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01 août 2023

Bientôt :

Le petit dernier est en cours de parution. Les habituels dépôts administratifs sont effectués.Les premiers exemplaires du service de presse sont livrés. On peut en demander d’autres dès maintenant à contact.ccottetemard@yahoo.fr

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27 juin 2023

Carnet / Impatients personnages

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Écrire deux romans en même temps, ainsi que je m’y risque parfois, me permet de passer d’un monde à un autre et de maintenir l’énergie « créatrice » (je ne peux renoncer aux guillemets lorsque j’emploie cet adjectif car je ne crois pas à la création). Seul Dieu crée (ou au moins la nature) alors que nous autres humains ne faisons qu’associer, combiner, bricoler. Mais là n’est pas en cet instant mon sujet. Je veux plutôt m’en tenir à ce double chantier que je mène depuis des mois. 

Je travaille simultanément sur deux romans très différents, l’un certes plus ambitieux que l’autre mais qui nécessitent bien sûr tous les deux le même soin. Le premier requiert un peu de recherche et de documentation puisqu’une partie, le début, se situe à la fin du moyen âge, ce qui explique que je progresse lentement. J’ai déjà déposé pour protection la trame et des fragments d’une première version, ce qui m’autorise à mettre parfois quelques extraits en ligne sur ce blog ou ailleurs. Pour me divertir de ce chantier assez fatigant, je me détends en écrivant le deuxième roman, une petite fantaisie sentimentale aigre-douce, socialement incorrecte et j’espère un peu humoristique. Le deuxième roman avance évidemment plus vite que le premier. Dans les deux cas, les couvertures existent déjà même si j’ai encore la possibilité d’en changer. 

Il arrive que les idées alimentant ces deux fictions se chevauchent dans mon esprit sur une même journée, ce qui peut fréquemment perturber mon sommeil car mes personnages se montrent de plus en plus impatients. J’ai même l’impression que ma tête, telle une petite gare de province poussiéreuse et mal éclairée (ce peut être aussi un arrêt de bus ou de tramway), leur sert de salle d’attente ou de quai où ils espèrent dans la fièvre ou l’accablement pouvoir monter dans leur train, celui de leur destin qu’ils veulent absolument accomplir en pleine lumière comme les vivants de chair et d’os. Tout cela me fatigue, certes, mais la fatigue est bien pire quand l’autre train, celui de la narration, s’arrête sans raison apparente en rase campagne ou à un carrefour anonyme.

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Photos Christian Cottet-Emard

06 janvier 2023

Sur les quais du Douro à Vila Nova de Gaia

Avant la publication prochaine de mon nouveau roman, j’ai décidé de l’enregistrer préalablement en intégralité, couverture comprise, sur la plateforme Amazon avant sa sortie officielle afin de pouvoir en donner sur mon blog quelques extraits en toute sécurité. Cette manière de procéder équivaut à un dépôt qui s’ajoute aux autres plus classiques (SGDL, office notarial, dépôts électroniques, etc…) tous destinés à la protection des ouvrages.

Extrait

Sur les quais du Douro à Vila Nova de Gaia

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Photo © Christian Cottet-Emard

    … Une fille à la longue chevelure blonde descendant jusqu’à la fermeture dorsale de sa robe marchait devant moi sur les quais du Douro. J’avais entendu dire qu’en longeant les enfilades d’entrepôts de stockage des fûts de porto et en continuant le temps qu’il fallait, bien après les quais, en arpentant des rues pavées désertes, je pouvais arriver à un village de pêcheurs « qui méritait le détour » . Cette fille à la jolie silhouette méritait-elle le détour elle aussi ? Je ne vais quand même pas changer mon projet élaboré le matin à l’hôtel pour un village de pêcheur ou pour le dos d’une inconnue. Le mieux était de la dépasser, d’allonger le pas puis, arrivé à bonne distance, de me retourner pour voir son visage. Dans ma progression, je repérai un banc public où m’assoir pour la dévisager en toute discrétion. C’était un vieux banc aux armatures rouillées et au bois tout gris qui finissait sa carrière dans le mobilier urbain au milieu d’un tapis de feuilles sèches tombées de je ne sais quel arbre malingre. Maintenant que j’étais assis sur ce banc, je réalisai qu’une fois de plus, j’étais prêt à me laisser distraire d’un projet pour trois fois rien. Il en était toujours ainsi dans ma vie.

La fille s’approchait et lorsque je finis par distinguer ses traits, je découvris un visage dur, marqué, sans harmonie, à l’expression vulgaire, presque grimaçante, le tout en contraste radical avec la silhouette mince et trompeusement juvénile qui m’avait leurré tout comme l’abondante chevelure blonde. Voilà une banale déconvenue et c’est encore pire lorsque c’est le faciès d’un homme qui se révèle ainsi. Un homme, justement, qui se dirigeait dans la direction opposée, salua la fille avec désinvolture en lui criant lorsqu’il arriva à sa hauteur : eh, la poésie, ça roule ma cocotte ? 

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Photo © Christian Cottet-Emard

Il était temps de retourner à mon projet du matin qui consistait en une visite à la cave à cigares du Corte Inglés sur les hauteurs de Vila Nova de Gaia. Il me suffisait de rebrousser chemin en direction du Pont Dom-Luís que j’avais traversé un quart d’heure avant et de gravir les petites rues vieillottes menant à l’immeuble imposant du centre commercial mais à ma grande surprise, la fille s’assit à côté de moi. À ce moment, un autre type passa devant nous et s’écria en riant : hola, la poésie ! Encore au boulot ?

La fille haussa les épaules et sortit une cigarette d’un vilain étuis clinquant. En la voyant peiner avec son briquet vide ou détraqué, je sortis le mien et lui offrit du feu. Pendant qu’elle tirait sur sa cigarette, je remarquai l’excès de rouge à lèvres, et, en baissant les yeux, la robe serrée qui lui remontait trop haut sur les cuisses maintenant qu’elle était assise. Je constatai qu’elle était beaucoup plus âgée malgré sa sveltesse et, il faut le reconnaître, d’assez belles jambes. Elle me toisa sans un merci. Si tu veux les toucher et faire ta petite affaire avec le reste, c’est cent cinquante euros, chéri.

Je ne m’attendais pas à cette sortie mais ma réponse vint par réflexe : merci, je n’en suis pas encore à payer pour ça. Dites-moi, si vous me permettez, pourquoi ces deux types vous ont-ils appelée la poésie ? La fille tapota sa cigarette pour évacuer la cendre. Parce que c’est moi, la poésie, répondit-elle en détournant la tête, et j’ai été danseuse aussi. Et toi, je parie que tu es poète, je me trompe ? ajouta-t-elle. Je pense qu’un poète ne peut se définir lui-même comme poète, dis-je, c’est aux autres d’en décider. La fille ricana. En plus, elle avait une voix rauque, vraiment désagréable. Voyez-vous ça ! Eh bien j’en connais un paquet qui ne se privent pas de se prendre pour des poètes et pour des bons ! Et toi bien sûr, tu serais une exception ?

Un peu piqué au vif quand même, je tentai d’esquiver : alors comme ça, vous seriez une incarnation de la poésie ? La fille se racla la gorge. Une incarnation ? Tu as de ces mots ! Et elle ricana de nouveau en ajoutant : tu dois être un poète néo-romantique ou quelque chose de ce genre, je l’aurais parié ! J’en connais plein, ce sont de très mauvais coups !

Las de cette conversation absurde, je me levai et ne trouvai rien d’autre à dire que : je dois partir, je vous souhaite une bonne journée. 

En réalité, je m’aperçus que je parlais dans le vide, il n’y avait personne sur le banc et je me sentais abruti, vaguement endolori. C’était sûrement la séance de dégustation de porto en fin de matinée à la maison Adriano Ramos-Pinto, suivie d’un cigare. J’aurais dû aller manger quelque chose juste après. Je m’étirai et fis demi-tour pour reprendre la direction du Corte Inglés. Le village de pêcheur « qui valait le détour » , ce serait pour une autre fois.

Un de ces bateaux qui transportent des touristes en croisières fluviales glissait sur le Douro. Je ne sais pourquoi, son sillage ramena la poésie à mon esprit. Un jour, la poésie s’est penchée sur mon berceau telle une fée et m’a offert ce cadeau, cette faculté de pouvoir regarder le monde sous un angle légèrement différent, disons (peut-être) plus personnel, par exemple une facilité à me réjouir d’un nuage lenticulaire immobile plusieurs heures dans le ciel ou de la lune du matin qui rend liquides et timidement parfumés certains jours du premier printemps. Un jour je pense cela et puis un autre jour, je me lève et je trouve que la poésie m’a moins donné qu’une vieille pute amère et goguenarde qui se prend pour une danseuse et à qui je dis tout net : ah oui, une danseuse, tu parles ! Une danseuse du genre de celles qu’entretenaient les bourgeois grassouillets du dix-neuvième siècle dans leurs garçonnières ! Danseuse ou prostituée, la poésie, c’est selon mon humeur, chérie !

 

© Blog littéraire de Christian Cottet-Emard, ISSN 2266-3959, 2023.