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05 décembre 2019

Carnet / Une leçon de Venise

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Venise est bien sûr la ville de ce que j’appelle des moments à poèmes, ces étranges épiphanies somme toute assez rares dans une vie et qui surviennent aussi dans les endroits les plus inattendus. L’une d’elles a saisi le jeune homme flottant dans un imperméable gris à la mode des années 80 que j’étais ce soir-là dans un arrêt de vaporetto.

À l’intérieur de ces petites stations flottantes reliées au quai par une passerelle, règne à cette heure tardive une atmosphère d’atelier où l’on a oublié d’éteindre les néons.

C’est pourtant bien à l’éclairage jaunâtre des ateliers d’usine de ma bourgade d’origine, Oyonnax, que je pensais malgré moi avant d’entendre le moteur du vaporetto et le clapot sur sa coque.

Je ne sais pas précisément pourquoi cette pensée m’a rempli d’une joie aussi intense dans cet abri bercé par l’onde du canal et dont les vitres exposées aux embruns me renvoyaient le pâle reflet d’un jeune touriste insignifiant qui se prenait pour un roi du monde au seul prétexte qu’il était à Venise au lieu de croupir dans son lycée vétuste puis dans les locaux blafards de l’industrie où risquaient de déboucher des études trop tôt interrompues.

Je suis au moins certain qu’en ce qui me concerne, mon obsession de Venise n’est pas pour rien dans la chance qui m’a permis d’éviter ce funeste destin. Il ne s’agissait pourtant que de monter dans le dernier vaporetto du soir, celui qui, cependant, ne risque pas de vous emmener là où vous ne voulez pas aller.

 

Extrait de Carnet vénitien © Club et éditions Orage-Lagune-Express 2014.

Photo : Venise, années 80, en attendant le dernier vaporetto du soir. (photo M.)

 

25 juillet 2016

Retour de Lisbonne. Parce qu'il faut bien rentrer !

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28 mai 2016

La manif et l'apéro

En voyant ces dernières semaines toutes ces manifestations qui dégénèrent en France, je ne peux m’empêcher de penser avec nostalgie à un épisode auquel j’ai assisté lors d’un voyage en Sardaigne.

Une manifestation à Porto Torrès (Sardaigne)

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Sur le ferry avant l'arrivée à Porto Torrès (Photo Ch. Cottet-Emard)

Au moment de quitter la Sardaigne pour retourner sur le continent, j'appris qu'une avarie survenue sur le bateau assurant la liaison Porto Torrès-Marseille me contraignait d'embarquer sur un autre ferry. Le départ n'étant fixé qu'assez tard dans l'après-midi, il ne me restait plus qu'à errer, par cette lumineuse matinée portuaire, dans les petites rues écrasées de chaleur de cette ville inconnue.

Entre les immenses quais d'embarquement et le petit centre historique qui faisait oublier la présence du plus déraisonnable complexe pétrochimique qu'il m'ait été donné de voir, s'étendait en pente douce un quartier tout entier dévolu au commerce de l'inutile. Cartes postales décolorées au grand soleil, bibelots en coquillages au design tout droit sorti d'intelligences extra-terrestres, colifichets et bijoux biodégradables par la simple action de la sueur sans oublier les épuisettes écologiques car spécialement conçues pour que leurs acquéreurs n'aient aucune chance de capturer le plus distrait des poissons, tout ce joyeux bric-à-brac débordait sur des trottoirs lustrés par des générations de piétons ralentis par la chaleur.

Je me mêlai facilement à ces paisibles flâneurs lorsqu'un ballet de carabiniers attira mon attention. Déployés en nombre, ils encadraient solidement un cortège de manifestants qui descendaient le corso, drapeaux rouges au vent (en l'occurrence une gentille brise marine) en direction du port. Scandant leurs slogans et arborant leurs banderoles, ils n'avaient pas l'air de rigoler et les carabiniers non plus. À bonne distance, j'assistai au défilé avec d'autant plus d'inquiétude que l'idée d'un blocage du port s'imposa très vite à mon esprit. Il me semblait en outre que la tension montait, tant dans les rangs des carabiniers que dans ceux des manifestants. Mais cette impression n'était peut-être due qu'à ma propre crainte de me retrouver coincé dans cette ville sans attrait majeur, dans l'attente angoissée d'un départ déjà compromis.

Onze heures. Un café et quelques panini m'aideraient à y voir plus clair. J'entrai dans un de ces établissements dont les italiens ont le secret et qui sont à la fois des bistrots, des salons de thé et des boulangeries-pâtisseries-confiseries. Je m'installai à l'étage, à une table avec vue sur le port afin de continuer à suivre le déroulement de la manifestation. Celle-ci ne suscitait parmi les clients et consommateurs attablés ou accoudés au comptoir que quelques coups d'œil distraits. A l'abri derrière mes panini, je vis le cortège s'immobiliser vers des hangars. Quelques slogans fusèrent encore d'un haut-parleur puis la manifestation se dispersa.

C'est alors que je pus réaliser combien mon inquiétude était vaine. En effet, un spectacle savoureux et réconfortant se déroulait maintenant sous mes yeux, plus exactement au comptoir où, banderoles repliées pour les uns et casquettes à la main pour les autres, manifestants et carabiniers se retrouvaient cette fois tous unis par la même idée : prendre l'apéritif !

Extrait de mon carnet de voyage en Sardaigne. © Éditions Orage-Lagune-Express. Droits réservés.