12 novembre 2011
La lune du matin
Ce matin tu rentres chez toi hagard tu vois la lune dans les frênes
La lune du matin couleur de pamplemousse un peu fait
Tu entres dans la maison chercher le petit appareil photo et tu ressors photographier cette lune dans les branches
Rien n’y fait ni la fatigue ni l’idée fixe du sommeil ni ta caractéristique déprime des petites heures il te faut photographier cette lune d’aube qui fait peut-être signe pourquoi pas
Après tu files te coucher comme une brute et tu dors comme une brute jusqu’à midi
Il n’existe aucune raison sérieuse de se priver de cette expérience rentrer chez soi hagard le matin photographier la lune dans les frênes se jeter sur le lit et dormir comme une brute
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La lune dans les frênes à l'aube, près de la maison (photo Christian Cottet-Emard).
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25 octobre 2011
Les ennemis du poète
La plupart des ennemis du poète sont de passage
Ils font carrière et sont contraints de subsister un certain temps dans cette petite ville qu’ils veulent faire changer comme ils veulent te faire changer toi aussi
Naturellement ils se cassent vite les dents à cette tâche et repartent un beau jour un très beau jour lassés et furieux non sans avoir cependant provoqué quelques dégâts ce qui est la définition même de l’ennemi
De leur défaite et des dégâts qu’ils ont causés ils conçoivent une nostalgie et les voici sans cesse revenant dans cette ville qu’ils ont voulu changer mais qui les a changés
Et toi toujours pareil à toi-même comme cette ville est toujours pareille à elle-même il t’arrive parfois de les apercevoir au détour d’une rue ombreuse et déserte du dimanche soir
Et tu t’arrêtes un instant pour les voir passer comme on s’assoit au bord du fleuve à regarder glisser bercés par l’onde les corps des ennemis du poète
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Image : Jacki Maréchal
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29 septembre 2011
Les beaux jours de septembre
C’est trop bête les beaux jours de septembre sans vous toutes et tous absents pour toujours
Partout des prodiges sur Terre elle-même prodige vue depuis la Mer de la Tranquillité
Chaque seconde des miracles la lune dans les frênes la campanule à fleur de roche le mauve de la colchique le marron d’Inde la joie d’un café à dix heures en terrasse jusqu’à preuve du contraire rien de tout cela n’existe ailleurs dans l’univers pourtant si extravagant jusque dans ses plus profonds enfers de ténèbres alors pourquoi
Pourquoi pas juste une fois encore même une seule ce si petit miracle en regard des autres si prodigieusement absurdes si majestueusement et sidéralement stupides pourquoi pas ce minuscule miracle un peu de temps encore avec vous toutes et tous dans les beaux jours de septembre car en comparaison de vous toutes et tous qui êtes tout et qui avez existé la Science la Foi le Destin pèsent moins qu’un caillou de la Mer de la Tranquillité
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Photo de clair de Terre prise ici
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