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02 mai 2020

Vie pratique / Savoir répondre aux questions qui ne doivent pas recevoir de réponses

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Qu’on soit écrivain ou non, savoir se débarrasser des questions embarrassantes est un art de vivre qui permet aussi de remettre à leur place tous les impolis, notamment les journalistes, qui se permettent de les poser.

Lorsqu’on parle de questions qui ne doivent jamais recevoir de réponses, le mieux est de se référer aux techniques de non-communication employées par les personnalités politiques. Vous répondrez donc ainsi à toute question à laquelle vous ne voulez pas répondre :

« Je vous remercie de me poser cette question importante à laquelle je répondrai avec grand plaisir lorsque j’aurai terminé de répondre à la précédente à propos de laquelle j’avais encore une précision à donner. »

Cette formule magique vous a permis de créer une première diversion en flattant l’égo souvent surdimensionné du journaliste et une deuxième en sollicitant sa mémoire logiquement plus orientée sur les questions à venir que sur celles déjà posées. Il jettera l’éponge et passera à la question suivante.

Vous êtes tombé sur un teigneux agrippé à sa question comme l’oncle Picsou à ses dollars ? Pas de panique, voici la parade :

« J’ai bien noté votre question mais je voudrais en préambule, si vous le permettez, répondre par avance à une autre question que vous ne manquerez pas de me poser bientôt et dont la réponse contribuera à donner par anticipation à la précédente toutes les précisions qu’elle mérite. »

L'indiscret résiste encore ? Infligez-lui votre botte :

« Pouvez-vous me répéter la question ? »

 

Extrait de TU ÉCRIS TOUJOURS ? © éditions Le Pont du Change, 2010.

 

 

18 mars 2020

De la migraine

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La migraine n’est pas seulement une maladie d’écrivain, elle touche aussi les journalistes et probablement d’autres créatures. Parfois, j’ai l’impression qu’elle tourmente même Sir Alfred, le chat de mon voisin, lorsqu’il multiplie les aventures. Et les céphalopodes ? Souffrent-ils de la migraine ? On peut se poser la question et toute une série du même genre mais à quoi bon se casser la tête ?

À propos de tête, je me demandais, attablé à une terrasse de café en cette fin de matinée, à quoi pouvait bien ressembler celle de la journaliste avec qui j’avais rendez-vous pour lui parler d’une chose aussi importante pour l’humanité souffrante qu’un pet de souris mais à laquelle j’accorde tout de même un peu d’intérêt : la parution de mon dernier livre. Lors du contact téléphonique, j’avais proposé à la rédactrice de l’attendre en ce lieu si propice à l’échange culturel qu’est le bistrot en arborant un signe de reconnaissance, le Républicain Populaire Libéré du Centre ouvert à la page culturelle. Cette idée pourtant originale faillit échouer.

En effet, on était lundi et la page culturelle avait disparu au profit de la publication des résultats d’un tournoi interdépartemental de pétanque particulièrement endiablé. Cet inconvénient eût été négligeable si la moitié des clients du bar n’avaient pas tous décidé le même jour de déplier le Républicain Populaire Libéré du Centre en s’hydratant le gosier. La localière finit tout de même par me reconnaître au milieu de tous ces passionnés de pétanque. Sans doute ne ressemblais-je point à un lecteur régulier de son journal. J’en conclus que mon idée de signe de reconnaissance avait finalement fonctionné mais à l’envers. Qu’importe ? La vie n’est pas un exercice de mathématiques dont le résultat pourtant juste est considéré comme faux s’il n’est pas établi au moyen du bon raisonnement.

Je vis donc se plier sur la chaise en face de moi une grande jeune femme au style neurasthénique. Elle s’excusa de garder au visage ses larges lunettes noires en raison d’une migraine qui avait dû lui déclencher pour quelques temps des humeurs aussi chagrines que celles d’une araignée veuve noire privée de son amant qui est aussi, ne l’oublions pas, son déjeuner. À certains moments, la vie nous dépossède de tout. « Bienvenue au club des migraineux ! » lançai-je pour dédramatiser.

Les lunettes descendirent d’un cran et deux yeux sombres noyés de douleur coulèrent en direction de mon insignifiante personne, fait remarquable quand on sait que le vrai migraineux en crise n’est plus en mesure de s’intéresser aux affaires du monde puisque pour lui, plus rien n’existe, pas même le monde, rien que la migraine.

Un pâle sourire s’évada sous les verres fumés : « alors vous aussi ? » Connexion en cours ! « Hélas... » répondis-je d’un air contrit. Il faut toujours se mettre à la portée de son interlocuteur. Jai lu cette recommandation dans un manuel intitulé « Bien communiquer avec les autres » écrit par un ancien directeur des ressources humaines devenu moine trappiste puis ermite des montagnes quelque part dans l’Himalaya où il a auto-édité tous ses autres livres à tirage limité sur feuilles de papier de riz humectées à la bave de lama et reliées avec des poils tressés du même animal. Pourquoi du papier humecté à la bave de lama ? Je préfère ne pas m’étendre sur un sujet aussi dégoûtant juste avant le repas.

« Que prenez-vous pour soulager votre migraine ? » s’enquit la journaliste. Nous nous livrâmes alors à un échange d’une rare intensité sur le thème des différents mérites et inconvénients de l’effervescence et des anti-inflammatoires combinés aux trucs et astuces permettant de tenir le fléau à distance au moins quelques minutes.

« Dans nos activités littéraires, c’est embêtant la migraine » assénai-je au bout d’une heure de considérations pharmaceutiques, dans l’espoir de rappeler à la journaliste que nous n’étions pas là pour préparer l’assemblée générale des meurtris de la casquette mais pour présenter mon livre aux lecteurs avides. La jeune femme opina du chef qu’elle avait semble-t-il encore plus douloureux qu’à son arrivée et me demanda pardon de devoir prendre congé car elle risquait de s’évanouir.

Elle oublia sur la table l’exemplaire dédicacé de mon ouvrage qu’elle avait reçu en service de presse et m’abandonna au moment où je sentis naître au fond de mes yeux un mal pesant. Contagieuse, avec ça ! Quelques jours plus tard, je lui téléphonai pour solliciter un autre rendez-vous mais elle m’expliqua qu’elle avait finalement trouvé ma prose « un peu trop prise de tête » (selon son expression) pour les lecteurs d’une rubrique locale.

Si j’avais su, j’aurais écrit un livre moins brillant, baissé un peu le niveau, mais que voulez-vous, je doute fort d’en être capable.

- Extrait de TU ÉCRIS TOUJOURS ? inédit.  Précédents épisodes parus en volume aux éditions Le Pont du Change.

Cet épisode de TU ÉCRIS TOUJOURS ? illustré par le dessinateur Miege est paru dans le Magazine des Livres n°25 (juillet-août 2010).

 

01 mars 2018

Oyonnax mouchée sur internet

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Faut-il que la presse locale soit creuse (c’est l’adjectif qu’on emploie dans le métier de localier lorsque l’actualité se fait rare) pour consacrer une page à un site internet (Ville-idéale.fr) qui prétend attribuer une note chiffrée à une ville sur la base de quelques commentaires mal écrits et, semble-t-il, postés au gré de l’humeur du moment par des personnes qui en sont parties. Une entreprise bien hasardeuse qui ne méritait peut-être pas un tel écho sans doute artificiellement amplifié par l’angoisse de la page vide, un sentiment que je ne songerais pas à reprocher au rédacteur sous pression puisque je l’ai connu moi-même quand j’étais contraint d’exercer cette profession.

 

Pas question non plus de mépriser l’opinion et le droit de s’exprimer de quiconque souhaite partager son vécu à Oyonnax. Je ne m’en prive pas moi-même sur ce blog et je ne suis pas toujours tendre avec la ville où j’ai passé presque toute ma vie, que j’ai quittée pour m’installer à dix kilomètres mais où je continue de me promener, de voir des amis et de faire mes courses.

 

Il est sain de critiquer à condition de toujours garder à l’esprit que la critique est aisée mais que l’art est difficile. Comme beaucoup de petites villes, Oyonnax a d’indéniables atouts locaux. Quant à ses problèmes, ils sont souvent les mêmes que ceux qui se posent au niveau national, notamment sur le front de la délinquance et de l’insécurité routière, thèmes figurant parmi les points négatifs abordés par les commentateurs du site.

 

Pointée elle aussi, l’offre commerciale doit composer avec la réalité nationale de la dévitalisation des centres-villes, ce qui constitue un défi difficile à relever.

 

En ce qui concerne l’offre culturelle, était-il opportun de souligner dans l’article du Progrès le commentaire d’une personne qui se trompe sur le nombre de cinémas et qui qualifie de manière absurde la médiathèque de l’adjectif dégueulasse ? Malgré une retentissante erreur de casting (la résidence d’Insa Sané), la médiathèque est avec le conservatoire un des secteurs qui marchent le mieux au centre culturel. Certes, je l’ai déjà dit, la saison de spectacle n’est même pas digne d’une programmation de MJC des années soixante-dix et le centre culturel n’a rien à gagner à se transformer en centre social sous prétexte de satisfaire aux exigences de la politique de la ville. La responsabilité en incombe plus aux élus qu’aux chefs de services.

 

Sur le plan sportif, les commentateurs plus positifs ne considèrent que le rugby alors que dans toutes les autres disciplines, les équipements sont nombreux et, de mon point de vue personnel plus que suffisants. Je n’en dirai pas plus sur ce point car pour être franc, le sport à Oyonnax comme ailleurs, je m’en bats l’œil.

 

La critique la plus pertinente émanant des internautes s’exprimant sur Ville-idéale.fr est celle qui déplore un chauvinisme exagéré et non justifié eu égard à ce que propose Oyonnax. Il est vrai que la débauche d’affichage et les slogans grotesques de la communication officielle relevant de la méthode Coué prêtent le flanc à ce reproche. On peut y ajouter l’embauche d’une personne qui a pour tâche de faire rayonner la ville à l’international ! On lui souhaite bon courage ! Oyonnax s’est déjà forgée une réputation dans le monde sur le plan de l’innovation industrielle et technologique. Pour le reste, un peu plus de mesure ne nuirait pas mais le syndrome de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf ne date pas d’aujourd’hui à Oyonnax.

 

En matière d’attractivité et de qualité de vie, Oyonnax a encore beaucoup à faire même si les efforts sont réels. On peut les mesurer entre autres dans l’aménagement urbain, la création du nouveau quartier de la Croix Rousse (une réussite) et l’entretien des parcs publics malgré les fausses notes au parc Nicod avec les alignements de chaudrons de sorcière rouillés et les affreux berlingots à notables qui ressemblent à des moulins à prière tout droit sortis des cauchemars d’un confiseur de fête foraine en burn-out.

 

Je sais que je vais encore me faire disputer en publiant ce billet mais j’y consens d’autant plus volontiers que je n’ai rien à vendre, pas de carrière à protéger et personne à ménager.