10 septembre 2011
Carnet de la brocante
Plus j’avance en âge, plus je purge souvent ma bibliothèque. Les livres victimes des dernières descentes finissent à la brocante annuelle de mon village où l’on peut manger des frites, des gaufres et d’excellents michons, la spécialité diététique du coin. Je m’y promène en fumant un havane pendant que les nouvelles ligues de vertu n’ont pas encore réussi à interdire de fumer en plein air.
Une année, la lubie me prit de tenir moi-même un stand sous le regard horrifié d’une ancienne collègue de passage qui me crut tombé dans la misère et qui, à ma grande satisfaction, s’en alla claironner la nouvelle dans tout le canton.
Cette année, le rescapé de la brocante est le petit livre de V. S. Naipaul, Comment je suis devenu écrivain (poche 10/18). Il ne doit son salut qu’à quelques lignes relues par hasard:
« J’ai dit que j’étais un écrivain d’intuition. C’était le cas, et il en va encore ainsi aujourd’hui que je suis si près de la fin. Je n’ai jamais eu de plan. Je n’ai suivi aucun système. J’ai travaillé intuitivement. Mon but était chaque fois de faire un livre, de créer quelque chose de facile et d’intéressant à lire. À chaque étape, il me fallait travailler dans les limites de mes connaissances, de ma sensibilité, de mon talent et de ma vision du monde. Tout cela s’est développé livre après livre. Et il me fallait écrire ces livres, parce qu’il n’en existait aucun sur ces sujets qui me donnât ce que je voulais. Je devais défricher mon univers, l’élucider, pour moi-même. »
La photo du michon vient d'ici.
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30 août 2011
Carnet de l’Embouteilleux
Dimanche, j’ai fumé un Condal, cigare des Canaries. Agréablement surpris par ce cigare doux, léger, floral, à la cape soignée. Un cigare sans prétention qui s’alliera fort bien, à l’heure du goûter, à un carré de chocolat noir.
Lundi à lire et à rêvasser sous les deux parasols. Après quelques minutes de lecture, un frôlement me fait lever la tête et je me retrouve alors au milieu d’un ballet silencieux, le vol tout en grâce et en précision de dizaines d’hirondelles pourchassant des essaims de petits insectes en suspension au-dessus de la pelouse. Le chat en a interrompu sa sieste, en pure perte heureusement.
En fin d’après-midi, seconde promenade au lac jurassien de l’Embouteilleux. La dernière fois, la floraison des épilobes se reflétait dans l’eau. Aujourd’hui, les fleurs pâlissent et la brise s’empare des poils blancs et soyeux de leurs graines.
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18 août 2011
Carnet du second degré
J’ai déjà dit dans ces carnets qu’il m’arrivait d’écouter certaines œuvres d’Edward Elgar (1857-1934) « au second degré » tant cette musique au demeurant superbe mais marquée de lourde nostalgie impériale franchit difficilement le mur du son du goût français, ce qui explique d’ailleurs la méconnaissance du public français à l’égard de ce très grand compositeur considéré par les britanniques comme leur musicien officiel.
Mais ceci est encore plus vrai pour William Walton (1902-1983) , son successeur si je puis dire, dans la veine impériale de certaines de ses compositions telles que la Marche pour une Histoire des peuples anglophones. Point de nostalgie d’Empire dans cette pièce datant de 1959, écrite à l’origine pour le générique d’une série télévisée, mais une tradition de rythme et d’orchestration irrésistible, caractéristique de cette esthétique. Dans cette veine, il me semble toutefois déceler chez Walton un soupçon d’ironie, ce qui me ramène à cette notion d’écoute au second degré.
Cependant, qu’on ne s’y trompe pas, Elgar comme Walton dans leurs musiques symphoniques et chorales respectives, sont deux compositeurs aux œuvres considérables, même si celle de Walton fut injustement occultée dans les années soixante du vingtième siècle par une avant-garde de musiciens plus tournés vers l’expérimentation formelle.
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