04 février 2016
Jeune mère de famille occidentale en proie au spleen à la fenêtre de son bureau
Elle voudrait que son mari sportif l’accompagne au théâtre et à l’opéra
Que son amant intello l’accompagne au sport
Que son jeune amant s’habille plus classe et soit plus attentionné
Que son vieil amant s’habille plus décontracté et soit moins sentimental
Que son amant classique soit un peu rock
Que son amant rock soit un peu classique
Que son amant qui apporte des fleurs pense aussi au vase
Que son amant qui lui offre un vase pense aussi aux fleurs
Que son amant physique soit plus cérébral
Que son amant cérébral soit plus physique
Que son ami soit moins amoureux
Que son amant soit plus amical
Elle voudrait un peu d’orient dans l’occident et de l’occident dans l’orient
Depuis la fenêtre de son bureau de jeune femme cultivée professionnelle performante bonne mère de famille et talentueuse amante elle voit le fleuve qui charrie des cadavres de princes charmants
© Éditions Orage-Lagune-Express 2015
Photo CC-E
03:31 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : estime-toi heureux©, poèmes, poésie narrative, portrait, blog littéraire de christian cottet-emard, éditions orage lagune express, droits réservés, christian cottet-emard, mère de famille, spleen, occident, bureau, fleuve, prince charmant, relations humaines, sentiments, frustrations, tristesse, désenchantement, contradictions insurmontables, chimères
23 janvier 2016
Carnet / Des notes en désordre et d’un tueur lent
Lueurs incertaines des jours et des nuits. Les samares, fruits secs des frênes avec une seule aile dont les amas bruns évoquent des trousseaux de clefs, continuent de pendre aux branches en hiver. Par temps de givre, ils grésillent au moindre souffle d’air. Au redoux, le vent les agite et les frênes ont l’air de chuchoter entre eux mais je suis arrivé à un âge où je sais désormais que, comme les humains, ils n’ont pas grand-chose à se dire.
Difficultés avec la technique, l’habileté manuelle, les calculs élémentaires, l’esprit pratique. Ce sont ces manques qui m’ont poussé à choisir l’écriture au lieu de la musique ou de la peinture. Mais je travaille tous les jours à accepter cette incapacité, cette limite, et même à aimer cette incompétence puisqu’elle est malgré tout ma vie. Je connais d’ailleurs tant d’individus doués de talents variés et multiples qui ont une existence mille fois moins douillette et facile que la mienne.
Tous ces gens qui aiment souffrir au nom de grands principes et de belles idées, ils me fatiguent. Je suis las d’assister au cortège de leurs mortifications, à l’accélération de leur course au néant.
Mon destin ne consiste peut-être en rien d’autre qu’à vivre dans cette maison au milieu de la campagne et à ne pas participer, même au plus humble niveau, à ce à quoi participent les gens dits normaux. « Certains plantent, d’autres récoltent » ai-je souvent entendu dire quand j’étais enfant. Alors sans doute mon destin est-il d’habiter cette maison, cette campagne, ce lieu tant désiré et si difficilement obtenu par mon défunt père, et de me contenter d’y vivre facilement, à ma mesure, oublié de celles et ceux qui ont tenté de me comprendre sans y parvenir puis qui se sont éloignés faute de mieux parce qu’aucun autre choix n’était possible, ni pour eux ni pour moi.
Parfois dans la rue, des visages d’anges et, derrière, des paquets de névroses, une batterie de vieilles gamelles psychologiques qui s’entrechoquent dans le chaos.
Un jour, je vais finir par devenir le personnage secondaire d’une fiction impubliable.
Ce qu’on nomme aujourd’hui « musique » et « poésie » , si c’était autre chose ?
La plupart du temps, nous ne nous apercevons pas que nous vivons un moment fort de notre existence. Quand nous en prenons conscience, il est déjà trop tard pour le vivre encore mieux. Ce n’est déjà plus qu’un souvenir, un fantôme hyperactif qui ne nous laissera plus de répit.
Le chagrin est un tueur lent.
Photo CC-E
02:39 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : carnet, note, journal, autobiographie, écriture de soi, prairie journal, blog littéraire de christian cottet-emard, littérature, états d'âme, sentiments, christian cottet-emard, destin, campagne, maison, frêne, samare, fruit, hiver, givre, redoux, arbre, nature, contemplation, retrait, vie intérieure, saudade, lisbonne