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05 avril 2019

Carnet / Des mathématiques et des papillons de nuit

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C’est exactement ce que j’ai pensé au salon du livre de Nantua où je suis passé en touriste voici quelques semaines et où le premier stand sur lequel je suis tombé était celui d’une auteure d’ouvrages proposant une alternative à l’approche et à l’enseignement des mathématiques. Je précise tout de suite qu’il s’agissait d’une personne très sympathique et sincère dans sa volonté bienveillante de transmettre l’intérêt et le goût pour cette discipline indispensable et déterminante dans les progrès de l’humanité. On peut être conscient de l’importance et des bienfaits des mathématiques sans rien y comprendre, ce qui est hélas mon cas.

Mon incapacité totale et peut-être pathologique à saisir et à pratiquer le raisonnement mathématique me fit donc décliner la proposition d’un auteur du salon qui voulait me présenter la dame derrière son stand mais celle-ci m’entendit lui répondre que les maths avaient détruit ma vie, ce qui ne manqua pas de l’encourager à s’adresser à moi pour me présenter son travail. Puisque nous étions de fait mis en relation, je m’empressai de nuancer mon propos : ce ne sont pas les mathématiques qui ont détruit ma vie mais leur utilisation comme outil de sélection.

Dans le système scolaire, point de salut pour qui reste en carafe en maths dès le début ainsi que cela se produisit pour moi. Il en eût été tout autrement si j’avais été juste capable d’atteindre un niveau ne serait-ce que médiocre, quitte à me maintenir un peu en dessous de la moyenne mais je ne pus même pas atteindre cet objectif, ce qui me colla l’étiquette de cancre au milieu du front et me ferma toutes les portes. Les conséquences furent bien sûr désastreuses.

La vie m’offrit heureusement d’autres opportunités et un certain nombre de coups de chance qui me firent échapper au pire mais il est aussi vrai que sans le soutien permanent de ma famille et de mes proches, je ne sais que trop ce que je serais devenu dans cette spirale de l’échec. Malgré la vie agréable que je mène avec ce handicap, une vie bien plus confortable que celle à laquelle auraient pu prétendre plusieurs premiers de la classe qui n’avaient aucun problème en maths comme dans toutes les autres disciplines, je n’ai jamais pu oublier ce sentiment terrible, cette sensation de danger et cette panique qui s’abattent lorsqu’on entend les portes se fermer et les verrous claquer les uns après les autres.

J’ai pourtant le souvenir d’un résultat en maths, au lycée, mais cette petite victoire est marquée du sceau de l’absurde. Je ne saurais dire par quel maléfice, j’avais abouti à un résultat juste avec un raisonnement faux (il paraît que c’est possible en maths) mais comme c’est le raisonnement qui compte, je ne m’en trouvai pas plus avancé, ce qui finit de me dégoûter de cette masturbation intellectuelle.

Je ne fus donc pas un client pour la dame qui vendait ses petits manuels aux couvertures ludiques et colorées. Pour m’en excuser mais aussi pour prendre la fuite, je ne trouvai rien d’autre à lui dire qu’il était désormais pour moi trop tard pour un nouveau rendez-vous avec les maths. Après avoir passé une grande partie de ma vie à élaborer d’incessantes stratégies d’évitement, de contournement et de dérobades face au récurrent obstacle qu’ont été pour moi les maths, et ceci jusque dans les aspects les plus inattendus et les plus triviaux de mon existence, je ne vais pas entamer une psychanalyse de vingt ans pour me retrouver un jour, au bout du rouleau, à comprendre pourquoi je n’ai rien compris, foi de papillon de nuit !

 

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09 mars 2019

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estime-toi heureux,étoile filante,vœu,ciel,nuit,soir,cosmos,blog littéraire de christian cottet-emard,note,progrès,matérialisme,christian cottet-emardCe soir, je suis content de moi.

 

J'ai vu une étoile filante et j'ai fait un vœu matérialiste.

 

À cinquante-neuf ans, il y a du progrès !

 

 

 

05 février 2019

Carnet / Magique !

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L’hiver est décidément une bonne saison pour travailler à mes deux chantiers de roman. Pour oublier la neige, rien de mieux que de rédiger les scènes d’été. La pratique du roman a ses avantages quand on fait partie de la morne confrérie des météo-dépendants, poètes et boulimiques à leurs heures. C'est aussi une forme de narration qui peut souvent marcher toute seule comme si tous les matins, la cafetière venait d'elle-même remplir le bol par la seule grâce d'une rêverie routinière.

 

Le roman, c’est vraiment la double vie, une de ces petites libertés qui font oublier que ce mot tant galvaudé n’a de sens réel qu’au pluriel. Dans ce cas-là comme dans d’autres, (amour, bonheur, désir) il est amusant de constater que le pluriel n’est pas augmentatif mais diminutif. Les libertés ne sont pas la liberté, les amours ne sont pas l’amour, les bonheurs ne sont pas le bonheur, les désirs ne sont pas le désir.

 

Il arrive que les amis qui ne lisent pas et qui, de ce fait, ont une excellente raison de ne pas me lire, s’aventurent quand même parfois à me questionner sur ma perversion (l’écriture). La question qui revient le plus souvent est d’ordre technique : as-tu un plan ? Je recommande à l’auteur qui a encore l’âge, le statut social ou l’obligation professionnelle de se prendre au sérieux (ou de faire semblant) de répondre oui, ce qui rassurera la majorité du public dont les valeurs seront toujours l’effort, la peine, le boulot, le turbin, la tâche, le défi, le challenge, enfin bref, tout le saint-frusquin.

 

N’ayant plus aucune de ces obligations, j’ai le plaisir d’affirmer que lorsque j’écris un roman, je ne veux surtout pas établir un plan. Cela m'arrive pour la nouvelle dont le format requiert éventuellement plus de rigueur alors que dans le roman, on peut à mon avis se permettre de se vautrer avec autant d’aisance qu’un sanglier dans une belle ornière pleine de boue bien épaisse.

 

Par exemple, intégrer à la scène romantique le menu du restaurant où dînent les amoureux m’enchante, ce qui présentera d’ailleurs peut-être plus d’intérêt que ce qu’ils ont à se dire dans un tel moment avec le risque élevé d'un fragment de salade coincé entre les incisives.

 

Ah ! La magie de la littérature !

 

Image : ma cafetière volante photographiée par Marie