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06 août 2017

Carnet / Cachez ce travail que je ne saurais voir !

Moi qui n’aime pas le travail, je choisis les jours les plus endormis des vacances pour passer à la rédaction du roman qui va succéder à la récente parution de mon recueil de nouvelles, Mariage d’automne. Mais non, je ne choisis pas.

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Photo © Christian Cottet-Emard, Bergerac, juillet 2017

Quand un roman s’installe dans ma tête, il commence par se signaler par quelques fragments qui passent dans l’esprit comme les petits nuages rapides d’un ciel calme. Il m’arrive parfois de noter puis d’écrire ces bouts de textes épars qui peuvent même constituer des nouvelles inabouties, impossibles à intégrer à un ensemble parce qu’elles ne le veulent absolument pas, comme si elles portaient en elles, malgré toute volonté de ma part, la conviction qu’elles sont destinées à autre chose.

Vient ensuite la période de rêverie, souvent très longue, des mois, des années, un laps de temps indéfini pendant lequel je sens bien que quelque chose cherche à s’organiser sans que je puisse décider d’une planification ou d’une accélération. J’ai longtemps cru que cette période était stérile ou qu’elle relevait de la simple procrastination, ce qui était une erreur de débutant.

Arrive alors une autre phase, celle des moments de plus en plus nombreux où les personnages sortent des brumes et se signalent à la faveur de n’importe quel épisode de la vie quotidienne. Je peux considérer que je me mets à passer du temps avec ces êtres qui prennent corps si je puis dire.

La suite se traduit bientôt par une accélération intense, comme un puzzle devenu fou qui se mettrait à réunir tout seul ses pièces, ce qui donne un sentiment fiévreux porteur d’insomnie et d’impatience.

Une fois que le puzzle est presque complet, il ne me reste qu’à rédiger comme si je racontais un film vu la veille. C’est là qu’intervient ce maudit travail : il faut s’employer avec ardeur et rigueur à ce que le travail soit le moins visible possible. Je réussis la nouvelle ou le roman si moi-même ou le lecteur, une fois que le texte est publié, avons l’impression qu’il a été écrit sans effort par un type négligent et paresseux.

 

01 août 2017

Carnet / Des librairies : point de vue d’un auteur lecteur client

Je ne fais guère la fortune des libraires car j’achète principalement des livres de poche. J’ai gardé cette habitude de quelques lointaines époques impécunieuses et aujourd’hui encore, je répugne par réflexe à payer vingt euros un ouvrage que je retrouverai en édition de poche quelques mois après sa parution, surtout s’il s’agit d’une nouveauté que je me risque à découvrir.

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Souvent, je juge les couvertures des éditions de poche plus attractives que celles des éditions d’origine. Dans ma pratique d’auteur (je préfère employer ce terme à mon propos plutôt que celui d’écrivain car un auteur ne peut à mon avis se prévaloir lui-même du titre d’écrivain) les collections de poche me font plus rêver que la pléiade !

Bon nombre des livres que je possède en éditions brochées mais aussi en éditions de poche proviennent du marché de l’occasion (libraires d’anciens, soldeurs) et de vente par correspondance (Fnac, Amazon).

Même si j’apprécie de m’approvisionner parfois en librairie (une belle librairie avec beaucoup de stock est toujours un plaisir), je dois dire que dans mon parcours d’auteur publié par de petites maisons d’édition, je n’ai guère trouvé de soutien de la part des libraires quand ce n’était pas du mépris voire de l'hostilité franche ou sournoise, excepté dans quelques maisons de presse.

Ces expériences négatives en tant qu’auteur auprès des libraires m’ont ennuyé tant que la distribution de mes œuvres dépendait exclusivement de leur circuit, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui grâce à internet et en particulier à Amazon.

Je suis bien conscient des difficultés que rencontrent les libraires dans leur pratique commerciale (j’ai d’ailleurs suivi jadis une petite formation d’un an à ce métier, cursus associé à des stages en magasin) mais le monde marchand étant ce qu’il a toujours été, une belle foire d’empoigne, je n’ai ni les moyens ni la volonté d’être un auteur et lecteur militant de la défense du petit commerce tout comme le petit commerce n’a ni la capacité ni la vocation à militer pour la survie des éditeurs indépendants et des auteurs confidentiels.

Actuellement, lorsque quelqu’un me fait l’amabilité d’ouvrir un de mes livres, c’est qu’il se l’est procuré en ligne, notamment sur Amazon, directement auprès de l’éditeur, sur le marché de l’occasion, lors de quelques salons du livre auxquels il m’arrive rarement de participer ou en lecture publique quand les bibliothécaires veulent bien accueillir mes ouvrages dans leurs collections.

Je n’ai ni à me plaindre ni à me réjouir de ce constat simplement significatif, y compris à mon minuscule niveau, des récentes évolutions du commerce de détail des livres et autres biens culturels.

L’avenir des librairies me paraît assez sombre. Les petites qui n’apportent pas un service client spécifique et efficace pour compenser le handicap bien compréhensible de stocks restreints sont vouées à disparaître. Les autres enseignes à peu près indépendantes et de plus grande envergure s’adaptent tant bien que mal aux récentes et rapides évolutions du marché du livre mais parfois au prix d’une standardisation de leur offre.

À elles de ne pas oublier que pour le client, s’approvisionner en livres, notamment en livres à faibles tirages ou en éditions anciennes (je ne parle pas ici de la bibliophilie qui constitue un marché à part) n’est pas près d’être un problème grâce à internet. Dans cet environnement commercial difficile pour elles, il leur appartient de prouver qu’entrer dans une librairie avec l’agrément de trouver des nouveautés mais aussi avec l’espoir de dénicher le mouton à cinq pattes (*), fût-il couvert de poussière, est un plaisir encore supérieur à celui d’être rivé à un écran pour faire venir un livre ou un disque de l’autre bout du monde en payant un centime de port.

 

(*) J’appelle mouton à cinq pattes un livre qui ne peut être tracé aussi efficacement qu’une nouveauté : non référencé sur les bases de données habituelles, dépourvu de code barre, n’ayant pas fait l’objet d’un dépôt légal en raison de son faible tirage, auto-édité ou édité à compte d’auteur, épuisé ou publié par un micro-éditeur ou encore publié par un éditeur qui a disparu. Un mouton à cinq pattes peut être aussi tout simplement un livre à rotation lente... Hélas.

Photo : détail d'une fresque murale à Arbent (Ain).