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01 juillet 2010

Alma s’en va

(Nouvelle en mini-feuilleton)

La version intégrale de cette nouvelle que j'ai écrite à la fin des années 1990 est parue en deux épisodes dans le n° 16 (janvier 2000) et le n° 17 (avril 2000) de la revue Le Jardin d'essai et aux éditions Orage-Lagune-Express qui en conservent l'entier copyright. Tous droits réservés.

1

« Je ne me souviens de rien d'autre » répondis-je au major qui arpentait les abords de l'épave encore odorante de mer. Ses bottes crissaient dans le sable encore vierge de toute trace à cette heure matinale, hormis celles de la jeep dans laquelle attendaient deux soldats. L'un écrivait sur un calepin et l'autre scrutait la mer.

 

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« Mon ordonnance va vous raccompagner, proposa le major. J'ai encore à faire ici. »
Les yeux du soldat glissèrent de la mer vers les miens. Je compris tout de suite qu'il savait que j'avais pris quelque chose dans l'épave et que je n'en avais rien dit au major.
« Je préfère rentrer à pied car me lever tôt me donne mal à la tête. »

2


« Reprenons votre déposition, voulez-vous ? Vous avez déclaré : " j'ai été réveillé dans la nuit par un bruit qui semblait venir de la plage. J'ai eu du mal à me rendormir. "

— Oui.
— Vous n'êtes pas allé voir ?
— Si, après.
— Après avoir été réveillé ?
— Oui.
— Je reprends la suite de votre déposition. Vous dites : " j'avais réussi à retrouver un peu le sommeil lorsque la chambre s'est emplie d'une drôle d'odeur, à peine perceptible, inhabituelle, mais tenace. " C'est à ce moment que vous êtes allé voir ?
— Oui, je me suis levé. J'ai d'abord cru que je rêvais.
— Vous rêvez à des odeurs ?
— Souvent.
— Moi, cela ne m'est jamais arrivé. Je vois des images mais je ne sens jamais rien. »
Le major s'approcha de la fenêtre et regarda dehors. Il se tut un moment et alluma une cigarette. Il était las, indifférent, et cette histoire l'ennuyait. Seule la fumée l'intéressait, et le vide reposant où elle s'en allait.
« Cette odeur, essayez de me la décrire un peu plus ; " plutôt agréable ", dites-vous.
— Oui. Comme le parfum d'un arbre en fleur.
— Nous sommes en hiver, coupa sèchement le major. Oui ? Gildo ? Qu'est-ce qui vous arrive ? »
L'ordonnance s'était arrêté de taper à la machine. Son regard se planta un court instant dans le mien et m'inspira un profond malaise.
« Allons, cessez de rêvasser et notez ! »
Le crépitement de la machine à écrire reprit.
« Vous avez rêvé. Vous êtes un poète et vous rêvez de fleurs en hiver, c'est normal... »
Sur ces mots, le major alluma une deuxième cigarette.
« Peut-on savoir ce qui vous amuse ?
— Les poètes qui rêvent de fleurs » ne puis-je m'empêcher de répondre au major.
« Bien. Bien, bien... Ce sera tout pour aujourd'hui. Gildo, raccompagnez monsieur. »
L'ordonnance m'ouvrit la porte. Je ne pus soutenir son regard dans lequel je lisais : « je ne suis pas dupe ... »

(À suivre...)

© Éditions Orage-lagune-Express

17 juin 2010

Tu écris toujours ?

tu-ecris-toujours.jpgUn article sur le magazine La Vie Littéraire

Sur le site du magazine La Vie Littéraire, un article de Didier Bazy à propos de mon dernier livre Tu écris toujours ? (éditions Le Pont du Change).

http://www.lavielitteraire.fr/index.php/tu-ecris-toujours--

30 mai 2010

Tu écris toujours ? (éditions Le Pont du Change)

Un article dans Le Magazine des Livres

mdl24.jpgDans le Magazine des Livres n° 24, actuellement en kiosques, un article signé Stéphane Beau, consacré à « Tu écris toujours ? Manuel de survie à l'usage de l'auteur et de son entourage » de Christian Cottet-Emard :

 

 

Drôle de bestiole qu'un écrivain ! Je le savais déjà, mais grâce à Tu écris toujours ?, le dernier livre de Christian Cottet-Emard (publié par les récentes mais déjà prometteuses éditions du Pont du Change), cela se confirme. Car si quelques rares spécimens réussissent de temps en temps à sortir de l'ombre et à devenir des « auteurs à succès », la plupart des membres de cette curieuse secte s'avèrent être, aussi bien pour leur entourage que pour eux-mêmes, plus encombrants qu'autre chose. Imaginez : ils ne savent généralement rien faire d'autre qu'écrire. Pas forcément bien en plus, mais c'est un autre problème !

Car ces écrivains, voyez-vous, ne partagent aucune des passions qui font le charme de la « vraie vie » : le foot, la politique, la télé, les soldes, le bricolage... Ils fuient la foule comme la peste, ils n'ont aucune ambition, ils s'habillent mal, se lavent peu, boivent trop, et ils végètent au quotidien dans un univers parallèle qui s'acoquine mal avec le monde réel (qui, comme chacun le sait, n'accorde guère de crédit à l'immobilisme, à l'oisiveté et à l'improductivité caractérisée).

Prenant son courage à deux mains et sa plume comme il peut, avec ce qu'il lui reste de doigts disponibles, Christian Cottet-Emard s'attache donc, dans ce Manuel de survie à l'usage de l'auteur et de son entourage, à nous délivrer quelques conseils éclairés pour mieux comprendre ces grands handicapés de la vie que sont les écrivains. Et il le fait avec beaucoup d'humour et de malice, prenant volontairement à contrepied tous ceux qui veulent faire de ce travail de manieurs de stylos une activité supérieure, noble et forcément admirable. Ainsi, si je suis bien persuadé que Tu écris toujours ? amusera beaucoup celles et ceux qui côtoient quotidiennement des auteurs et qui savent à quel point leurs risibles postures et multiples tics sont désespérément prévisibles, je ne suis pas sûr qu'il en sera de même pour nombre d'écrivains qui ne se réjouiront guère de se reconnaître dans le portrait qui est fait d'eux. Tant pis pour leur vilain ego !

Tous les autres, en tout cas, se délecteront en lisant ce genre d'aphorisme : « Quant à savoir si on est écrivain parce qu'on est inadapté ou inadapté parce qu'on est écrivain, cela revient à se poser la lassante question de l'œuf et de la poule », ou ce très judicieux conseil aux poètes en manque d'inspiration, que je ne peux pas m'empêcher de citer dans son intégralité : « Voici un petit truc utile si vous avez la flemme d'écrire ou si la muse vous a posé un lapin : exhumez un de vos vieux poèmes, maquettez deux vers par page - c'est bien le diable si vous n'arrivez pas à une cinquantaine - et faites imprimer sur vélin en typographie un volume non massicoté. Les bibliophiles ne coupent pas leurs livres. Ils ne lisent pas, ils collectionnent. Alors deux vers par pages, peu importe, du moment que c'est pur chiffon et tralala ! »

Des conseils aux écrivains qui déménagent aux conseils aux écrivains qui ont encore des amis non-écrivains et non-littéraires, en passant par les conseils aux écrivains qui ne savent rien faire d'autre, aux écrivains qui se font interviewer ou qui sont assignés à résidence, tous les cas de figures sont joyeusement analysés les uns après les autres. Et au final, une fois la dernière page tournée, les premiers mots qui nous viennent à la bouche sont : « mince, c'est déjà fini ! »

Ce qui est plutôt bon signe, en général...

Stéphane Beau

 

Tu écris toujours ? Manuel de survie à l'usage de l'auteur et de son entourage de Christian Cottet-Emard, éditions le Pont du Change, 2010.

Un recueil de 96 pages, format 11 x 18 cm. 13 €.