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06 février 2008

Missiano

2218965123f35bebfbb4b96d9cf4b39c.jpegJean-Louis Jacquier-Roux
Missiano
éditions Les Carnets du Dessert de Lune, 67 rue de Venise
B - 1050 Bruxelles.
2003, 40 p
Prix : 10 euros

(À la lecture de la présentation dans le magazine Le Matricule des anges (n°90, février 2008) des éditions Les Carnets du dessert de lune et de l’entretien fort intéressant avec leur créateur, Jean-Louis Massot, l’idée me vient de mettre en ligne la note de lecture que j’avais publiée à propos du recueil Missiano de Jean-Louis Jacquier-Roux, édité à cette enseigne.)

Jean-Louis Jacquier-Roux et l'Italie, c'est une alchimie. Les vacances y prennent la dimension d'un de ces modestes rituels qui font brusquement accéder à l'enchantement, comme l'ombreuse ruelle d'un village peut tout à coup projeter le passant au seuil d'un monde vertigineux.
Car cette Italie rurale résiste à la carte postale et à la photo souvenir. On y arrive tôt. On franchit la grille. On pousse le portillon. On touche des pierres. On rôde et on scrute. L'auteur de ces pages prête ses clefs au lecteur. Celui-ci se retrouve au milieu de paysages suggérés par les crayons de Monique Delorme qui, nous dit-on, dessine pour le plaisir, quand elle a le temps et surtout en Ombrie.
Le dessin, la peinture, comment ne pas y songer en lisant Jean-Louis Jacquier-Roux, beaucoup plus, d'ailleurs, par le jeu des lignes et des perspectives que par le déploiement d'amples fresques. Certes, les géométries de l'ombre et de la lumière livrent-elles ici leur ballet comme dans tout paysage mais un ton en dessous, car ces contrées sont propices aux attentifs.

Extrait :

Madone toujours pimpante

montrant du doigt

la route au pèlerin

impatient petite

flamme invisible

du miracle de chaque jour.

(Oratoire sur le chemin de Tavernelle).

04 février 2008

Le congé du buveur

L'étoffe à loisir s'use au fil du vent entre le mur et l'arbre

Le chapeau de paille s'ouvre au soleil

Le café entrebâille la chambre

abf4fbd8bd228f5fd456067e1571b022.jpgLa table se dresse dans le ciel

Le jardin se risque au pied du mur

La nuit vingt-cinq watts descendent en même temps que l'araignée du plafond sur un journal d'avant-hier

Très loin la vigne vierge empoigne une usine


Extrait de : Interludes narratifs, in Le Pétrin de la foudre, éditions Orage-Lagune-Express, 1992.
Gravure de Jacki Maréchal (2008) pour cet extrait en ligne.

29 janvier 2008

Crépuscule décisif dans l’année 75

Tu étais sorti sous d’épais nuages mauves et gris un merle avait traversé devant toi sans juger utile de s’envoler

Ces nuages sentaient la forêt et ce merle comme il était réel !7ca6cbcc75911f8c25c33c3be845cf19.jpeg

Tu avais entendu de la mauvaise musique dans une salle enfumée où l’on jouait du théâtre amateur et où les collégiens avaient gym dans la poussière

4f8cfa40de25388fa41d88448f7389b7.jpegEn mémoire de Jules Laforgue « Je fume au nez des dieux de fines cigarettes » tu en avais grillé une sous un réverbère du très désert parc Nicod (à une lettre près cela ne s’invente pas) il avait commencé à pleuvoir

Tu étais rentré tard après avoir marché d’un invincible pas dans les rues trempées et après Brahms pour te laver la tête tu avais dormi du majestueux sommeil de l’adolescence parfaitement

Parfaitement indifférent aux ondes du choc pétrolier et au prix du baril comblé de cette pluie et de cette nuit qui t’aimaient et qui sentaient bon comme des copines


© Éditions Orage-Lagune-Express 2008.