01 juillet 2011
De l'été vaste comme un rêve la campanule fait son miel
Chez moi, depuis le banc derrière la maison.
00:00 Publié dans Et à part ça ? | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : été, campanule des talus, paysage, jura, franche-comté, miel, rêve, blog littéraire christian cottet-emard
19 juin 2011
L’énigme du père
Qu’est-ce qu’un père ?
Tu te promènes dans ta vie comme dans un tableau de Giorgio De Chirico (période métaphysique)
Tu aimes sans comprendre il est plus urgent d’aimer que de comprendre
Un père est comme un paysage de Giorgio De Chirico énigmatique inquiétant
Nulle certitude de comprendre on peut vivre sans comprendre vivre à l’ombre de l’énigme d’un père comme à l’ombre de la Tour rouge de Giorgio De Chirico
On peut avoir un père sans comprendre ce qu’est un père
On peut être père sans comprendre ce qu’est un père
Voici une histoire qui est arrivée une nuit quand tu étais petit
Une histoire dont on a ri ton père le premier mais pas si drôle que cela après tout
Ton père qui dort ta mère tourmentée par un moustique elle éclaire et dit qu’il faudrait mettre de la bombe ton père qui se réveille aussitôt et tombe du lit de frayeur en demandant où est la bombe
Une histoire qui fait rire au dessert avec la famille
(Peu d’années avant ce réveil en sursaut et cette chute du lit ton père « sous les drapeaux » en Algérie)
Ou alors ton père qui pique une crise parce que tu veux absolument qu’on t’achète une mitraillette en plastique au bazar
Des années plus tard tes incessantes querelles avec lui parce que tu ne comprends rien aux mathématiques et que tu refuses l’idée du service militaire
Toujours ce problème de « comprendre » comprendre les maths comprendre le service militaire comprendre un père
Tu ne comprends pas il ne comprend pas que tu ne comprennes pas
Toi et lui vous vous jetez vos énigmes à la figure le cirque
De toute façon c’est aussi le cirque avec son père à lui un peu plus de silence c’est tout c’est donc cela de père en fils ? Non tout de même il ne faut pas exagérer
Des cadeaux aussi
Certains dont on se souvient plus que d’autres : pour toi un hélicoptère jaune citron en plastique qu’il t’a acheté au bazar sur le marché où quelqu’un vous a photographiés ce jour-là
Pour lui une tabatière en « pierre de lune » que tu as ramenée d’un séjour en colonie de vacances
Pour toi le deuxième concerto pour piano de Sergueï Rachmaninov par Sviatoslav Richter un vinyle Deutsch Grammophon qu’il a rapporté d’un déplacement professionnel à Paris
Pour lui un couteau à manche de corne pour couper les champignons dans la forêt avec un tire-bouchon pour la bouteille dans la musette (la musette kaki de la guerre d’Algérie)
Une jolie histoire avec ce couteau une histoire du temps où un ami qui connaissait ton père t’engueulait :
« Mais qu’est-ce que tu attends pour enfiler des bottes un ciré et pour aller aux champignons avec ton père ? »
(Cet ami avait perdu son père très jeune assassiné par un chauffard ivre qui avait grillé un feu rouge)
Finalement c’est cet ami qui est allé aux champignons avec ton père et c’est là qu’arrive cette histoire de couteau
Quelques temps après la balade aux champignons ton père ne retrouve pas son couteau
Il est si ennuyé de l’avoir perdu qu’il en rachète un identique et se garde bien de te parler de cet incident
Entre temps ton ami retrouve le couteau dans une poche de sa veste de pêche qu’il porte aussi en forêt
Ton père lui a prêté le couteau et ton ami l’a gardé par mégarde
Il veut le lui rendre mais ton père lui dit de le garder puisqu’il a racheté le même
Ils sourient de cette histoire de couteau qui instaure une petite complicité entre eux
En te racontant cette histoire plusieurs années après ton père te dit qu’il la trouve drôle
Tu penses qu’il veut dire amusante sympathique
Tu trouves aussi
Il est rassuré
Tu la trouves étrange aussi cette histoire de couteau de couteau qui s’est dédoublé pour ton père et ton ami
Une histoire élucidée simple et logique pourtant mais qui semble ne pas avoir pu dire son dernier mot
Ton père n’est plus là son couteau si chez toi tu ne vois plus ton ami
Le couteau est dans un tiroir tu ne t’en sers pas car tu n’utilises pas souvent des outils (tu n’as aucun goût aucune sympathie pour les outils et ils te le rendent bien)
Et puis tu ne peux pas laisser un couteau devenir le symbole de ta relation avec ton père vous étiez déjà bien assez coupés l’un de l’autre comme cela (sans parler de ton ami avec qui probablement sans autre raison que l’usure du temps les ponts sont coupés)
D’un ami et d’un père ne reste qu’un couteau
Qu’est-ce qu’un ami ? Qu’est-ce qu’un père ?
© Éditions Orage-Lagune-Express 2007.
Peinture : La tour rouge
Giorgio de Chirico,1913
huile sur toile 75 x 101
Venise, The Peggy Guggenheim Foundation
23:41 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : récits des lisières, père, fête des pères, éditions orage-lagune-express, giorgio de chirico, tour rouge, blog littéraire de christian cottet-emard, poésie, jura, franche-comté, algérie
02 juin 2011
Carnet des cigares et des livres
L’autre jour, j’ai mis à profit quelques heures à Lyon pour me réapprovisionner en cigares, rien de compliqué ou trop cher, quelques fagots du Nicaragua, certes un peu rustiques comparés aux Joya de Nicaragua que je fumais parfois dans les années 80. De cette époque, je garde le souvenir d’avoir loupé une affaire, un splendide cabinet de Joya en catégorie double corona ou giant, je ne sais plus. En ces temps déjà lointains, j’étais un fumeur plutôt routinier et je suis reparti de la civette avec mes habituels Por Larrañaga et Petits bouquets de Partagas. Je regrette beaucoup la disparition du Petit bouquet, ce petit trapu auquel je n’ai trouvé à ce jour aucun équivalent, même pas le Cuaba divino qui, malgré son charme, n’a rien à voir avec ce court cigare inexplicablement sacrifié par Partagas.
Avant de rentrer sous mes frênes, je suis passé à la Fnac où je me fais toujours la même réflexion : à quoi bon continuer à écrire face à une telle profusion ? Je suis heureusement capable aujourd’hui de ne plus me laisser couper les jambes avec cette sorte de découragement. Ne plus écrire parce qu’il y a tant de livres, ce serait aussi stupide que de se dire : ne plus vivre parce qu’il y a tant de monde ! Aujourd’hui, je résiste au doute, qu’il vienne de moi-même ou des autres, en réalisant que je vis en pleine nature dans un environnement qui me plaît, sans me soucier de faire ou non de la littérature, d’être ou non auteur ou écrivain, d’écrire bien ou mal, la seule chose importante étant pour moi de raconter ce que j’ai à raconter durant mon passage en ce monde. Rien de plus, rien de moins.
02:20 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : livre, cigare, blog littéraire, christian cottet-emard, partagas, joya de nicaragua, petit bouquet, lyon, rhône-alpes, fnac, civette, franche-comté, jura, littérature, écrivain, auteur