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10 janvier 2024

Un extrait de mon roman LES FANTÔMES DE MA TANTE, à paraître le 31 janvier.

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J'en voulais un peu à Pelham. M'avoir recommandé une soirée de poésie où il n'y avait rien à boire et à manger ! Lui de si bon conseil, d'habitude ! D'où pouvait-il être informé des réunions de cette bande de zombies ? Inutile de faire le point pour si peu, me dis-je en prenant la direction du centre-ville.

 

Je battais le bitume luisant à travers le brouillard où flottaient les globes opalescents des lampadaires lorsque les nappes de brume commencèrent à se dissiper. De la lumière et de la musique provenaient de la rue où progressait une grande parade alternant groupes en costumes et fanfares. Des acrobates jonglant avec des flèches de feu juchés sur des grands bis et autres bicyclettes étranges ouvraient la route à un immense Pégase mécanique aux naseaux fumants dont les ailes déployées frôlaient les balcons des immeubles. Des escadrilles de petits dirigeables multicolores et fluorescents flottaient au-dessus du cortège acclamé par la foule. Des lutins s'approchaient des enfants en secouant leurs grelots

 

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Le défilé s'étira dans une rue qui accédait au parking de la porte monumentale où se regroupaient les attractions les plus encombrantes comme le cheval ailé mécanique géant et, très applaudi lui aussi, le Jolly Roger, le vaisseau de l'effrayant capitaine Crochet escorté par la troupe des personnages de Peter Pan évoluant tous sur des échasses. Ainsi perchés, ceux-là prenaient position juste devant l'arc de la porte monumentale sous les regards, l'un navré et l'autre réjoui, des deux faces de lune de la publicité pour la crème Éclipse (cirage à la cire).

 

Je regardais le méchant capitaine mouliner l'air de son redoutable crochet sous les yeux effarés de Wendy et ses frères mais je me demandais bien où était passé Peter Pan. Tout près de moi, une petite fille lâcha le fil de son ballon. Je le rattrapai de justesse et le lui rendit, ce qui me valut un sourire de la maman. Je ne vois pas Peter Pan, dis-je, où peut-il bien être ? Mais c'est toi, Peter Pan ! s'exclama la petite fille.

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C'est alors qu'apparut, du haut de ses échasses, la fée Clochette. Elle flottait dans les faisceaux des projecteurs en agitant son grelot et évoluait avec une grâce de danseuse au-dessus de tous ces regards montant vers elle. Je ne pouvais détacher le mien de ses yeux et dès lors, je ne cessai de la suivre dans tous ses déplacements.

 

Fermé par un char transportant une bouteille de champagne de la taille d'un camion, le cortège des attractions reprit son mouvement et fit un deuxième tour du quartier. À force de marcher la tête en l'air les yeux fixés sur la fée Clochette, celle-ci finit par croiser mon regard à plusieurs reprises. Où est Peter Pan ? lui criai-je, mais elle ne pouvait m'entendre dans ce brouhaha, même si elle devinait peut-être que je m'adressais à elle. Tandis qu'elle continuait à glisser dans les airs en compagnie des autres comédiens de sa troupe d'échassiers, je me sentais faiblir et je finis par la perdre de vue dans un mouvement de foule qui portait les gens vers la zone piétonne où se mêlaient les effluves de friture et de confiserie.

 

Je décidai de faire le point entre un stand de vin chaud et une baraque à frites. C'est gratuit pour les comédiens, m'apprirent les marchands alors que je tendais un billet, soulignant ainsi mon accoutrement que Pelham considérait comme le summum de l'élégance.

 

Le verre de vin chaud me revigora aussitôt. Je picorais les frites dans la barquette lorsqu'une main toute fine, gracieuse, comme ciselée, descendit doucement du ciel devant mes yeux et saisit avec une horlogère application une frite entre le pouce et l'index. Je levai la tête et vis la fée Clochette, toujours perchée sur ses échasses, qui se penchait sur mon visage. Au moyen d'un petit moteur électrique intégré à son costume, elle faisait frétiller ses ailes puis les immobilisait et recommençait comme le font les libellules, peut-être dans leur parade nuptiale. Elle porta la frite qu'elle venait de saisir à sa bouche qu'elle avait rouge comme un bonbon et la mâcha lentement en me fixant dans les yeux d'un air à la fois provocateur et compatissant, comme si elle me lançait un défi. Sa main subtilisa une autre frite qu'elle coinça entre ses lèvres comme une cigarette. Elle approcha son visage tout près du mien tandis que ma bouche attrapait l'autre extrémité de la frite. Nos lèvres se touchèrent ainsi plusieurs fois à ce petit jeu brutalement interrompu par une puissante détonation.

 

Le bouchon de la bouteille de champagne géante venait de sauter, libérant un bouquet de feu d'artifice qui surprit la fée Clochette et la déséquilibra. Elle faillit chuter sur le bitume mais je la réceptionnai juste à temps par la taille tandis que valdinguaient ses échasses et que ma braguette déjà comprimée me rappela durement que je n'étais pas un personnage de fiction et encore moins un pur esprit.

 

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Extrait de : Les Fantômes de ma tante, roman. Parution le 31 janvier 2024. 230 pages. © Club, 2024.

Photos © MCC.

09 novembre 2014

L’auteur

(Extrait de mon recueil de trois nouvelles fantastiques Trois figures du Malin, © éditions Orage-Lagune-Express, 2004. Droits réservés.

Écouter une autre nouvelle du recueil sur Bonne nouvelles, le site de Nicole Amann.)

Pour ne pas ralentir mon allure, je ne me retournerai plus. C’est un peu comme suspendu dans le vide : mieux vaut ne pas regarder en bas pour continuer l’escalade. Je voudrais quitter plus vite ces quartiers trop animés où se condense en lourds panaches le souffle de centaines de bouches aux lèvres gercées par le froid. Je sais maintenant que la peur a un visage, celui, multiple, des foules anonymes noyées dans leur rumeur.

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Photo extraite d'une vidéo de Marie-Christine Caredda, gare d'Oyonnax, soir, novembre 2014.

Derrière ces faces, des intelligences étrangères en savent long sur moi, croisent des fichiers et poursuivent leurs enquêtes. Je sais aujourd’hui ce que signifie être atteint et ce n’est guère mieux qu’être atteint d’une maladie. Oui, des gens que je ne connais pas savent qui je suis, d’où je viens et comment je vis alors que je l’ignore moi-même. Pour eux, mon passé, mon présent et peut-être mon futur sont déjà écrits. Ils n’ont plus qu’à lire ces conjugaisons auxquelles se résume, pour eux, mon existence et à en tirer les conclusions. Ils peuvent même se payer le luxe, à travers moi, d’une autre vie, plus aventureuse, plus palpitante que la leur, moins insignifiante que celle qu’ils mènent dans une banalité et un confort à jamais inaccessibles à ma condition.

Quelle est ma condition ? Marcher. Marcher sans relâche dans les rues sans joies d’une petite ville industrielle dont j’ignore tout et qui est pourtant la mienne. Arpenter des quartiers de fabriques familiales abandonnées, imprimer mon ombre sur de vieilles enseignes peintes à même les murs d’anciens troquets où ont fini d’échouer mille destins détruits par le travail d’usine, traverser au crépuscule un parc au kiosque à musique silencieux, longer un vieux boulevard sacrifié au stationnement, marcher, toujours marcher sans même courir car cela relèverait du plus inutile affolement.

Mon instinct me le dicte, le rythme rapide mais surtout régulier de mon pas peut me soustraire à la diabolique emprise à laquelle je tente d’échapper, cette force qui m’empoigne et qui, de jour comme de nuit, m’enlève ou me pose où elle veut sans que je comprenne pourquoi. Mais le plus effrayant ne réside pas dans l’ignorance où je me trouve de mon propre destin. Qui a jamais su ce qui l’attendait ? Toute l’horreur de ma condition se construit dans la toile d’araignée qui se tisse autour de moi sous la forme d’informations qui me concernent mais dont j’ignore jusqu’à la plus anecdotique. Voilà pourquoi je n’ai pas trouvé d’autre solution que ces absurdes pérégrinations pour essayer de me soustraire à cette menace que je ne peux même pas nommer.

Qui est contre moi ? Qui est dans mon camp ? Je ne saurais le dire. Malgré le caractère méfiant dont m’a doté mon créateur, je suis dans une telle impasse que je dois accepter sans réserve toute aide qu’on pourrait m’apporter. 

Que dois-je attendre de ce rendez-vous au café du chemin de fer ? En effleurant la vitrine déjà poussiéreuse d’une agence de voyage en faillite, j’ai sursauté quand l’éclairage public s’est déclenché. Mon reflet m’est apparu, presque sans contours, moins net que l’ombre massive de mon lourd manteau d’hiver. Dans la poche, ma main ne se décrispe pas autour de la crosse de ce malheureux 6,35 qui peut toujours m’être utile à bout portant, tout à l’heure au café, assis en face de cet homme, un dénommé Preben Mhorn. Je ne sais pas à quoi il ressemble et aucun signe de reconnaissance n’a été prévu. Je n’ai qu’à entrer par la porte vitrée et m’asseoir, et peut-être me jeter dans les mâchoires du piège. De toute façon, je dois m’en remettre à lui.

Me voilà devant un vin chaud. Cette fois, les miroirs du café me renvoient l’image de mon visage. Dehors, le halo d’une enseigne ébréchée me révèle une bruine qui a déjà détrempé les rares autos garées en ces parages. L’horloge de la gare s’allume, blafarde comme une lune de papier mâché. Un homme engoncé dans un caban s’est assis à ma table. Il fume un cigare puant. Je fixe son regard avec terreur, le doigt sur la détente dans la poche de mon manteau. Il se présente: « Mhorn. Voici les papiers. » De mon autre main, je prends l’enveloppe d’où surgira ma nouvelle identité. Cet homme est là pour m’aider mais comment m’a-t-il identifié ?

Rien à faire, je suis toujours sous l’emprise, le cauchemar continue. Mhorn se lève brusquement. Sous la table, d’une impulsion de mon bras, le canon du 6,35 suit aussitôt son mouvement. Le vin chaud se répand autour du verre brisé. « Pas la peine de s’énerver. L’autorail part dans cinq minutes. Il y a un billet dans l’enveloppe, avec le reste. Ne traînez pas et n’oubliez pas de composter.»

L’autorail gronde dans le crachin, sous les lueurs vert-de-grisées du quai. Une fois blotti derrière la vitre grasse au milieu des sièges vides, je pourrai découvrir mon nouveau nom dans l’enveloppe. J’ai tant rêvé à cet instant sans y croire, à cette nouvelle naissance... Le composteur claque sur mon billet. Bientôt un coup de sifflet sur le quai et puis, peut-être, la chance d’un nouveau départ vers de vierges horizons... 

Mais dans cette ville étroite, un seul nuage suffit à ramener la nuit.  Des ombres se mêlent autour du marchepied de l’autorail. Dans quelques secondes, la rame qui assure la correspondance viendra s’immobiliser juste à côté, le temps d’un échange de voyageurs. La voici, dans ses grincements de ferraille, déserte à cette heure tardive. Mais non. Cet homme en imperméable qui en descend, l’oeil fouineur et menaçant... Son parapluie noir s’ouvre d’un claquement mat sur sa tête et je vois la puissance maléfique de son regard dans le mien.

C’est lui, encore lui dans la nuit, dans mes ténèbres éternelles, dans mon enfer d’incertitudes sans fin, lui, l’ordure, le pervers, le maître démoniaque de ma vie, l’auteur.

 

16 novembre 2013

L'autre Salon 2013

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L'Autre Salon se tient à Grigny (Rhône) les 16 et 17 novembre 2013. Je serai présent ce dimanche 17 novembre sur le stand des éditions Le Pont du Change où je signerai mes livres Tu écris toujours ? (Chroniques humoristiques) et Dragon, ange et pou (nouvelles burlesques et fantastiques) publiés chez cet éditeur.

 

Tous renseignements sur L'Autre Salon.