24 décembre 2007
Jacki Maréchal évoque sa démarche artistique
J’ai travaillé pendant une douzaine d’années avant de peindre un premier tableau destiné à être exposé. De cet apprentissage exigeant auprès des grands peintres qui m’entouraient, j’ai acquis du métier, ce qui m’a valu d’ailleurs d’être immédiatement admis par certaines galeries. Je ne déments pas l’utilité de « l'habileté » dans le sens du développement d’une espèce de seconde nature qui fait que l’on peint comme l’on marche mais je rejette avec conviction la virtuosité, la recherche d'excellence dans la facture. Je préfère une recherche d'outils que la part d'ouverture au hasard m'offre au cours du travail. Il n'y a que ce que je fais involontairement qui ne prenne pas cette lourdeur, cette « subtile » lourdeur, que beaucoup admirent en disant : « il sait peindre ».
Il ne s'agit pas de maîtriser, mais de donner du possible. Et pour laisser la place à ce possible, je ne cherche pas vraiment à me déterminer, je me laisse ballotter par mes découvertes.
Il n'y a donc, à mes yeux, rien qui puisse être juste. Mais pour autant - bien que je me sente marginal - je ne suis pas anticonformiste, la culture des ruptures lorsqu'elle est volontaire n'est, à de rare exceptions près, qu'innovation et provocation gratuite. Mais lorsqu'on ressent réellement et « par hasard » quelque chose de beau qui ne s'insère pas nécessairement dans le « juste » alors je pense qu'il faut agir sans hésiter (mais sans malice, il y a un risque à prendre, il ne faut pas avoir peur d'être ridicule, il ne s'agit pas de vouloir retomber sur ses pattes).

J’admets que la création dans ce qu'elle a de culturel est bien sûr en partie la faculté de tisser d'une manière différente des formes déjà digérées mais pour autant ce tissage ne peut pas être le fruit d'une pensée claire d'avance. Il y a plutôt une espèce d'agir, un peu vague, qui à un moment génère quelque chose. On dit souvent d'un artiste qu'il doit être lui-même. Il est vrai que pour obtenir quelque chose de pertinent, pour que la magie apparaisse, il est absolument nécessaire d'être dans « sa » vérité. Mais pour ma part, je mets en cause cette notion de « vérité » ou de « moi-même » car ces sentiments sont toujours en mouvement. Ce qui va apparaître lorsque je me mets à travailler n'est nulle part, et je n'ai pas l'impression que l'origine soit en moi-même mais plutôt dans la matière qui, sur la toile, dirige mon esprit vers quelque chose, qui m'appartient (en racine) mais qui est informulé (en concept). Les seules pensées claires que l'on puisse avoir sont celles qui ont déjà été formulées, par d'autres ou par nous même, et le déjà formulé, repris, ne peut atteindre la magie.
Pas d'intention donc.

Pas d'itinéraire, pas de projet : un pinceau avec au bout de la peinture, la difficulté étant de ne pas « récupérer » mais d’entrer dans mon paradoxe qui veut déjouer toute transcendance sans pour autant ôter l'attitude contemplative.

Rappel :
Jacki Maréchal expose ses oeuvres récentes à l'Atelier Ex-libris à Oyonnax jusqu'au 29 décembre 2007. (cf texte de présentation posté sur ce blog le 1er novembre 2007 : « Jacki Maréchal en son paysage » .
Ouverture du mardi au dimanche :
Mardi de 15h à 19h.
Mercredi au samedi de 11h à 13h et de 15h à 19h.
Dimanche de 15h à 18h.
jacki-marechal.com
Jacki maréchal
Atelier Ex-libris
3. rue Brunet
01100 Oyonnax
France
33(0)474736497
06 16 26 07 58
Maison des artistes : M753485
Photo : avec Jacki (à droite), lors du vernissage.
00:29 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Jacki Maréchal, peinture, Oyonnax, art, exposition
22 décembre 2007
Les élèves organistes d’Oyonnax visitent l’orgue de Fourvière
Le programme des visites d’orgues proposées par Véronique Rougier qui enseigne cet instrument à Oyonnax s’est terminé cette année par une journée à la basilique de Fourvière à Lyon.
Les élèves organistes d’Oyonnax se sont succédé samedi 15 décembre à la tribune de l’orgue Charles Michel-Merklin datant de 1896, un bel exemple d'orgue symphonique.
Le groupe était reçu par Yves Lafargue, organiste titulaire de Notre-Dame de Fourvière, titulaire à la primatiale Saint-Jean de Lyon, professeur du CNR de Lyon, concertiste et compositeur de pièces d’orgue, de pièces vocales et de musique liturgique.
Photo : Yves Lafargue avec Véronique Rougier (au premier plan), Clara Cottet-Emard aux claviers, et Sophie Pesnel-Muller.
00:49 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Musique, orgue, Véronique Rougier, Yves Lafargue, basilique Fourvière, Classe d'orgue, Oyonnax
10 décembre 2007
Le Croquant et la modernité
Le Croquant n° 55-56, qui a pour thème La modernité, vient de paraître. Plutôt que d’en livrer ici une note de lecture puisque j’y participe, je préfère citer des extraits de deux passionnantes contributions, celle de Joël Clerget et celle de Jean-William Lapierre quant à lui décédé à la veille de l’été 2007 et à qui Michel Cornaton, directeur du Croquant, et Edgar Morin rendent hommage dans cette édition.
La photographie de couverture est signée Marc Riboud.
La modernité sans images (Joël Clerget, psychanalyste, écrivain, Lyon) :
« L’immoralité de notre modernité n’est pas sexuelle, elle est économique. La lutte des « intermittents du spectacle » nous a fait percevoir à quel point l’ignardise politique des gouvernants est impropre à résoudre quelque problème social que ce soit. Même les employés des casinos firent grève le 31 décembre 2006, craignant d’être, entre autres, remplacés par des machines. Des machines à sous sans doute. Que la machine soit mise à la place de l’homme n’est pas encore le pire scandale, mais que l’homme soit fait machine lui-même, robotisé, est humainement inacceptable. Les métiers de relation sont désormais imprégnés de ce machinisme impénitent. On nous fait devoir de réparer les pannes, casses et autres accidents de cette constante production de l’oppression généralisée. L’on ne compte plus les suicides... »
La modernité, tarte à la crème de l’idéologie dominante (Jean-William Lapierre, sociologue) :
« Aujourd’hui, la modernité est la tarte à la crème de l’idéologie dominante. Quels sont les ingrédients de ce produit de la propagande politique et de la publicité ? J’en vois quatre mais ne prétends pas être exhaustif. Le premier est l’économisme. Quand il y avait des marxistes, on leur reprochait souvent de tout fonder sur l’infrastructure économique. Mais ils reconnaissaient tout de même une « autonomie relative » aux superstructures politique et idéologique. Le triomphe mondial du libéralisme économique (à ne pas confondre avec le libéralisme politique) a mis fin à cette autonomie relative. Dans l’idéologie actuelle de la modernité, tout (la politique, l’ethnique, l’art, la recherche scientifique, la médecine, la culture, l’information) est subordonné voire réduit à des considérations et des objectifs économiques, ceux des détenteurs du pouvoir économique. »
« Nous avons connu au XXe siècle des idéologies dont la domination était « hard » (comme on dit en franglais moderne) : le fascisme, le nazisme, le stalinisme imposaient leur domination par la répression, le bourrage de crâne, l’exaltation des foules. La domination de l’idéologie de la modernité est insidieuse, latente, « soft ». Dans un entretien à Télérama (29 juin 2005, p. 25-26) le sociologue polonais Zygmunt Baumann (que j’ai rencontré lors d’un séminaire à Varsovie en septembre 1958, et qui est devenu professeur à Tel-Aviv et Leeds) dit : « (qu’en) quelques années, les forces dominantes, qui détiennent l’argent et le pouvoir d’organiser le monde dans leur intérêt, ont trouvé d’autres stratégies plus légères, moins contraignantes ». Mais efficaces : le contrôle technocratique des moyens d’information et de communication, des institutions (en particulier de l’enseignement), le financement des campagnes électorales des politiciens, la pression des « lobbies », la précarité des emplois (« n’est-elle pas, demande Baumann, une formidable manière d’obtenir l’ordre et la soumission ? ») et surtout le contrôle de nos pratiques quotidiennes de consommation par la publicité, de nos loisirs par la « télé-réalité ». Baumann encore : « Que nous apprennent ces émissions ? Que chacun est toujours seul face à tous, que la société est un jeu pour les durs. Ce qui est mis en scène, c’est la jetabilité, l’interchangeabilité et l’exclusion. Il est inutile de s’allier pour vaincre puisque tout autre, au bout du compte, ne peut être qu’un adversaire à éliminer... Quelle métaphore de la société ! ».
Revue Le Croquant (sciences humaines, arts, littératures), 208 pages, 20 euros (port non compris).
mail : revuelecroquant@yahoo.fr
23:48 Publié dans Et à part ça ? | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : Revue Le Croquant, la modernité, débat, idée, sciences humaines, arts, littératures