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14 janvier 2013

Carnet de notes

Je commence l’année en écoutant des concertos pour piano du vingtième siècle, les deux du britannique Alan Rawsthorne (1905-1971) et les deux de l’argentin Alberto Ginastera (1916-1983), deux compositeurs que j’ai très peu écoutés jusqu’à maintenant en raison du faible nombre d’enregistrements disponibles sur le marché français. Heureusement, grâce aux facilités d’achats de disques par internet, il devient depuis quelques années beaucoup plus simple d’accéder à des œuvres dont la simple mention faisait ouvrir des yeux ronds aux disquaires à l’époque où il en existait encore. Le label Naxos constitue une vraie mine d’or pour qui veut partir à la découverte de ces musiques.
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Pour qui sait que j’écoute la musique de toutes les époques, cette passion pour Rachmaninov peut paraître bizarre. Un chef d’orchestre célèbre avait même déclaré qu’il refuserait de diriger « cette musique de drugstore » ainsi qu’il qualifiait la musique de Rachmaninov !
Qu’importe le goût des puristes ! Les quatre concertos de Serguei Vasilievich Rachmaninov tiennent une grande place dans ma vie. Celui que je préfère est le quatrième sur lequel s’acharna la critique. Si je devais décrire à quelqu’un ce que j’ai le plus souvent dans la tête — appelons ça ma perception du monde — je dirais à cette personne d’écouter le quatrième concerto pour piano de Rachmaninov J’aime aussi beaucoup l’Andante du premier. Le deuxième correspond à une période de mon adolescence pendant laquelle j’essayais d’apprendre à écrire un roman dans un gros cahier d’écolier, à l’encre violette bien sûr ! À cette époque, le seul concerto pour piano que je connaissais était le n°1 de Tchaïkovsky (1840-1893), le plus célèbre. Le deuxième concerto de Rachmaninov en plus des séductions de son ample lyrisme, de sa mélancolie mais aussi de son fulgurant dynamisme avait tout pour emporter l’adhésion du jeune homme que j’étais, élevé à l’abri du rock, cette musique militaire qui ne dit pas son nom. Cette œuvre très populaire au succès permanent fut aussi pour moi, paradoxalement, la clef d’accès à l’univers des concertos pour piano du vingtième siècle. Paradoxalement, car Rachmaninov est souvent — un peu moins aujourd’hui — considéré comme un compositeur de second ordre sous prétexte qu’il s’est tenu à distance des explorations musicales de son temps. À mon simple avis de mélomane, ce reproche est un peu daté, caractéristique de la critique de la période des années 1960 et 1970. La note qui lui est réservée dans le Dictionnaire des musiciens de Roland de Candé (éditions du Seuil, collections Microcosmes) est à cet égard significative. Je crois que Rachmaninov a choisi le langage musical qui lui convenait en tant qu’individu et en tant que compositeur pour dire ce qu’il avait à dire. Je pense qu’un compositeur, comme un écrivain, peut choisir de s’exprimer en recherchant des formes nouvelles ou en utilisant celles qui existent. Il n’existe pas d’obligation d’avant-garde. Cela me fait penser à une note de Charles Juliet (1934-) avec laquelle je suis en accord dans mes propres travaux : « Il m’est interdit de violenter la langue. Comment pourrais-je fissurer ou mettre en morceaux les pierres à l’aide desquelles j’édifie ma maison. »

14 août 2012

Carnet des concerts : quand Euterpe s'en fout...

carnet,concert,musique,fâcheux,blog littéraire,christian cottet-emard,debussy,euterpeEn ce moment, c’est la saison des concerts et je ne boude pas mon plaisir malgré les fausses notes qui ne viennent pas des musiciens mais du public.

D’abord, cette manie des ovations debout qui devient systématique et qui prive les personnes forcées ou simplement désireuses de rester assises de toute vision sur le salut des artistes. Applaudir à la fin du concert suffit amplement à remercier les interprètes, on n’est pas au Proms que diable ! Pendant le concert, rien de pire que l’applaudisseur fou toujours prêt à faire claquer ses grosses paluches et à déclencher une réaction en chaîne dès qu’il n’entend plus de notes. Sans doute ignore-t-il que la musique est aussi faite de pauses et de silence. Toujours à propos des applaudissements, ils gênent les musiciens et les mélomanes s’ils crépitent entre les différents mouvements d’une sonate. Si l’on ne connaît pas l’œuvre, ce qui n’a rien de honteux, on applaudit à la fin, voire à la fin du concert, ce n’est pourtant pas compliqué.

Autre calamité du concert, le bambin pleureur ou plutôt ses parents qui devraient pourtant savoir qu’il est stupide et cruel d’imposer deux heures de musique à un enfant en bas âge ou à un nourrisson qui n’a pas fait son rot et qui aura largement le temps de devenir un mélomane quelques années plus tard s’il n’en a pas été irrémédiablement dégoûté par ses géniteurs.

Dernièrement, arrivé une heure à l’avance pour être bien placé, j’ai vécu le pire avec un papa poule flanqué de sa marmaille qui a installé un véritable campement scout juste devant moi pendant que le concert débutait : dépose du matériel Gogosports, goûter tiré des sacs, habillage et déshabillage produisant un concerto pour fermetures éclair et froissements caractéristiques des habits en bouteilles de plastique recyclé. Vous allez me dire que j’ai oublié un autre fâcheux, le tousseur, frère de l’applaudisseur fou. Impossible de l’oublier. Il est venu spécialement au concert pour tousser. À l’entracte, il ne tousse plus, c’est magique ! Peut-être est-il allergique à la musique ? Sans doute pas autant que les deux mamies que le destin a choisi de me catapulter le même jour que celui du papa poule avec son campement. Avaient-elles toutes les deux la cataracte au point d’avoir confondu un concert classique avec un thé dansant ? En tous cas, pendant une de mes sonates préférées de Debussy, elles n’ont pas arrêté de faire des risettes et des goulis-goulis aux bambins qui croquaient leurs Pépitos. Du coup, elles ont sorti les petits beurres en sachets individuels et ont fait elles aussi leur goûter.

Il y a des jours où Euterpe s'en fout...

Vignette représentant Euterpe prise ici.

06 juillet 2012

En relisant ce livre,

jorge luis borges,ernesto sabato,écrivains,orlando barone,conversations à buenos aires,éditions 10/18,éditions du rocher,anatolia,molière,collège,lycée,enseignement,culture,littérature,quichotte,cervantès,divine comédie,dante,blog littéraire,christian cottet-emardje tombe sur ce passage qui me rappelle mes années de collège et de lycée au cours desquelles j’ai été dégoûté de Molière qu’on nous faisait lamentablement ânonner en cours ou apprendre par cœur. Comme il m’aurait été agréable, à l’époque, de connaître ces conversations entre les deux écrivains enregistrées par Orlando Barone et d'en opposer cet extrait à l’exercice stupide et destructeur qu’on nous imposait :

« Pendant un moment, tous deux (Borges et Sabato) évoquent avec ferveur des aspects de cette œuvre unique (Quichotte) et je pense — je le dis tout à coup à voix haute — qu’il est dommage qu’on nous ait obligés à la lire au collège, quand nous étions incapables de l’apprécier. Borges reconnaît que c’est une erreur, la même que celle qu’on commet avec La Divine Comédie en Italie. Et Sabato affirme qu’il faudrait enseigner la littérature en sens inverse, en commençant par les contemporains, qui sont plus proches du langage, des problèmes des jeunes, pour terminer par les classiques. »


(Extrait de : Jorge Luis Borges, Ernesto Sabato, Conversations à Buenos Aires, animées par Orlando Barone, éditions 10/18.)