Amazon
17 mars 2023
Conseils aux écrivains excédés par le bricolage
Cet épisode de Tu écris toujours ? tel qu'il était paru dans le Magazine des livres n°26 (septembre / octobre 2010).
Entre toutes les tâches qui pourrissent la vie de l’écrivain, le bricolage, ersatz de cette autre corvée qu’est le travail, devrait normalement être banni du quotidien de l’auteur qui se respecte, tout comme le quotidien lui-même d’ailleurs, sans oublier le travail, bien sûr. Pourtant, à ma grande honte, j’avoue qu’il m’arrive de bricoler, à l’inverse de mon riche voisin auteur d’un best-seller qui peut quant à lui se permettre de payer des spécialistes pour se taper sur les doigts et se salir les mains à sa place.
Je conseille donc à tout auteur allergique au bricolage de pondre d’urgence un best-seller. En ce qui me concerne, je n’en ai pas encore eu le temps car je ne dispose pas dans ma maison d’une gouvernante telle que Madame Tumbelweed qui veille si jalousement au bien-être de mon voisin et de son chat Sir Alfred. Injustement privé d’un tel soutien, je dois me résoudre à gérer moi-même les détails les plus triviaux de mon quotidien.
L’hiver dernier, par exemple, je suis tombé bien bas. J’ai transformé une vieille chemise en blouse et je me suis coiffé d’un bob publicitaire arborant le slogan : « Ohé matelot, la sardine qu’il vous faut » , un cadeau de Madame Tumbelweed. Elle détient une quantité considérable de ces couvre-chefs en raison de sa fidélité à l’épicerie qui fournit sa nourriture préférée à Sir Alfred. Ainsi affublé, j’ai peint au rouleau la moitié du plafond de mon salon après quoi je me suis ménagé une pause. Six mois après, pas plus tard que cet été, Madame Tumbelweed m’a donné un autre bob pour que je puisse peindre l’autre moitié du plafond. La pire des corvées durant ces travaux consiste en inévitables expéditions au magasin de bricolage où un phénomène étrange se produit dès mon arrivée.
La première fois que j’ai passé la porte de ce hangar surmonté d’une banderole sur laquelle on devrait inscrire non pas « Promotions sur les perceuses » mais plutôt « Vous qui entrez ici, laissez toute espérance » , tout s’est pourtant bien passé. Un vendeur est venu à ma rencontre. Alors que c’est habituellement moi qui prodigue des conseils, je me suis trouvé dans la pénible position d’en demander. Le vendeur m’a conseillé et je n’ai rien compris. C’est un peu plus tard que la situation a dégénéré.
Au fil des semaines, après plusieurs tentatives auprès d’un grand nombre de ses collègues, j’ai remarqué qu’à chacune de mes visites, le magasin semblait se vider de ses vendeurs. Plus une seule blouse à l’horizon. Abandonné à mon sort au rayon enduits et colles, telle la mouche engluée sur le ruban, j’en apercevais parfois un se faufiler telle une bête traquée entre les cuisines et les salles de bain. À l’évidence, ils avaient entrepris de m’éviter et vous n’imaginez pas la quantité de cachettes que recèle un magasin de bricolage.
Un jour, au rayon jardin, j’ai soulevé machinalement le couvercle d’une poubelle en plastique. Eh bien, vous me croirez si vous voulez, elle contenait un vendeur qui n’a rien trouvé de mieux à me dire d’un air gêné qu’il vérifiait l’étanchéité.
Un autre jour, pour qu’on s’occupe enfin de moi, je me suis déguisé en bricoleur. Je suis entré dans le magasin vêtu d’une salopette et coiffé d’une casquette publicitaire des peintures Hume & Plane sur laquelle était imprimé en jaune fluo « Peignez sans odeurs » (ils ne savent vraiment plus quoi inventer, vous pouvez très bien vous livrer à cette activité certes assez physique sans la moindre odeur en utilisant votre déodorant habituel). Au lieu d’attirer un vendeur, je me suis retrouvé cerné de clients bien décidés à ce que j’apporte une solution définitive à leurs problèmes de chasse d’eau, tout cela parce que je poireautais sous une pancarte portant la mention « Recyclez l’eau de vos toilettes » . J’ai choisi la fuite et je me suis coulé vers le rayon des papiers peints où j’ai fait tapisserie un bon moment. Un vendeur s’est approché. Mon erreur : avoir ôté ma casquette pour le saluer. Il m’a reconnu et a détalé en me jetant un regard épouvanté.
Bien sûr, j’aurais pu me plaindre à la direction mais je me suis souvenu que lors d’un salon du livre, je me suis carapaté encore plus vite devant un chasseur d’autographes notoire, vous savez, ce genre de pervers qui passent leur temps à se faire dédicacer des bons de souscription ou de commande sans acheter les livres qui vont avec. Il est vrai qu’en cette situation, je n’aurais pas hésité à sauter dans la première poubelle venue, même en courant le risque de la trouver déjà occupée par un confrère. J’ai donc pardonné aux vendeurs du magasin de bricolage mais leur carte de fidélité, ils peuvent la donner au sanibroyeur en promotion qu’ils m’ont livré à la place du destructeur d’archives que j’avais commandé.
Pour les gens d'Oyonnax et sa région, ce livre qui vient de paraître est disponible au prix de 10 € au kiosque de l'hôpital d'Oyonnax.
- ASIN : B0BTRRBS4V
- Éditeur : Orage-Lagune-Express (diffusion Independently published).
- Langue : Français
- Broché : 210 pages
- ISBN-13 : 979-8376160671
- Poids de l'article : 236 g
- Dimensions : 11 x 1.35 x 18.01 cm
Également en vente par correspondance sur :
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