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22 octobre 2020

Carnet / Difficile de se concentrer

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Aujourd’hui je devais terminer un texte sur un de mes peintres préférés (Giorgio de Chirico) mais après quelques heures de sommeil hier matin, j’ai constaté que les puissantes bourrasques de la nuit avaient arraché la grosse branche d’un de mes arbres. Elle ne s’est pas complètement détachée du tronc et s’est en partie effondrée sur le chemin qui longe mon champ, risquant ainsi d'entraver la circulation. Il a donc fallu dégager le chemin. Tant pis pour l’écriture. Giorgio de Chirico attendra mais pour que la journée ne soit pas totalement perdue, je me suis autorisé un bon whisky tourbé et un Partagas.

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20 octobre 2020

Carnet / Le nez au vent

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Lundi matin je me suis réveillé en sursaut vers 7h (après m’être couché à 3h pour terminer un texte) parce que j’avais réalisé que j’avais commis une mauvaise formulation et que je devais la corriger tout de suite.

Lorsque mon sommeil s’interrompt brusquement pour cette raison ainsi que cela se produit de temps en temps, je me sens aliéné par cette activité d’écriture qui ne mène finalement qu’à un livre de plus, même si j’en suis satisfait.

Je ressens un agacement du même ordre lorsqu’on me présente un grand vin ou un cigare exceptionnel avec trop de cérémonie. Ce n’est pas parce que l’excellence est dans la bouteille et dans la tripe et la cape du cigare qu’on doit oublier qu’il ne s’agit que de vin et de tabac. Idem pour l’écriture, un livre n’est qu’un livre même si l’on espère y donner le meilleur.

Parfois je regrette les rares moments de mon enfance et de mon adolescence où je me fichais de tout, dormant et mangeant jusqu’à me sentir plus que rassasié de sommeil et de nourriture et n’écrivant que lorsque je n’avais rien de mieux à faire alors que, le nez au vent, je ne faisais déjà pas grand-chose. 

 

Illustration : extrait d'un de mes livres d'enfant préférés, Vent fou (texte de Véronique et images de Gerda Muller), albums du Père Castor, © Flammarion éditeur, 1963.

Texte de la page reproduite :

Le vent sortit du village, avec tout son équipage, qu'il poussa sur la route, roulant et claquant.

Mais il se fatigua vite de toutes ces choses soulevées, qui voulaient toujours se reposer et qu'il fallait toujours faire avancer à coups de fouet.

« Je vais laisser tout cela en garde chez mon ami le Champ de Trèfle » , dit le vent.

 

16 octobre 2020

Carnet / Crayon, papier, pattes de mouche et dédicace provisoire

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Manuscrit de travail de mon livre Le Grand variable

Bien sûr, j’aime les crayons, les stylos, les feutres, le papier, les carnets (un peu moins les cahiers qui me rappellent l’école) mais j’emploie le plus souvent le traitement de texte.

Le dernier livre que j’ai directement écrit au stylo-plume fut Le Grand variable, ce qui remonte au moins à la fin des années 90. Le premier jet du manuscrit est un grand cahier de mauvais papier aux pages très raturées que je perds et que je retrouve régulièrement dans mon désordre. Mes pattes de mouche ont absorbé toute l’encre d’un gros étui de stylos jetables de différentes couleurs et quand ils furent tous secs, le livre était terminé.

Je n’ai pas un très bon rapport avec l’écriture manuscrite parce que depuis l’enfance, je suis extrêmement malhabile. Dans toute activité manuelle, mes mains fonctionnent mal et me trahissent. Si j’écris à la main, je suis obligé de me concentrer sur la formation des lettres pour rester lisible et cela ralentit ou entrave ma réflexion.

À l’école primaire, j’étais toujours réprimandé et parfois puni pour ma mauvaise écriture qu’on qualifiait déjà de pattes de mouche. En deuxième année de cours élémentaire, l’institutrice me fit recopier trois fois de suite une page. À chaque fois, je devais lui montrer le résultat. La première version était mon écriture naturelle, la deuxième une écriture épaisse et la troisième une écriture fine. Je n’avais tout simplement pas compris la consigne principale qui se limitait à bien former les lettres.

Au lycée, en seconde, ma prof de français me fit remarquer que mon écriture ressemblait à celle de quelqu’un qui avait beaucoup écrit, ce qui était vrai car un de mes principaux loisirs consistait depuis déjà pas mal d’années à noter dans des carnets tout ce qui me passait par la tête.

J’admire les belles écritures, posées, lisibles, élégantes, bien positionnées sur les feuillets. Je conserve dans mes archives des dédicaces et des lettres d’écrivains aux différents styles graphiques remarquables (par exemple Christian Bobin, Pierre Autin-Grenier, Jean-Jacques Nuel, Bernard Deson et quelques autres) ainsi que des courriers de peintres qui, logiquement, ont souvent de belles écritures, je pense notamment à Paul Collomb.

Les belles écritures sont souvent celles qui coulent de la source d’un beau stylo-plume. En ce qui me concerne, pas la peine de m’offrir un Montblanc, ce serait de la confiture donnée au cochon puisque j’en bousillerais la plume au bout de quelques pages ainsi que cela m’est arrivé par le passé.

Un des outils d’écriture manuelle que j’aime utiliser est le crayon à papier à la mine tendre et grasse que j’emploie parfois pour dédicacer mes livres, un exercice assez inconfortable pour moi, surtout en public sous le regard du dédicataire. Dans ce cas, j’ai du mal à me concentrer et je risque de commettre une erreur.

L’avantage de la dédicace au crayon à papier est de pouvoir la corriger d’un trait de gomme et plus tard, le propriétaire qui veut se débarrasser du livre peut toujours l’effacer. Bizarrement, ce choix suscite une certaine perplexité.

Il y a quelques temps, j’ai signé au crayon à papier un livre à quelqu’un qui a considéré avec un brin de déception que je lui faisais une dédicace provisoire. On a dit aussi que c’était parce que je n’étais pas sûr de moi. Or s’il est un domaine où je ne vois pas forcément l’intérêt d’être toujours sûr de soi, c’est bien l’écriture...