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30 avril 2019

Carnet / Aides et récompenses littéraires : coups tordus et foire d’empoigne.

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Cette pétition part d'une bonne intention et d'un constat exact. Les petites maisons d’éditions indépendantes et leurs auteurs sont effectivement ignorés par les médias de grande diffusion mais cela relève un peu de la découverte de la lune !

Nous sommes là dans un circuit industriel dans lequel tout n'est d'ailleurs pas à jeter mais qui, en toute logique, défend âprement son monopole. Il s’agit de temps d’antenne, rare et cher, et de concurrence féroce entre grands groupes. Dans une telle foire d’empoigne, difficile de croire qu’un animateur aussi bien intentionné soit-il puisse avoir la liberté de réserver quelques minutes voire quelques secondes de plateau à un auteur inconnu publié par un éditeur discret ! Voila qui est bien dommage mais il y a plus préoccupant.

Lorsque j’ai commencé à publier tant bien que mal dans les années 80, deux dispositifs pouvaient encore donner une chance infime à des inconnus, méconnus et débutants non recommandés car sans réseau d’accéder à un début de visibilité : quelques prix littéraires décernés sur manuscrits et des bourses d’écriture. Tout cela n’était déjà certes pas parfait et affecté de fréquentes dérives voire parfois de magouilles mais avait au moins le mérite d’exister.

Quelques auteurs et quelques œuvres ont pu ainsi bénéficier d’un petit tremplin vers la notoriété. Beaucoup n’ont pu transformer l’essai, comme on dit dans le ballon, et quelques-uns, devenus de vrais professionnels de la constitution de dossiers de candidature à ces aides et à ces prix, en ont habilement vivoté.

Il suffisait en ces temps de début d’assistanat littéraire de pouvoir faire état d’une première publication, même confidentielle et en principe à compte d’éditeur, pour être déclaré éligible.

Il n’en va plus de même aujourd’hui. Les prix littéraires conséquents et médiatisés décernés sur manuscrits se sont considérablement raréfiés, notamment dans le secteur de la poésie. Pire, certains de ces prix débouchant jadis sur une publication sérieuse profitant donc à un lauréat inconnu ou débutant ont inversé leur fonctionnement et gratifient désormais des auteurs confirmés. C’est ce qui s’appelle passer des couronnes de laurier aux couronnes mortuaires. Il ne s’agit plus d’un jury qui sort le lauréat de l’ombre mais d’un lauréat qui éclaire le jury. Le mieux est d’en rire car ce n’est que pathétique mais il y a plus vicieux.

L’attribution des bourses littéraires relevant de ce qu’on appelle les aides à l’écriture a glissé sur la même pente.

Ces bourses ne sont pas distribuées comme des petits pains. Pour être admis à présenter un dossier de candidature dont on se demande si l’argumentaire et la forme ne sont pas plus importants que le fond du projet littéraire, il faut non seulement faire état d’au moins un livre publié à compte d’éditeur, ainsi que cela était toujours requis, mais encore établir désormais que ce livre fait l’objet d’un contrat d’édition classique assorti d’une diffusion et d’une distribution suffisantes en librairie.

Il est même fréquent qu’un tirage minimum soit exigé (500 exemplaires pour le roman et 300 pour la poésie, ce qui, en France, est déjà considérable pour un premier livre d’un auteur en devenir). Or, celles et ceux qui ont besoin d’être aidés, en particulier les jeunes, sont justement les moins à même de satisfaire à ces critères, notamment à cette exigence supplémentaire de diffusion et de distribution. Cela signifie en résumé que plus que jamais, on ne prête qu’aux riches.

Le résultat de ces conditions de plus en plus restrictives à la possibilité de présenter une candidature à ces dispositifs d’attribution de bourses ne s’est pas fait attendre. Seuls les auteurs déjà lancés dans le circuit et, répétons-le au passage, les virtuoses du dossier bien ficelé, bénéficient du système. Les autres resteront à la porte et ceux qui décideront de s’aider eux-mêmes dans une démarche qualitative et raisonnée d’auto-édition se verront traités avec le même dédain que s’ils publiaient à compte d’auteur chez n’importe quel prestataire douteux, ce qui est pourtant radicalement différent.

Dans un tel contexte d’exclusion, difficile de ne pas en conclure que les seuls critères qui devraient pourtant prévaloir, l’intérêt et la qualité du texte, semblent passer au second plan.

 

Note : à qui verrait éventuellement dans mon analyse l’expression d’une plainte ou d’une frustration personnelle, je tiens à préciser que j’ai bénéficié d’une bourse du CNL (Centre National du Livre). J’aborde donc ces sujets sans passions tristes.

 

26 avril 2019

Carnet / Édition : des sujets qui fâchent

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Si je peux facilement comprendre les griefs des libraires à l’encontre d’Amazon, j’ai un peu plus de mal avec l’hostilité affichée des éditeurs envers ce spécialiste de l’auto-édition.

J’entends toujours les éditeurs (petits et grands) se plaindre d’être ensevelis sous des piles de manuscrits non sollicités qu’ils reçoivent par la poste.

Ne devraient-ils pas plutôt se réjouir d’être progressivement délestés de tous ces textes indésirables dont une grande part peut désormais converger vers les plateformes d’auto-édition telles qu’Amazon ?

En outre, je me demande bien en quoi les relations entre écrivains et éditeurs travaillant dans le circuit classique de l’édition peuvent être compromises par la possibilité offerte à des auteurs qu’ils ne publieront jamais de s’éditer eux-mêmes.

Le patron de la librairie Ombre blanches emploie le mot autorité, certes plus noble, mais c’est en réalité de pouvoir qu’il s’agit. Ce que je lis dans cette hostilité générale envers l’auto-édition relève à mon avis de l’angoisse de la perte d’un pouvoir demeuré longtemps sans partage.

Pour qui s’intéresse à ces questions, je renvoie à un article que j’ai publié dans le troisième numéro de la revue Instinct nomade consacré à l’écrivain Joseph Delteil et sur ce blog ici et .

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22 janvier 2019

Carnet / L'auto-édition en débat

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Opposer les deux systèmes (édition classique et auto-édition) n’a guère de sens. Je trouve que les deux peuvent être complémentaires pour les auteurs.   

 

En ce qui concerne l’édition classique, je précise qu’il n’est pas dans mon propos de dénigrer le travail des éditeurs, petits et grands mais d’attirer l’attention sur ce qui rend le circuit habituel de moins en moins attirant lorsqu'on veut publier. Pour plus de précisions techniques sur ce dernier point, je renvoie au très intéressant témoignage d’un éditeur qu’on peut lire sur Facebook.

 

À propos de la qualité littéraire   

 

Je ne pense pas que les éditeurs soient les seuls garants de la qualité littéraire, ce qu’ils affirment parfois avec solennité parce qu’ils sentent qu’une partie de leur pouvoir leur échappe lorsque les auteurs s’efforcent de reprendre un peu la main sur leur création grâce aux nouveaux outils de l’auto-édition.

 

La qualité littéraire est une notion bien subjective. L’exemple des rapports entre un écrivain comme Raymond Carver et l’éditeur qui lui a apporté le succès en témoigne. Cet éditeur est massivement intervenu sur de nombreuses nouvelles de Carver en les allégeant, en les élaguant, en les rabotant littéralement, parfois au grand désespoir de Carver (il existe une correspondance à ce sujet). Finalement, la publication de ces nouvelles dans la version de l’éditeur a contribué à créer dans le grand public l’image d’un Carver champion de la ligne claire et de la concision. On sait maintenant qu’il s’agissait d’un mythe grâce à la publication simultanée des versions retaillées par l’éditeur et des originaux de Carver au style beaucoup plus touffu et aux développements beaucoup plus importants.

 

De l’idée que je me fais de la qualité littéraire, celle-ci est pour moi beaucoup plus présente dans les originaux de Carver que dans le rewriting de son éditeur. Question de goût personnel, donc. Si Raymond Carver avait eu accès aux possibilités qu’offre aujourd’hui l’auto-édition, il n’aurait peut-être pas souffert des modifications qui lui furent imposées sans ménagement mais peut-être aurait-il aussi été privé de son considérable succès commercial dans les dernières années de sa courte vie.

 

Sur l’aspect technique de l’auto-édition

 

Il est vrai que beaucoup de compétences techniques en de nombreux domaines sont requises pour parvenir à un résultat professionnel, ce qui n’est pas forcément compatible avec la disponibilité et le travail que demande l’écriture. On peut se faire aider pour cela. Il existe différents prestataires en ligne qui proposent des solutions d’impression à la demande. La plus efficace et la plus fiable est à mon avis celle d’Amazon quoiqu’on puisse penser en bien ou en mal de ce géant commercial.

 

La promotion sur les réseaux sociaux

 

Je pense que les réseaux sociaux sont de bons outils, non pas pour « se faire sa petite gloire personnelle » comme on en fait le reproche à ceux qui s’efforcent de les utiliser intelligemment mais pour faire de la promotion, ce qui n’est honteux ni pour un éditeur ni pour un auteur auto-édité.

 

Sujet sensible : la diffusion

 

L’argument de l’éditeur « qui se charge de la diffusion » revient toujours lorsqu’il s’agit de dénigrer l’auto-édition. Oui, il s’en charge mais pas longtemps dans le cas fréquent du primo-romancier qui a des difficultés au démarrage. Comme les chiffres cités dans mon article du 10 janvier en témoignent, les bataillons d’inconnus publiés par l’édition classique dans le contexte de surproduction des rentrées littéraires cessent rapidement d’être diffusés et distribués.

 

On en retrouve parfois dans les salons du livre en province avec des piles d’ouvrages qu’ils doivent gérer eux-mêmes. Dans ces cas déprimants, l’éditeur n’a pas forcément les moyens, le temps voire l’envie d’accorder de nouvelles chances, de travailler dans la durée ainsi que cela arrivait encore il y a bien longtemps, à une époque où un auteur finissait parfois par émerger au bout de trois, quatre, cinq, six livres ou plus.

 

Dans un tel contexte, mieux vaut une auto-édition bien menée chez un prestataire solide, ce qui permet à l’auteur d’éviter la blessure narcissique, de se confronter à la réalité du marché du livre, de ne pas devoir attendre un ou deux ans entre la signature de son contrat et la publication et, cerise sur le gâteau, de rester propriétaire de ses droits. Sur ce dernier point, je peux témoigner qu’il est désagréable de se retrouver avec un livre captif dont l’éditeur ne s’occupe plus, mésaventure évidemment impossible dans l’auto-édition.