04 février 2016
Jeune mère de famille occidentale en proie au spleen à la fenêtre de son bureau
Elle voudrait que son mari sportif l’accompagne au théâtre et à l’opéra
Que son amant intello l’accompagne au sport
Que son jeune amant s’habille plus classe et soit plus attentionné
Que son vieil amant s’habille plus décontracté et soit moins sentimental
Que son amant classique soit un peu rock
Que son amant rock soit un peu classique
Que son amant qui apporte des fleurs pense aussi au vase
Que son amant qui lui offre un vase pense aussi aux fleurs
Que son amant physique soit plus cérébral
Que son amant cérébral soit plus physique
Que son ami soit moins amoureux
Que son amant soit plus amical
Elle voudrait un peu d’orient dans l’occident et de l’occident dans l’orient
Depuis la fenêtre de son bureau de jeune femme cultivée professionnelle performante bonne mère de famille et talentueuse amante elle voit le fleuve qui charrie des cadavres de princes charmants
© Éditions Orage-Lagune-Express 2015
Photo CC-E
03:31 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : estime-toi heureux©, poèmes, poésie narrative, portrait, blog littéraire de christian cottet-emard, éditions orage lagune express, droits réservés, christian cottet-emard, mère de famille, spleen, occident, bureau, fleuve, prince charmant, relations humaines, sentiments, frustrations, tristesse, désenchantement, contradictions insurmontables, chimères
21 novembre 2014
Carnet / Ce qui caractérise la tristesse, c’est qu’elle cherche, flaire, piste. Elle veut trouver.
Elle est comme ces maladies qui rôdent sans se déclarer mais qui cherchent le moment, le lieu, l’organe, au cas où. La maladie veut qu’on lui ouvre la porte. Pour la tristesse, la porte est toujours entrouverte au cas où la maladie voudrait rentrer. Je ne devrais pas parler de la maladie en même temps que de la tristesse car on ne s’intéresse plus qu’à la maladie alors que c’est la tristesse qu’il faut surveiller puisque c’est elle qui verrouille ou qui déverrouille pour la libre circulation de la maladie. Que la maladie circule, à la rigueur, c’est ce qu’elle fait toujours dès la naissance de toute créature, du moment qu’elle ne s’installe pas comme dans un fauteuil où elle prendrait ses aises, grâce à la tristesse qui l’invite.
Contrôler la tristesse, ce n’est pas décider de devenir gai comme un pinson, ce n’est pas « positiver » , ce n’est pas « s’interdire toute pensée négative » , ce n’est pas non plus « s’abandonner à vivre » ainsi que prétend le suggérer un petit auteur bobo à la mode. C’est légèrement plus compliqué que ça, tout de même ! En ce qui me concerne, désolé pour qui lirait ces lignes à la recherche d’une solution, je n’ai rien à vendre comme outil de contrôle de la tristesse.
Je veux juste témoigner du fait que la tristesse est étrange, fluctuante, plastique. Elle est plus facile à définir au singulier que le bonheur et la liberté qu’on ne devrait écrire qu’au pluriel. Le bonheur n’existe pas, mais des bonheurs sont possibles. Il n’est aucune liberté mais quelques libertés peuvent se prendre. Mais dire « des tristesses » au lieu de « la tristesse » n’aboutit qu’à une préciosité, une élégance, un effet de style.
Je me fiche de définir la tristesse (je ne suis pas philosophe et je n’ai jamais rien compris à la philosophie) je voudrais juste la contrôler un peu, l’empêcher d’ouvrir la porte à ces mauvaises fréquentations que sont les maladies.
Je voudrais empêcher la tristesse de me donner envie de sucre avant d’aller me coucher, d’enchaîner trois cigares à la suite alors qu’un seul aura du goût, de rêver de repas de fêtes qui commencent à midi et finissent à minuit, en résumé je voudrais empêcher la tristesse de me donner de drôles d’idées. Je voudrais aussi l’empêcher de me rendre aveugle à ce qui a quand même fonctionné ainsi qu’elle s’y est employée en cette année 2014, une année certes voilée, bâchée, à l’image de son été sombre et muet, mais rachetée par une récente et très heureuse surprise et par un beau voyage.
Je n’en oublie pas pour autant que, malgré les bonnes fortunes et les hasards heureux, la tristesse veille et clignote, une et multiple comme la lanterne des naufrageurs.
Photo © Christian Cottet-Emard
02:16 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : carnet, note, journal, prairie journal, tristesse, écriture de soi, blog littéraire de christian cottet-emard, contrôler la tristesse
04 septembre 2014
Carnet / Sous le halo de la lampe bleue
Ce soir, avant de dresser la table du petit déjeuner (je suis dans un tel état le matin au lever que je préfère tout préparer à l’avance) je suis sorti dans le noir derrière la maison et j’ai vu une superbe étoile filante. Exceptionnellement, j’ai fait un vœu très matérialiste, mais dans l’unique but d’avoir encore plus de moyens pour essayer de ne plus l’être du tout.
En début de semaine, j’ai surpris en pleine nuit quatre gros sangliers juste sous mes fenêtres. Leur passage a déclenché les projecteurs automatiques. Ils ont bifurqué du côté de la baie vitrée et ont commencé à fouiller le pré à quelques mètres de la porte d’entrée. Je suis sorti en tapant dans mes mains pour les chasser mais leur réaction m’a étonné. Au lieu de détaler en vitesse, ils ont longé tranquillement la haie. Le plus imposant d’entre eux m’a regardé placidement faire mes moulinets et a entraîné les autres à sa suite en direction de la route. Du coup, je me suis dépêché de refermer la baie coulissante. Au même moment, la chatte Linette, l’air penaud, est rentrée par son passage secret et est allée directement se coucher.
J’ai passé la journée à relire pour la énième fois un manuscrit commencé en 2006. Il est temps que je publie cet ouvrage car avec toutes ces relectures et ces corrections, je commence à le prendre en grippe.
Magie de Facebook : j’ai blagué avec mon ami le peintre Jacki Maréchal qui semble prendre du bon temps dans le Sud. Cela m’a mis de bonne humeur et j’en ai bien besoin depuis l’hiver dernier.
J’avais débuté la soirée en écoutant le cinquième concerto pour piano dit L’Égyptien de Saint-Saëns, certes un curieux mélange de lyrisme échevelé et d’orientalisme de pacotille mais en tous cas une œuvre virtuose dont je ne me lasse pas.
Comme toujours lorsque je suis seul à la maison, j’ai dîné d’un sandwich et d’un verre de rosé. Un gros havane n’étant pas très adapté à ce repas expédié, je me suis contenté de griller quelques Partagas Club en grignotant du chocolat noir. Toujours cette envie de sucre à laquelle je cède sans vergogne, le plus surprenant étant que je n’en reprends pas pour autant les kilos perdus en 2013. Pourvu que ça dure...
Soirée terminée tard sous le halo de ma lampe bleue en rêvant à la prochaine escapade à Lisbonne où je me fournirai en Por Larrañaga introuvables dans ma région. Des petits bonheurs pour adoucir les grandes tristesses, ce n’est déjà pas si mal. On peut rester un bon vivant même affecté de la plus sombre mélancolie. C’est plus courtois et agréable pour l’entourage.
01:27 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : carnet, sanglier, chat, étoile filante, nuit, vœu, cigare, partagas, por larrañaga, lisbonne, portugal, saudade, mélancolie, tristesse, petits plaisirs, consolation, blog littéraire de christian cottet-emard, manuscrit, correction, relecture, peintre, artiste, jacki maréchal, note, journal, écriture de soi, autobiographie, lampe, lampe bleue, pâte de verre, tabac, sucre, chocolat, gourmandise, sandwich, vin rosé, facebook, sud, camille saint-saëns, concerto l'égyptien, cinquième concerto pour piano, poids, balance, alimentation, repas