Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

12 mai 2019

Interlude musical

Claude Nougaro : Prisonnier des nuages.

 

25 avril 2019

Jean-Jacques Nuel, Une saison avec Dieu, éditions Le Pont du Change, 2019. 130 p. 14 €.

Une formidable évocation de l'univers citadin des années 70 à travers le prisme d'un étudiant en lettres qui voit arriver dans son humble et précaire logement le plus improbable des colocataires.

jean-jacques nuel,une saison avec dieu,éditions le pont du change,humour,spiritualité,dieu,lyon,hôtel-dieu,colocation,études de lettres,étudiant,université,faculté de lettres modernes,années 70,lyon rue de l'épée,souvenirs lyonnais,blog l'annexe,journal d'un mégalo,éditions cactus inébranlable,aphorismes,littérature,récit,blog littéraire de christian cottet-emard,lectures,notes de lecture

Lyon, hiver 1973, trois mois à priori peu propices aux miracles pour un étudiant en lettres évoluant entre la faculté, sa piaule rue de l’Épée, les cinémas sans confort et les cafés embrumés au tabac brun.

C’est au dernier étage de l’immeuble que se présente sur le palier un colocataire certes humble d’apparence mais bienvenu pour le partage du loyer. Débute une harmonieuse cohabitation. Ce serait bien le minimum car, je vous le donne en mille, ce colocataire c’est... Oui, c’est bien Lui ! Et n’allons pas dire que le narrateur a fumé la moquette car on n’en trouve pas souvent dans une cambuse d’étudiant en 1973.     

Qui est Dieu ? Personne ne peut le savoir, donc pas la peine de se poser la question estiment les agnostiques. Mais l’auteur n’entre pas dans ces considérations, il écrit cette drôle d’histoire sur un registre bien plus surprenant. Où l’on aurait pu s’attendre à un énième Dieu existe, je l’ai rencontré, un écrivain tel que Jean-Jacques Nuel ne pouvait que frapper beaucoup plus fort : Dieu existe, j’ai été son colocataire ! Un sens de la formule qu’on retrouve évidemment concentré dans son recueil d’aphorismes Journal d’un mégalo paru aux éditions Cactus inébranlable.

Aucune trace de mégalomanie dans Une saison avec Dieu. Dosant subtilement un humour léger, une touche d’autobiographie et une spiritualité plus profonde qu’il n’y paraît, Jean-Jacques Nuel préfère évoquer non pas la nature du divin mais sa manière de se manifester avec indulgence, bienveillance et, il faut bien le dire, un certain détachement contemplatif dans le quotidien pâlot ou tourmenté d’un humain comme vous et moi. 

Et le narrateur de constater à propos de son colocataire en principe Tout Puissant mais surtout amical et toujours prompt à rendre service : Je pouvais compter sur Dieu. Franchement, si tout le monde était comme lui, la vie sur terre deviendrait un vrai paradis. (!)   

Ne fuyez pas, lecteurs et lectrices rétifs à la dévotion ! Ce n’est pas du tout le sujet de ce récit parfois mélancolique, parfois ironique et cinglant, souvent poétique, mais où chaque mot est toujours pesé, notamment lorsqu’il s’agit de décocher quelques belles flèches à l’enseignement des lettres à l’université sous l’emprise des théories à la mode de l’époque.   

Lu sur manuscrit et relu dès sa parution, Une saison avec Dieu est à mon avis le meilleur récit paru cette année. Un vrai tour de force d’équilibriste consistant à faire tenir debout une histoire énorme avec une économie de moyens qui est la marque de fabrique de Jean-Jacques Nuel à propos de qui je ne peux résister au plaisir de préciser qu'il est né à l'Hôtel-Dieu !

Ce livre est aussi une pépite pour les lyonnais qui aiment leur ville et pour ceux qui l'ont connue à l’aube de ses grandes transformations pour le meilleur et pour le pire car on y lit en filigrane une méditation poétique sur le temps : Entre le présent et le passé s’intercale une sorte de vitre trouble et couverte de poussière.

Et Dieu dans tout ça ? Serge Gainsbourg le chantait en fumeur de havanes, Jean-Jacques Nuel l'évoque en fumeur de Gitanes. Pour vous faire votre idée, lisez Une saison avec Dieu !

 

08 décembre 2017

Carnet / Mégalo nécro

johnny hallyday,carnet,note,journal,nécrologie,presse,blog littéraire de christian cottet-emard,variétoche à deux balles,chanson,variété,bruit,boucan,vociférations,humeur,information,hiérarchie de l'information,hiérarchie dans les arts,jean-pierre le goffUn chanteur de variété à succès est mort. Je n'ai rien à en dire car il ne représentait rien pour moi sur le plan musical, artistique.

Je m’interroge en revanche sur le sens des cataractes de nécrologies échappant à toute mesure qui s’abattent sur la presse écrite et audiovisuelle.

En achetant le Figaro de jeudi pour son supplément littéraire, j’aurais dû me méfier. Chaque fois que ce qui est considéré comme un événement d’ampleur se produit, c’est toujours le supplément littéraire qui dégage, remplacé cette fois par un cahier entier consacré au défunt.

Seul le supplément économique du journal était vierge de toute allusion au chanteur alors que cette rubrique était à mon avis la plus appropriée pour recevoir l’hommage à l’homme au cent dix millions de disques vendus.

Dans cette édition du Figaro, même la Une avait disparu au seul profit d’un portrait de scène accompagné d’un éditorial évoquant un trésor national. Dans d’autres médias, on parle de la disparition d’un monument national. La tour Eiffel se serait-elle effondrée ? Le Louvre aurait-il sombré dans un cratère ? Notre Dame de Paris se serait-elle envolée vers des cieux plus cléments ? Non, un chanteur de variété est mort.

Cette hallucinante surenchère larmoyante, ce matraquage et ce renoncement définitif à toute hiérarchie de l’information sont des signes, ainsi que l’écrit Roland Thévenet sur son blog, que le pays va mal, très mal.

Pour m’informer de l’actualité de la France et du monde dans un journal que je paye pour cela, il m’a fallu feuilleter jusqu’à la page 8, les précédentes étant exclusivement remplies par la logorrhée nécrologique, sauf la page 6 contenant l'analyse pertinente de Jean-Pierre Le Goff.

À la télévision, le pire n’est pas que les rentiers de l’émotion viennent rouler leurs larmes, notamment les vieux crocodiles du show-biz, mais que les journalistes présentateurs décrètent le chagrin automatique pour l’ensemble de la population. Et chacun, y compris le politique toujours angoissé de se louper, de pousser sa petite variation : On a tous en nous quelque chose de Johnny Hallyday (Macron), Nous avons tous un souvenir lié à une de ses chansons, j’en passe et pas des meilleures.

Ce nous qu’ils emploient d’autorité me déplaît car pour ma part, je n’ai absolument rien en moi de Johnny Hallyday, je n’ai et ne voudrais pas du tout avoir un seul souvenir lié à une de ses chansons dont je ne connais d’ailleurs que des bribes qui me sonnent aux oreilles contre mon gré depuis cinquante-huit ans et que j’aurais peut-être le malheur d’entendre encore le jour où je serai trop vieux pour couper moi-même le son d’une sono, d’une radio ou d’une télé.

Si je devais me trouver un jour funeste dans cette situation, je prie Dieu qu’une âme charitable vienne me coiffer d’un casque avec une œuvre classique suffisamment puissante pour couvrir la voix et le son de l’idole des vieux de ma génération.