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07 juillet 2007

D'un monde à l'autre

Hier soir, salon de musique chez Véronique Rougier et Olivier Leguay, tous deux organistes, qui ont convié quelques amis. Olivier joue l’intégralité de la quatrième symphonie de Louis Vierne. En jetant un coup d’œil machinal sur le pédalier puis sur les claviers, je m’aperçois que la partition (cinquante-cinq pages) n’est pas sur le pupitre de l’orgue mais dans les mains d’une invitée assise à côté de moi !
Je devrais être habitué à voir et entendre Olivier jouer de mémoire mais le talent musical est une intarissable source de surprise.
Je dois avouer que je m’étais quelque peu éloigné de l’oeuvre de Vierne après l’audition, il y a vingt-cinq ans, de vieux vinyles mal enregistrés ne restituant plus qu’une informe rumeur. Cette soirée remet Vierne au premier plan de mes organistes préférés. L’interprétation d’Olivier permet de tout entendre, d’accéder à toute la douloureuse et ténébreuse subtilité de cette musique avec laquelle il a de profondes affinités. En l’écoutant, j’avais l’impression d’assister à l’invention d’un trésor, comme on voit parfois surgir, du fond d’une obscure chapelle, le fugace reflet d’un vitrail.
Encore tout étourdi de musique, après une collation arrosée d’excellent porto, je rentre à pied à la maison et me retrouve en chemin dans la nuit en train de pousser, ventre à terre, une vieille voiture que son chauffeur n’arrive pas à démarrer.
C’est ainsi qu’en quelques heures, on passe d’un monde à l’autre.

25 juin 2007

L'avant-garde à la retraite

Je n'ai jamais lu John Banville mais cette petite vanne citée dans Le Monde des livres me plaît bien : « Maintenant que l'avant-garde est à la retraite, on peut retourner au plaisir du roman : raconter des histoires. »

06 février 2007

Un poète perdu dans le monde du cinéma

Béotien en cinéma (je compte les films qui m'ont marqué - soyons généreux - sur les doigts des deux mains) j'ai pourtant recopié sur mon carnet, en 2001, quelques propos extraits d'un entretien avec David Lynch paru dans Télérama :
« J'aime rester assis sur une chaise et rêver. Je ne me force pas à imaginer quelque chose, mais j'accompagne mes pensées le plus longtemps possible. Petit à petit, elles me mènent vers de nouveaux lieux. »
Ces trois phrases correspondent parfaitement à ma manière de laisser se préciser les contours d’un poème ou d’une fiction et elles sont d’un cinéaste.
Et voilà qu’en 2007, dans un nouvel entretien publié dans le même magazine, trois autres phrases de David Lynch me sautent aux yeux :
« Quand j’étais enfant, mon univers se limitait à deux pâtés de maisons. Tout semblait stable. Pourtant, j’avais l’impression que quelque chose de menaçant restait caché sous la surface. »
Le plus étonnant n’est pas pour moi d’avoir éprouvé le même sentiment dans l’enfance mais de trouver une telle correspondance de pensée dans les propos d’un cinéaste. Pour couronner le tout, je me suis presque endormi devant un de ses films, Mulholland Drive (honte à moi).
Et puis cela encore, qui me fait penser à mon expérience de la publication en ligne :
« la possibilité qu’offrent les nouvelles technologies de commencer à filmer dès qu’on a une idée, sans rien demander à personne, c’est tout simplement merveilleux. J’ai enfin pu le faire pour Inland Empire, grâce au numérique. »
À l’évidence, c’est ce que dit et note David Lynch qui m’intéresse. Il est sans doute un poète perdu dans le monde du cinéma.