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22 novembre 2018

Scandale Mehdi Meklat : « C’est pas moi, c’est mon double maléfique ! »

scandale,mehdi meklat,télérama,inrockuptibles,arte,grande librairie,gauche caviar,blog littéraire de christian cottet-emardComme prévu, selon un plan média bien orchestré qui ne doit duper personne, Meklat revient sur les plateaux de télévision avec un livre et en se posant une fois de plus en victime. Je remets donc en ligne ce que j'avais écrit ici-même à propos de ce manipulateur. Entre temps, mon article a été publié cet été par la revue Instinct nomade dans le numéro consacré à Georges Brassens.

Rappel des faits : 

En février 2017, alors qu'il venait de publier Minute (Seuil) avec son acolyte de toujours, Badroudine Saïd Abdallah, des internautes ont révélé que Mehdi Meklat avait posté entre 2010 et 2015 de très nombreux tweets antisémites, racistes et homophobes sous le nom (volontairement caricaturalement français) de Marcelin Deschamps. Florilège : « Faites entrer Hitler pour tuer les juifs », « Ben Laden me manque », « Les Blancs, vous devez mourir asap », etc. Un peu plus d’un an après l'affaire de ses tweets haineux, Mehdi Meklat va publier cet automne un livre chez Grasset dans lequel il s'expliquera sur cette polémique qui avait fait grand bruit. Un scandale qui avait terni l'image de ce journaliste de 26 ans venu de banlieue, chouchou des médias (il a été chroniqueur sur France Inter et a réalisé des vidéos pour Arte) et de la gauche progressiste (cf. Christiane Taubira avec laquelle il posa en couverture des Inrockuptibles.)

Meklat : un syndrome 

Si je reviens sur le scandale Meklat, ce n’est pas par intérêt pour sa personnalité négligeable et pour ce produit fabriqué par la gauche culturelle. C'est aussi parce que comme tous les individus de cette espèce, lui et ses clones posent le problème suivant  : ou l'on se dit qu'il ne faut rien dire pour ne pas rentrer dans leur jeu ou l'on estime qu'il faut dénoncer à chaque nouvelle affaire afin d'opposer une résistance nécessaire. La deuxième solution me paraît la moins mauvaise car, comme on dit, qui ne dit rien consent.

La vraie question que pose le scandale des tweets homophobes, antisémites, misogynes, injurieux et faisant l’apologie du terrorisme tenus sous le pseudonyme de Marcelin Deschamps par Mehdi Meklat dépasse largement la personnalité de ce faiseur ridiculement adoubé journaliste, écrivain et chroniqueur par des médias soumis et complaisants. Piteusement, le magazine Télérama qui l’a mis en Une en octobre 2015 est allé jusqu’à publier sur la toile un entretien dans lequel ce manipulateur à double casquette est encore pris avec des pincettes (« Maladroitement et, semble-t-il, sincèrement, il plaide le “double de fiction” » peut-on lire sous la plume de l’auteur de l’entretien). Dur pour un de ces sanctuaires du politiquement correct qu’est Télérama de reconnaître qu’on s’est fait rouler dans la farine ! Et ce n’est pas la première fois ! Mais laissons cette presse à sa fatigue, à ses certitudes, à son vieillissement et à sa déconnexion d’avec le réel d’une époque qu’elle ne comprend plus. 

Reprenons de la hauteur. La question est de comprendre pourquoi et comment une grande partie de l’opinion d’un pays comme la France en vient à se détester elle-même au point d’encenser ceux qui lui crachent leur venin à la figure avec la complicité de médias d’envergure nationale, internationale et d’une prestigieuse fondation privée. Il apparaît clairement depuis des années que l’idéologie mortifère ainsi véhiculée prend les structures et les réseaux culturels en place aux niveaux national, régional et local comme vecteurs privilégiés.

Lorsque des lanceurs d’alertes se montrent vigilants, des affaires du même genre sont portées à la connaissance du grand public mais très souvent, hélas, les petits soldats des entreprises de sape agissant en rebelles subventionnés instillent lentement mais sûrement leur poison en toute impunité. Pour un Meklat démasqué et, espérons-le, définitivement grillé dans les milieux de la culture et des médias, combien d’autres en action ou en embuscade ?

Leur arme : le double langage. Leur logistique : les subventions publiques. Leurs complices : les frustrés, mécontents, déçus, et contempteurs de la culture occidentale. Leurs cibles : les vieux gauchos encore en deuil de leur impossible Grand Soir et les jeunes bobos bavassant à l’enseigne de Nuit Debout et autres auberges espagnoles du mécontentement. Leur défense lorsqu’ils sont confondus : la position victimaire. Meklat excelle dans cette dernière posture dans ses abracadabrantes tentatives de justification.

L’homophobie, l’antisémitisme, la misogynie, l’injure, l’appel à la violence et au terrorisme, ce n’est pas lui, Mehdi Meklat, mais celui qu’il appelle son double maléfique de fiction, Marcelin Deschamps ! Nous noterons au passage que dans le sordide petit théâtre qu’est l’esprit schizophrénique de cet individu, le rôle du méchant est dévolu à un double affublé d’un nom et d’un prénom bien franchouillards ! Quant au gentil abrité par le même corps, on nous dit qu’après la polémique, il est parti loin de la France pour penser, réfléchir. Eh bien qu’il prenne son temps et qu’il médite en particulier sur ce que sait tout véritable écrivain : les écrits restent et parfois, celles et ceux qui les lisent ont de la mémoire...

Pour la presse bien-pensante (Télérama et consorts) ne peuvent exercer cette mémoire en attendant un Meklat au tournant que « ceux qui depuis longtemps ont fait une cible de cet ancien Kid de France Inter et qui se frottent les mains » . Je frémis d’horreur à l’idée de ces mains crochues qui se frottent dans l’ombre ! Il ne reste plus qu'à suggérer que ces mains sont sans doute prolongées par des gros bras de mâles blancs de plus de 45 ans (1) qui ont caché des brassards à croix gammée dans les tiroirs de leurs buffets de salle à manger  !

L’homme que je suis, celui qui a largement dépassé cet âge, qui ne collectionne pas ce genre d’objet et qui ne se frotte pas les mains d’une aussi désolante affaire apprend alors dans cette prose navrée qu’il y a les autres (dont je ne fais pas partie non plus), ceux qu’elle appelle « les sidérés » à qui « Mehdi Meklat devra à l’avenir confirmer qu’il est bien l’auteur sensible au monde et à ses prochains qui transparaît dans son œuvre. » (!) Eh oui, son œuvre, rien que ça ! Est-ce à dire qu’à son retour d’exil, quand il se sera refait une virginité médiatique à la faveur de notre fabuleuse capacité à « passer à autre chose » , Meklat retrouvera un éditeur pour lui payer de nouveau des résidences à Los Angeles ou à Istanbul afin de nous pondre d’autres de ces belles histoires qu’aiment tant la presse bobo et post-soixante-huitarde ? C’est ce qui est sous-entendu.

Des idées ? Non, du business !

Les gens comme moi, nous sommes shootés à l’air pur de nos provinces, nous manquons de nez pour flairer les miasmes. Nous respirons trop haut. Dans ce genre d’affaire, notre erreur est de nous positionner sur le terrain des idées alors que tout se joue beaucoup plus bêtement, sur le terrain du commerce, même pas celui de la gauche culturelle saumon fumé mais bien celui de la gauche culturelle caviar, celle qui vend de la culture industrielle « bancable ». C’est dans ce fatras para-culturel de luxe clinquant pour drugstores branchouilles qu’on trouve ainsi du produit rap, du produit banlieue, du produit rebelle et bien sûr du produit Meklat, du livre d’élevage, du livre calibré et toutes sortes d’« œuvres » préfabriquées puis déversées à grands coups de subventions publiques et de médias en attente de retour sur investissement.

Et hélas, si peu de monde pour se demander un seul instant comment on peut parler d’« œuvre » pour qualifier la morgue et la schizophrénie d’une de ces multiples petites frappes que les héritiers des nouveaux riches et des parvenus de la culture envoient sur les plateaux de télévision, dans les studios radiophoniques et en résidence dans les centres culturels, les médiathèques et les collèges de province pour faire prendre à leurs publics conquis d’avance les vessies de la démagogie, du pur business et du prêt à penser pour les lanternes de la culture avec l’onction financière des Drac et autres usines à gaz d’un système devenu fou.

Mais le plus pathétique, à mon sens, est le silence gêné et assourdissant sur ce genre d’affaire d’un grand nombre d’auteurs que je connais et qui courent après 100 petits euros pour une lecture ou un atelier d’écriture. De quoi ont-ils peur ? D’être grillés dans Télérama (2), Le Monde, les Inrockuptibles, La Grande librairie, France Inter, France Culture ? Et alors ? De toute façon, ces médias les ignoreront toujours, ce qui n’est plus vraiment grave puisque ces organes de presse sont de moins en moins prescripteurs en ce qui concerne les ventes de livres.

Oui, comme tout cela est piteux, si peu « jubilatoire » pour citer l’adjectif préféré de Télérama. Certains me demandent pourquoi je reste abonné. Eh bien, désormais, pour savoir comment pense l’ennemi.

 

(1) Je fais ici allusion à une couverture de Télérama où une jeune cinéaste dont j’ai oublié le nom déclarait « j’en ai assez du cinéma fait par des hommes blancs de plus de 45 ans. ».

(2) La démangeaison du désabonnement m’était aussi venue à la lecture d’un entretien avec Abd al Malik (encore un rappeur slameur) dont les propos à l’encontre de Charlie Hebdo et de la liberté d’expression m’avaient révolté.

Retrouvez cet article en version papier dans la revue Instinct nomade : scandale,mehdi meklat,télérama,inrockuptibles,arte,grande librairie,gauche caviar,blog littéraire de christian cottet-emard 

 

18 novembre 2018

Interlude musical

Kurt Masur (direction) Yuja Wang (piano) Verbier Festival Orchestra
Mendelssohn piano concerto opus 25

 

16 novembre 2018

La postface de mon recueil Poèmes du bois de chauffage

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Les titres de ces quatre suites et de ce grand poème étrangement réunis en un volume témoignent d’une faible confiance en la poésie et, d’ailleurs, en quoi que ce soit. J’en veux pour preuve la notule dans laquelle il prend le contrepied d’André Breton, un poète qu’il admire mais qu’il n’aurait pas forcément aimé rencontrer : Il y a un message au lieu d’un lézard sous chaque pierre (extrait d’Épervier incassable dans Clair de terre). On trouvera donc plus le lézard que le message sous les pierres dans cette poésie qui n’en est pas vraiment une si l’on en croit l’homme décalé, ni campagnard ni citadin, certes disponible aux signes du monde parfois lisibles dans les lignes du bois mais distant vis-à-vis de toute idéalisation de la nature. Ainsi, le narrateur des Poèmes du bois de chauffage n’est-il pas en quête d’une expérience spirituelle de la nature qui constitue pourtant le cadre intime de sa vie quotidienne.
 
Il en va de même dans l’environnement souvent moins rustique et plus urbain de La vie au bord, un ensemble qui devait à l’origine s’intituler Flash code, titre auquel l’auteur a renoncé pour le réserver à une autre série en voie de publication. La ligne narrative de La vie au bord diffère peu de celle des Poèmes du bois de chauffage. Thématique restreinte, expression volontairement relâchée voire revendication d’une certaine trivialité mais nul excès de noirceur dans ces paysages à peine ébauchés tels des croquis dans un carnet virtuel où glissent parfois des silhouettes furtives et silencieuses. Bien qu’en marge de tout groupement et de toute chapelle, C C-E se reconnaît tout de même en matière d’écriture apparentée à la poésie dans la tendance au retour à la narration en ce début du 21ème siècle. Il est donc logique de trouver des personnages dans ses poèmes.
 
Paysage / Évasion se veut autant narratif que les deux ensembles précédents mais s’en éloigne par son ton plus grave et son rythme plus ample accordé à celui de la marche du narrateur. L’emploi de la deuxième personne du singulier n’est pas une figure de style mais plutôt une allusion ironique à l’habitude de parler tout seul lorsqu’on est isolé et mélancolique.
 
On retrouve ce mode de narration à la deuxième personne dans La lune du matin. Le sous-titre et autres récits de l'homme invisible exprime le paradoxe de l'individu occidental tiraillé entre le désir de reconnaissance et l'aspiration à l'anonymat.
 
Au moment de conclure, je m’aperçois que j’ai adopté un ton un peu trop sérieux pour évoquer ces quatre ouvrages alors que leur auteur est le premier à les considérer comme des fantaisies mineures en raison, de son propre aveu, de leur composition aléatoire et paresseuse.
 
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Preben Mhorn