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11 septembre 2016

Carnet / Du 11 septembre 2001, des drones et de la guerre d’aujourd’hui

carnet,note,journal,prairie journal,écriture de soi,opinion,11 septembre 2001,guerre,drone,nouvelles du front,blog littéraire de christian cottet-emard,défense,sécurité,ennemiPourquoi inventons-nous de nouvelles armes ?

Pour réduire les pertes dans notre camp et pour augmenter l’efficacité contre l’ennemi. Cette évidence, rappelée lors d’un intéressant débat télévisé sur le thème des drones, permettait de relativiser les cris de vierges effarouchées de ceux qui affirment sans craindre le ridicule que ces machines rendent la guerre inhumaine, cet adjectif étant ici à considérer dans le sens de cruel.

Si la guerre est effectivement cruelle, elle ne peut être inhumaine puisqu’elle est hélas toujours menée par des humains, qu’ils opèrent sur le champ de bataille en contact direct avec l’ennemi ou à des milliers de kilomètres de leurs cibles. Dans cette seconde option, pour qui dispose de l’armement requis, le but est bien de minimiser les pertes et d’augmenter l’efficacité, ce qui constitue l’évolution prévisible de la doctrine militaire des puissances occidentales.

Un général qui intervenait dans ce débat a fort opportunément précisé les raisons de cette évolution principalement liée à la baisse des effectifs (il n’est aujourd’hui heureusement plus question d’engager des millions de soldats comme dans les anciens conflits) et à un assez récent rapport à la guerre des démocraties modernes : les opinions publiques des pays occidentaux riches et développés considérant à juste titre la mort au combat d’un soldat, même d’un soldat professionnel, comme un drame national, l’armée est obligée de se doter de technologies pour s’adapter à cette nouvelle donne.

Qui pourrait se plaindre de cette évolution caractéristique des sociétés occidentales, notamment de la part de commandements militaires jadis peu soucieux des hécatombes dans leurs propres rangs lors des précédents conflits ?

Le temps n’est pas si loin où, dans nos démocraties pourtant évoluées, la société civile considérait qu’il était normal de mourir au combat, qu’un jeune homme sous les drapeaux n’appartenait plus à sa famille mais à l’armée et qu’il n’était donc même plus question pour lui de vie privée.

En attendant que la guerre soit bannie du fonctionnement humain, si l’on peut toujours rêver que cela puisse advenir avant la disparition de l’humanité, l’Occident n’a pas d’autres choix, dans le contexte international de ce début de 21ème siècle, que de prendre une avance rapide et permanente dans le développement de cette nouvelle génération d’armes dont on peut espérer que la capacité offensive apporte un prolongement et un complément à la doctrine de la dissuasion nucléaire. Celle-ci a fait ses preuves durant la deuxième moitié du 20ème siècle mais elle n’est adaptée que face à un ennemi qui pense comme nous.

Or nous sommes désormais en présence d’un ennemi aux critères et aux raisonnements radicalement différents des nôtres face auquel la supériorité technologique affichée par les drones et autres systèmes d’intervention ponctuelle et ciblée est aussi décisive que la force massive de dissuasion.

 

Chaque 11 septembre, me revient en mémoire la réaction glaçante d’une vieille copine (qui ne l’est plus, du reste) rencontrée dans un magasin pendant l’annonce de la catastrophe en boucle dans les médias. J’avais appris la nouvelle à la fin de ma journée de travail, en remontant des archives où j’étais complètement isolé de l’extérieur. J’étais inquiet. Un de mes cauchemars récurrents, le déclenchement de la troisième guerre mondiale, revenait me hanter.

Là-dessus je rencontre cette fille, style vaguement flower-power, peace and love, qui écrit des poèmes, à qui je fais part de ma stupeur et qui me répond d’un air badin et avec un mauvais petit sourire par une phrase que je ne citerai pas tant elle était totalement dénuée de la moindre compassion pour les victimes de cet acte barbare mais représentative de l’anti-américanisme le plus ridiculement primaire.

J’y repense chaque 11 septembre, date si sinistre pour nos amis américains et pour l’ensemble de l’Occident qu’en 2004, le jour envisagé de mon mariage étant le 11 septembre, j’ai préféré le programmer le 4.

 

 

10 février 2016

Carnet / Des « robots tueurs autonomes »

carnet,note,journal,écriture de soi,autobiographie,prairie journal,opinion,blog littéraire de christian cottet-emard,robots tueurs autonomes,robots militaires autonomes,armement,haute technologie,intelligence artificielle,robotique militaire,dissuasion nucléaire,guerre contemporaine,armée de métier,ennemi,occident,défense,drone,big dogJ’apprends par la presse que « plus de trois mille chercheurs en robotique et en intelligence artificielle du monde entier ont signé une lettre ouverte demandant l’interdiction des " robots tueurs autonomes ", capables à brève échéance de sélectionner et d’exécuter des cibles sans intervention humaine. »

Je crois au contraire que dans le contexte international actuel, l’Occident et ses alliés doivent continuer de développer au plus vite ces nouvelles armes de haute technologie en complément de la dissuasion nucléaire.

Depuis le début de la guerre froide au vingtième siècle, les gens de ma génération ont vécu dans la hantise d’une troisième guerre mondiale entre les forces de l’Otan et celles du Pacte de Varsovie dont le champ de bataille eût été l’Europe. Malgré de nombreuses alertes (la plus connue étant la crise des missiles de Cuba, mais il y en eut bien d’autres, y compris avant la chute du mur de Berlin) le cataclysme n’a pas eu lieu car pour les belligérants, s’emparer d’un territoire dévasté pour toujours par l’arme nucléaire ne présentait pas d’intérêt. Résultat : une paix armée et relative dans un Occident à peu près démocratique même si la guerre continuait de manière conventionnelle hors de ses frontières par états lointains interposés.

Hélas, nous avons basculé dans un rapport de force radicalement différent dans lequel l’effroi nucléaire n’est plus le médiateur ultime puisque l’ennemi d’aujourd’hui, contrairement à l’ennemi d’hier, n’a absolument rien en commun avec nous, ni dans sa nature ni dans ses objectifs ni dans ses critères de victoire ou de défaite. L’ennemi actuel pense qu’il peut gagner au Ciel même s’il perd sur Terre, ce qui peut le conduire à envisager l’holocauste nucléaire comme une option acceptable puisqu’il a foi en ce qu’il estime être la vraie vie, celle qu’il ne situe pas en ce bas monde mais dans l’Au-delà. Pour l’Occident, une telle posture remet en cause le concept de dissuasion qui reposait sur un équilibre de la terreur entre des ennemis ayant la même conception de la vie et de la mort.

Maintenant que des actes de guerre sont commis sur son territoire, l’Occident connaît une phase d’adaptation. Cette adaptation passe par le deuil et l’abandon du déni de réalité.

Le deuil : l’Occident doit faire le deuil de son désir certes légitime mais illusoire de n’avoir point d’ennemi.

L’abandon du déni de réalité : l’Occident  doit admettre qu’il est menacé chez lui, y compris de l’intérieur.

L’Occident doit aussi se libérer de sa mauvaise conscience historique sur laquelle prolifèrent trop de courants de pensée désuets et hostiles à sa culture et à son mode de vie. Il sait faire son examen de conscience et se remettre en question mais cette capacité ne doit pas le paralyser, surtout face à la menace actuelle.

La dissuasion nucléaire massive telle que nous la connaissons (le premier à tirer certain d’être le second à mourir) étant moins opérante (voire plus du tout) en présence d’un ennemi qui raisonne selon des critères différents, l’Occident adapte à juste titre sa défense en renforçant la recherche et le développement de son armement de haute technologie (drones, robots programmés et pilotés à distance, armes nucléaires miniaturisées et, bientôt, les fameux « robots tueurs autonomes ») parce que, Dieu merci, les opinions publiques occidentales ne tolèrent plus de se résigner au sacrifice de leurs enfants sur les champs de bataille ainsi que cela fut le cas lors des deux derniers conflits mondiaux.

Cette nécessaire montée en puissance de l’armement de haute technologie dont les Américains et les Français sont leaders a aussi pour corollaire l’abandon de toute idée de retour à cette inutile et coûteuse ineptie qu’était le service militaire obligatoire depuis longtemps définitivement inadapté aux exigences humaines et techniques de l’armée de métier.

Photo CC-E

 

16 janvier 2016

Carnet / Des heures silencieuses

carnet,note,journal,écriture de soi,autobiographie,prairie journal,ennemi,blog littéraire de christian cottet-emard,temps,isolement,solitude,hiver,nuit,neige,christian cottet-emard,littérature poésie,nature,contemplation,photoHier en fin d’après-midi, avant de tenir au sol, les flocons poudraient les tapis de feuillage sec en produisant un grésillement semblable à celui du diamant sur le sillon d’un vieux 33 tours. Je prends la mesure des décennies écoulées en songeant que cette image deviendra de plus en plus sibylline !

Maintenant, en entrouvrant la fenêtre pour évacuer quelques volutes de cigare, je vois la nuit des prés et des bois blanchir dans un silence à peine troublé par une bûche qui crépite et brasille encore dans le foyer.carnet,note,journal,écriture de soi,autobiographie,prairie journal,ennemi,blog littéraire de christian cottet-emard,temps,isolement,solitude,hiver,nuit,neige,christian cottet-emard,littérature poésie,nature,contemplation,photo

Ces temps, je tourne au Connemara dont la saveur tourbée me ravit surtout en hiver, à l’apéritif avec quelques chips et un petit cigare sec. Les frimas sont en effet moins propices aux havanes ou aux dominicains de préférence valorisés par un air doux, humide et floral. En revanche, des cigares plus rustiques comme ceux du Honduras ou certaines vitoles du Nicaragua affrontent mieux l’air vif qui sent la neige et le résineux.

Je suis de plus en plus enclin à réfléchir sur le thème de l’ennemi dans un prochain ouvrage. Certes, l’actualité me conduit-elle à cette réflexion mais plus encore la conscience de la récurrence de cette thématique dès mon jeune âge. Comment aborder ce sujet ? L’essai me mobiliserait trop. Peut-être la poésie ? (J’ai déjà évoqué l’ennemi dans plusieurs textes). Ou tout simplement le fragment intégré à mes carnets ? Une fois de plus, ne rien décider, laisser venir, consentir à ce que la forme s’impose d’elle-même. Ce qu’il faut : attendre longtemps mais écrire vite.

Cette année, je n’ai pas envoyé de vœux, le cœur n’y était pas, et je n’ai pas encore répondu à ceux qui m’en ont gratifié. J’exagère. Une amie chère m’a téléphoné de Paris où elle vit et enseigne. Je suis heureux et soulagé qu’elle ne me tienne pas rigueur de ma manie de répondre tardivement au courrier. Je me sens parfois isolé mais je n’agis guère pour y remédier. Pourquoi ? Je n’en sais rien.

L’autre jour, un rayon de soleil couchant a brièvement éclairé le salon après une journée obscure, projetant mon ombre et celle d’une lampe sur le mur. J’ai eu à peine le temps de faire une photo. Les heures ont beau être silencieuses, elles n'en sont pas moins rapides.