12 février 2017
Dans la presse / En liaison directe avec mon post précédent :
03:26 Publié dans NOUVELLES DU FRONT | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pascal bruckner, presse, idées, opinions, politiquement correct, huffington post, blog littéraire de christian cottet-emard, culture
01 décembre 2016
Quand les rêvent volent bas
S’il est un mot que j’ai plus de peine à voir galvaudé que d’autres par les illusionnistes de la communication institutionnelle ou d’entreprise, c’est bien le mot rêve auquel ma nature sentimentale n’attache pas de prix. Or en ce monde où tout est marchandise, le rêve n’échappe plus à l’étiquetage du produit de consommation qu’il est depuis longtemps devenu.
À Oyonnax, par exemple, les étiquettes du produit rêve ont pris la forme de fanions qui flottent au vent au bord des bretelles d’accès à l’autoroute. Il est écrit sur ces chiffons disposés à l’entrée d’une bourgade précisément peu propice aux rêveurs qu’il faut rêver + haut, rêver + fort, rêver + beau, rêver + loin. Cette façon de rêver vendue par la pub et la com m’évoque les rêves français de grande cuisine : moins on a les moyens de se la payer, plus on en cause.
On aurait presque pu croire à une petite poussée de fièvre poétique de la part des prestidigitateurs de la com qui nous ont sorti ces pochettes-surprises de leurs chapeaux s’ils n’avaient pas inséré dans la mièvrerie calculée de leur slogan le signe + en remplacement de l’adverbe écrit en toutes lettres, rappelant ainsi probablement à leur insu qu’à Oyonnax comme ailleurs, les affaires sont les affaires.
Si la poésie du rêve est ici conviée, c’est tout au mieux dans une défroque de représentante de commerce.
Ne rêvons donc pas trop, surtout au cas où cette invitation à rêver + nous amènerait par une association d’idée naturelle à considérer le contenu de la saison de spectacles oyonnaxienne.
Encore une fois, le rêve se fait ici bien pâle, notamment là où il devrait reprendre des couleurs, ce qui hélas n’étonne guère dans un contexte culturel où l’on frisa cette année en début de saison des pratiques de république bananière.
Dans ce morne et chétif alignement de productions interchangeables et démagogiques (qui commença par un curieux mélange des genres avec deux spectacles d’une formation dont le responsable est aussi partie prenante dans l’élaboration de la saison, ce qui n’a semble-t-il choqué personne) je ne vois que deux concerts classiques.
Même en se résignant à l’argument selon lequel une telle sous-représentation du genre suffirait à une bourgade comme Oyonnax, comment ne pas se désespérer de constater que le choix se soit porté non pas sur un simple concert mais sur une soirée de vulgarisation ? Et encore s’agit-il ici du plus mauvais vulgarisateur dans le domaine de la musique dite savante, Jean-François Zygel, le Drucker du classique, l’animateur un peu pianiste de boîte à musique affichant ce sourire télévisuel plus communément appelé rictus qui se croit obligé de présenter le répertoire classique en s’adressant à ses auditeurs comme à des demeurés.
Finalement, le petit étendard arborant le message le plus fiable imprimé par les services de la communication oyonnaxienne est en effet celui qui invite à rêver + loin, un excellent conseil !
01:49 Publié dans NOUVELLES DU FRONT | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : culture, saison culturelle d'oyonnax, spectacle, nouvelles du front, humeur, opinion, billet d'humeur, oyonnax, centre culturel aragon d'oyonnax, blog littéraire de christian cottet-emard, jean-françois zygel, vulgarisation, classique, musique classique, communication, publicité, langue de bois, démagogie, consensus mou, médiocrité, rêve, rêve galvaudé, mot vidé de sons sens, france, ain, haut bugey, rhône-alpes auvergne
25 août 2016
Michel Butor (1926-2016)
Sur mon imprévisible sentier littéraire, j’interprète encore aujourd’hui ma rencontre avec Michel Butor comme un encouragement, un signe de piste serais-je tenté d’écrire, en parallèle avec le jeu hasardeux (?) de publications où j’eus la chance de voisiner avec lui. Ce fut d’abord dans le livre Léman expressions sans rivages (éditions de la Manufacture) puis dans l’anthologie Entrée de secours, d’un siècle à l’autre, 53 poètes (éditions La Fontaine de Siloé).
En ce printemps 1993, je n’avais conservé de mes activités de presse qu’une collaboration pour la revue Le Croquant et la visite de l’écrivain au centre culturel Aragon d’Oyonnax m’offrit l’occasion d’un entretien. J’en sortis tout ragaillardi par l’immense et sereine érudition de cet homme attentif et chaleureux après un de ces hivers qui vous grignotent le moral d’un sévère aquoibonisme, la maladie des provinces enclavées.
Quant à mes craintes de tomber sur un froid théoricien du Nouveau Roman, elles s’étaient déjà dissipées depuis que j’avais découvert que le Nouveau Roman ne fut jamais une école et encore moins une théorie. La lecture de La Modification, à la fin de mon adolescence, puis, bien plus tard d’un étrange livre-objet intitulé Cinq rouleaux de printemps (Arches éditions) vint me confirmer qu’avec Michel Butor, on n’était jamais en panne de surprises.
Ce mot, surprise, ne vient d’ailleurs pas sur mon clavier par hasard tant ces fameux rouleaux de printemps en revêtent l’aspect dans leur emballage de carton et de papier. L’ouvrage se présente sous la forme d’une grande boîte dans laquelle viennent s’aligner, comme des cigares, cinq feuilles enroulées. Le texte manuscrit est imprimé en bleu, vert, marron, noir et rouge, soit une couleur par rouleau. Je tiens aussi à souligner sans chauvinisme que cette surprise d’édition poétique fut conçue et imprimée à Oyonnax en 1984 sur une initiative on ne peut plus privée de Georges Béjean ancien censeur (on disait ainsi à l’époque) du lycée Paul Painlevé. En opportuniste éhonté, je ne me privai pas de demander à Michel Butor d’inscrire une dédicace dans la boîte, en souvenir de cet inespéré 19 mars 1993 !
Les livres de Michel Butor se prêtent mal aux notes de lecture, aux comptes-rendus, aux critiques, car tout s’y organise selon une logique qui échappe aux cadres habituels du récit, de la narration, de la description. De prime abord, s’impose à travers les multiples publications de l’auteur de L’Emploi du temps une image de morcellement. Mais il suffit de lire ou d’écouter parler Michel Butor pour constater que cette apparente dispersion n’est que l’écho ou le reflet des vieux verrous qui sautent entre les cellules des différentes disciplines et pratiques artistiques.
Michel Butor est véritablement de ces écrivains qui joignent le geste à la parole : on ne compte plus ses collaborations avec les peintres et plasticiens (Marc Pessin, Gregory Masurovsky...), avec les compositeurs (Henri Pousseur), voire avec les éditeurs eux-mêmes lorsqu’ils œuvrent dans la fabrication d’autres objets de lecture que le livre (coffrets, emboîtages, mobiles, rouleaux...).
Cette désorientation que peut éprouver le lecteur désireux d’entrer dans l’oeuvre de Michel Butor cède vite la place, pour peu qu’il veuille bien accepter quelques changements dans ses habitudes de lecture, à l’approche vers une quête d’unité de savoir. Transit A -Transit B qui s’inscrit dans la série Le Génie du lieu (éditions Gallimard), fondamentalement livre de voyage souligne l’auteur, livre que l’on peut manipuler, faire tourner, dans lequel on peut véritablement se promener, en est un bon exemple.
Notes :
- Mon dossier consacré à Michel Butor (avec photo, entretien et extraits de Cinq rouleaux de printemps) a été publié dans la revue Le Croquant n°15 (printemps -
été 1994).
- Poèmes de Michel Butor dans la revue Salmigondis n°9 (452, route d'Attignat, 01310 Polliat).
Photos :
- Michel Butor en dédicace au centre culturel Aragon d'Oyonnax en 1993 (photo Ch. Cottet-Emard).
- Cinq rouleaux de printemps éditions Arches, Oyonnax.
- Michel Butor au centre culturel Aragon d'Oyonnax en 1993 en compagnie des artistes Marc Pessin (à gauche de la photo) et Gregory Masurovsky (photo Ch. Cottet-Emard)
10:28 Publié dans Hommages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michel butor, christian cottet-emard, gregory masurovsky, marc pessin, blog littéraire de christian cottet-emard, hommage, témoignage, rencontre, centre culturel aragon d'oyonnax, ain, rhône-alpes auvergne, bugey, culture, oyonnax, france, la modification, nouveau roman, cinq rouleaux de printemps, transit a transit b, le génie du lieu, l'emploi du temps, entrée de secours d'un siècle à l'autre, léman expressions sans rivages, georges béjean, lycée paul painlevé d'oyonnax, arches éditions, revue le croquant, le croquant n°15, salle gustave miklos