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31 octobre 2015

Carnet / D’un inconvénient de la mémoire

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La chatte Linette les a évidemment repérées mais elles se sont positionnées suffisamment en hauteur pour être inaccessibles. Tous les jours, Linette étudie le problème sans succès parce qu’elle ne se souvient pas de son échec de la veille, alors elle passe à autre chose et se rabat vers des buts à sa portée. Du coup, les deux vespertilions vivent tranquilles et Linette ne déprime pas pour si peu.

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Voilà qui me donne à réfléchir sur mon propre cas mais en l’occurrence, ma mémoire est un handicap puisque contrairement à Linette, le souvenir de mes échecs ne me quitte pas. Avec la chatte Linette et les deux chauves-souris, je me trouve donc en présence de deux modestes espèces animales qui se débrouillent mieux que moi dans le monde et dans la vie. 

24 août 2015

Carnet / De la soutenable inutilité de l'être

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 À l’heure de regarder de plus en plus souvent et longuement dans le rétroviseur, on peut éprouver un indéniable vertige à constater qu’on a consacré sa vie à tenter de cultiver un seul talent dont la société n’a aujourd’hui nul besoin, un talent, l’écriture, en outre détenu et exercé avec profit ou en pure perte par un nombre incalculable d’individus.

Cela pose en plus la question de l’utilité d’une telle existence sans que, personnellement, je ne m’en tourmente outre mesure puisque je crois que la vie n’a pas pour finalité d’être utile et d’ailleurs pas de finalité du tout. Nous n’avons pas demandé à venir au monde, ce qui nous dispense à mon avis de toute obligation d’utilité, notamment dans la vie sociale. Quant à être utile au moins à nos proches et éventuellement à nos amis, le meilleur moyen d’y parvenir est de s’exercer à être à peu près heureux dans notre vie individuelle. Rien n’est en effet plus lourd à porter que le fardeau d’un parent ou d’une personne aimée amère et malheureuse. Dès l’enfance, j’ai eu cette intuition par la suite confirmée et jamais démentie.

Un jour, quelqu’un m’a demandé entre la poire et le fromage si « je ne regrettais pas de n’avoir rien fait de ma vie » (!) c’est-à-dire, dans son esprit, de n’avoir eu aucun engagement professionnel, social, politique, humanitaire ou que sais-je encore, ce qui revenait tout simplement à me déclarer les yeux dans les yeux que j’étais inutile, ce que je revendique tout à fait tranquillement. J’ai aussi ajouté, en répondant ainsi à cette personne, que ce qui me différenciait un peu d’elle et de nombreux autres individus de son espèce, c’est que j’en étais pour ma part parfaitement conscient, surtout dans mon activité littéraire.

Dans ce domaine, à mon âge et compte tenu de ma vie plutôt confortable, quitte à me rendre improbablement utile, je n’ai pas d’autre ambition que de procurer à quelques lectrices et lecteurs un agréable moment de lecture. Tout le reste n’est que (vaine) littérature.

De nos jours, il est très en vogue chez les artistes, les écrivains, les poètes, les musiciens, d’afficher une volonté de déranger le public, de le pousser dans ses limites, de l’arracher à son confort, ce que je trouve très pompeux et prétentieux. C’est au public de décider de ce qui le dérangera ou non, de s’extraire ou non de son confort, et pas aux « créateurs » (qui d’ailleurs ne créent rien du tout mais se contentent d’associer des formes et des contenus). « J’écris sur le papier la musique que j’entends en moi, et aussi naturellement que possible » disait Rachmaninov. Sur le plan littéraire, je n’ai pas d’autre but que d’essayer de procéder exactement de la même manière en espérant parfois, sans trop d’illusions, y réussir.

 

19 novembre 2013

Carnet : de l'écriture comme un vieux tramway

écriture,littérature, poésie,carnet,note,journal,tramway,lisbonne,blog littéraire de christian cottet-emard,réussite,échec,ligne droite,but,solitude,finFaire de l’écriture son activité principale, c’est se confronter aux faux départs, aux projets qui avortent, aux échecs répétitifs, à la condescendance, aux rendez-vous manqués, aux invitations reportées ou annulées, aux fausses joies, aux espoirs déçus, toutes choses qui n’ont pas la moindre importance car elles relèvent de la représentation sociale alors que le seul et unique but, la seule et unique satisfaction, c’est d’avoir accouché du texte après s’être dit « je n’y arriverai jamais » et avoir fini par y arriver, au texte, à ce texte-là, qu’il soit publié ou non, lu ou non, aimé ou non. Juste le texte, rien que le texte, celui qu’on portait. Une fois qu’on s’est mis cela dans la tête, on peut continuer, on peut y aller, tout droit, tout seul, jusqu’à la fin.

© Éditions Orage-Lagune-Express et Christian Cottet-Emard, 2013.