24 septembre 2016
Grandes fêtes sous la lune
La jeune fille revint quinze jours plus tard. Amusée, elle composa ses initiales puis sa date de naissance sur le clavier et la porte se déverrouilla dans un déclic. Andrade avait bien entré ce nouveau code d’accès. Elle en fut flattée. Avant de gravir le grand escalier aux azulejos, elle inspecta son reflet dans les miroirs défraîchis et tenta de dompter une mèche rebelle en sachant très bien qu’elle n’y parviendrait pas.
Photo © Christian Cottet-Emard
Tout en haut, la porte entrouverte de la bibliothèque libérait un filet de musique. N’obtenant pas de réponse après avoir frappé, la jeune fille risqua quelques pas en direction de la masse sombre du bureau d’où ne se détachait que la lueur bleue de la lampe en pâte de verre et la silhouette immobile d’Andrade.
Affalé dans son fauteuil, il dormait dans une position inconfortable, la tête légèrement inclinée vers l’épaule. Elle n’avait plus qu’à repartir mais elle se ravisa en pensant qu’elle avait traversé la moitié de la ville. Elle espérait que sa présence dans la pièce suffirait à le réveiller mais elle remarqua un flacon presque vide et un verre sur le bureau. Elle le saisit et huma le bouquet rond et puissant du bourbon. Le lecteur de disque diffusait toujours sa musique. « Motets de Louis Nicolas Clérambault » lut la jeune fille sur le coffret ouvert juste à côté. Elle reposa le verre et effleura timidement le bras d’Andrade qui poussa un soupir sans pour autant reprendre conscience. Dépitée, elle s’assit sur le bord du bureau, reprit le verre, huma de nouveau et but une petite goutte qui lui brûla la gorge et la fit tousser bruyamment. Le visage empourpré, elle reposa précipitamment le verre et paniqua à l’idée de voir Andrade se réveiller à ce moment précis mais il ne bougea pas d’un cil. Soulagée, elle attrapa un petit miroir décoratif posé avec d’autres bibelots sur le bureau et vérifia son image. Elle remit avec précaution le miroir à sa place et observa Andrade avec curiosité. Elle s’approcha pour mieux distinguer son visage et pour en étudier les détails, notamment les zones où naissait le voile sombre de la barbe. Elle se pencha un peu plus encore jusqu’à ce que ses cheveux recouvrent cette peau foncée, glabre, qu’elle trouva rêche après l’avoir effleurée d’un rapide baiser.
La jeune fille était partie depuis longtemps lorsqu’Andrade se réveilla. Il se souvint d’un rêve. Il marchait dans une longue rue déserte, bordée de chaque côté de hauts murs. À sa droite, apparaissait une petite porte en bois vermoulu. Il l’ouvrait sans difficulté et se retrouvait dans un grand jardin abandonné et luxuriant. Après quelques pas, il s’asseyait sous un saule pleureur bruissant. Il s’endormait, mais d’un sommeil léger parce qu’il sentait le saule pencher son feuillage et lui effleurer le visage de ses tendres ramures.
(Extrait de Grandes fêtes sous la lune, une des nouvelles de mon recueil Mariage d'automne publié aux éditions Germes de barbarie) Droits réservés.
00:57 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mariage d'automne, amazon kindle, livre numérique, christian cottet-emard, nouvelles, littérature, fiction, blog littéraire de christian cottet-emard, amoureux trois quarts d'heure, bien le bonjour de l'adjudant kaiser, des pas dans la nuit, éclaircies, grandes fêtes sous la lune, beignets ! qui veut des beignets ?, la rolls verte, la photocopieuse, rendez-vous à pré nuble, feuilles mortes et pages décollées, le vieux pull, passage d'un vivant, le jour où la vérité s'invita au barbecue, au bazar des hirondelles, figures libres couple, droits réservés, fiction romanesque
09 octobre 2015
Carnet / Pourquoi j’ai testé la publication sur Amazon
Celles et ceux qui me font l’amitié de me lire s’étonnent de me voir publier en livre numérique chez Amazon un ouvrage initialement programmé en édition papier. Il s’agit de mon recueil de nouvelles Mariage d’automne qui sortira comme prévu en édition papier mais dont le thème m’a semblé idéal pour tester cette forme de publication proposée par Amazon et quelques autres.
À NE PAS CONFONDRE AVEC L’AUTOÉDITION
Ce choix déroute deux types de lecteurs, ceux qui se montrent allergiques à la lecture sur support numérique pour des raisons techniques et ceux qui en ont contre la politique commerciale aggressive d’Amazon. On peut éventuellement ajouter la catégorie des gens persuadés que la publication sur Amazon est une autoédition, ce qui est faux puisque pour un auteur, l’autoédition se caractérise par la maîtrise et la prise en charge totale du processus d’édition, de diffusion et de distribution, de ses coûts comme de ses profits. Il n’en est rien chez Amazon où l’on signe un contrat et où l’on touche un pourcentage sur les ventes et les pages lues.
LES CONTRAINTES RELATIONNELLES EN MOINS
Bien avant l’offre Amazon, j’éprouvais déjà le besoin de tester la publication numérique, non pas par opposition à l’édition classique mais pour tenter d’adapter mon activité d’auteur à mon mode de vie. Je n’ai jamais été un homme de réseau et je suis incapable de travailler en équipe, or ces conditions sont de nos jours particulièrement recommandées pour vivre sa vie d’auteur dans le monde de l’édition, la grande comme la petite.
J’ai aussi la faiblesse de vivre à la campagne, d’être rétif aux résidences d’auteur, de refuser de participer à des lectures publiques en prison ou dans des pays dangereux et de n’avoir aucun goût pour animer des ateliers d’écriture. Je comprends que de telles réserves puissent paraître rédhibitoires à des éditeurs, petits ou grands, rêvant parfois de voir leurs auteurs cumuler les compétences de représentant auprès des libraires, d’attaché de presse et d’animateur social. J’aggrave personnellement mon cas avec une faible capacité à refaire le monde au bistrot, à renouer avec la dimension orale de la poésie au moyen du slam et à changer ma coupe de cheveux.
C’est au stade de cet accablant constat qu’intervient favorablement pour moi Amazon dont les robots, algorithmes, super calculateurs et autres incompréhensibles, merveilleux et monstrueux dispositifs se fichent pas mal de mes cheveux trop courts, de mon apparente froideur, de mon charisme de moule d’eau douce et du fait que je sois meilleur à l’écrit qu’à l’oral. Avec des éditeurs en chair et en os, l’écrit, désormais, ne suffit plus. On subit des rites de passage comme pour rejoindre une tribu, aussi bien dans les grandes maisons que dans les petites, surtout dans les petites. Il faut montrer patte blanche, se faire accepter par les autres membres de la meute, avoir la tête de l’emploi, s’intégrer, faire allégeance, et il suffit de peu de chose, une idée, une opinion non conforme ou un mot de travers lâchés sur un blog ou un réseau social, pour faire avorter un projet.
Rien de tout cela chez Amazon. Une fois le texte en ligne et l’œuvre au catalogue, pas besoin d’attendre d’hypothétiques relevés de vente, on suit tout au jour le jour sur des graphiques et on sait même quand quelqu’un a lu ou commandé. Après, on reçoit un virement. La seule faiblesse du système est la nécessité de concevoir soi-même l’exemplaire numérique, ce qui n’est pas du gâteau. Mieux vaut connaître quelqu’un rompu à cette technique.
LIBERTÉ ET SÉCURITÉ DE L’AUTEUR
En ce qui concerne la promotion de l’ouvrage, Amazon le propose directement et régulièrement sur son gigantesque réseau à ses clients dont il est capable de cibler les centres d’intérêt. L’auteur peut suspendre à tout moment s’il le désire l’exploitation de son livre dont il conserve les droits, ce qui est à mon avis un des grands atouts de cette forme de publication. Un autre avantage consiste à se servir de la publication numérique comme d’une preuve de dépôt en cas de procédure contre le plagiat, un risque qu’il ne faut pas négliger lorsqu’on est littérairement actif sur internet. C’est une sécurité à laquelle je suis particulièrement attentif, vigilant et réactif s’il le faut.
En conclusion provisoire, car j’aurai certainement l’occasion de revenir sur ce sujet, je pense que la publication numérique chez Amazon est aussi favorable à l’auteur au faible potentiel relationnel que la pratique de l’orgue peut être bénéfique au musicien timide.
01:14 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : carnet, note, journal, écriture de soi, autobiographie, prairie journal, blog littéraire de christian cottet-emard, littérature, édition, publication, contrat d'édition, christian cottet-emard, mariage d'automne, nouvelles, amazon kindle, livre numérique, amazon, édition numérique, ebook
16 août 2015
Étude de couverture pour Mariage d'automne
Édition numérique disponible ici :
Seize variations sur le thème du sentiment amoureux à travers les âges de la vie et les humeurs du moment.
Sommaire :
Mariage d’automne
Amoureux trois quarts d’heure
Bien le bonjour de l’adjudant Kaiser
Des pas dans la nuit
Éclaircies
Grandes fêtes sous la lune
Beignets ! Qui veut des beignets ?
La Rolls verte
La photocopieuse
Rendez-vous à Pré Nuble
Feuilles mortes et pages décollées
Le vieux pull
Passage d'un vivant
Le jour où la vérité s’invita au barbecue
Au Bazar des Hirondelles
Figures libres, couple
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00:36 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : mariage d'automne, amazon kindle, livre numérique, christian cottet-emard, nouvelles, littérature, fiction, blog littéraire de christian cottet-emard, amoureux trois quarts d'heure, bien le bonjour de l'adjudant kaiser, des pas dans la nuit, éclaircies, grandes fêtes sous la lune, beignets ! qui veut des beignets ?, la rolls verte, la photocopieuse, rendez-vous à pré nuble, feuilles mortes et pages décollées, le vieux pull, passage d'un vivant, le jour où la vérité s'invita au barbecue, au bazar des hirondelles, figures libres couple, droits réservés, fiction romanesque