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04 mai 2017

Lac Genin / En mémoire de monsieur Jean Godet

 

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Je venais déjeuner dans cette auberge en forêt dès le milieu des années soixante du vingtième siècle et voilà que l’an deux mille est déjà dépassé.
 
Le menu spécialités au feu de bois n’a presque pas changé et rien n’a changé non plus dehors.

Ce lieu est une perle de mon collier de paysages.

Jusqu’à aujourd’hui je n'ai manqué aucun épisode du feuilleton du papier peint et des tentures murales.

Une année mythologique, ma grand-mère était revenue du centre-ville avec son permis de conduire tout neuf et m’avait payé le petit déjeuner à l’auberge du lac Genin (pain grillé maison et beurre des fermes voisines).

En ces autres temps la tenture murale était écossaise et un orage grondait comme un farceur caché dans les bois.

Je trouvais prodigieux ce matin si sombre que la serveuse avait dû éclairer en apportant le café et le lait.
 
Quel farceur cet orage qui courait les bois !
 
Et la tourbière qui faisait des ronds dans le lac et qui versait des gouttes de nuit dans le bol du jour !

Ce soir comme tant d’autres soirs le patron fait cuire la viande et le saucisson au vin dans la cheminée.
 
Enfant, je trouvais cet homme immense au milieu des années soixante à cause de la danse indienne de son ombre autour de l’odorant feu de bois.

Et ce même homme de taille tout à fait normale vient aujourd’hui à ma table me dire bonsoir monsieur, saluer d’autres habitués puis repart surveiller la cuisson au feu de bois pendant que son ombre continue sa danse indienne du milieu des années soixante.

C’est encore un beau soir pour dîner dans cette auberge.
 
Un de ces soirs à voir rappliquer le lac et la forêt dans la salle pour saluer quelques habitués si heureux que le menu n’ait pas changé.

Et rien ni personne, hormis l’archange à l’heure d’enrouler le décor, ne peut y changer quelque chose, pas même au menu spécialités au feu de bois.
 
 
 

09 août 2014

À un saule

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L’eau le long du saule est son seul chant dans le soleil

Le vent n’est pas son mouvement ses gestes l’onde et le frisson

Il noue le temps dans son écorce et n’attend rien puisque sa chance est d’être un saule

 

© éditions Orage-Lagune-Express, 2014.

Photo Ch.Cottet-Emard

05 août 2014

Carnet / De ce qui sauve l’été sombre

Dimanche vers 19h à la sortie du concert où il y avait foule, le soleil est revenu sur le soir en une longue éclaircie qui a tout de suite réchauffé le parvis de l’abbatiale de Nantua. Avec Marie qui avait son appareil photo et sa caméra crayon, nous avons profité de ce retour très provisoire d’un des étés les plus avares que j’aie connu pour flâner sur l’esplanade du lac.

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En ce moment, je fais des photos. Je n’ai jamais eu le goût prononcé de faire des photos à cause des réglages trop compliqués pour moi, mais avec les appareils numériques qui délivrent d’une grande partie de la technique, je trouve désormais un certain plaisir à fixer quelques images.

Lorsque j’ai commencé dans la presse au début des années 80 quand j’avais une vingtaine d’années, j’étais si incapable de me servir des vieux appareils qu’il fallait charger en pellicules adaptées et passer son temps à régler que mes parents m’avaient acheté un autofocus, un appareil automatique et sans réglages dont le seul défaut était d’avoir un mécanisme peu discret. Ils avaient compris que c’était pour eux le prix à payer s’ils ne voulaient pas voir leur fils se retrouver au chômage à peine après avoir été embauché par le quotidien local. Lors de mes premières sorties avec les appareils fournis par l’agence, je revenais avec des photos complètement ratées voire sans photos du tout.

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Durant ces années, j’ai pris le dégoût de faire des photos, même avec mon autofocus qui les réussissait presque toutes mais dont le ronronnement du moteur entraînant le rouleau de pellicule a recouvert le murmure de la petite voix. De toute façon, il me fallait un travail et c’était celui-ci qui s’était présenté...

Une dizaine d’années plus tard, après avoir quitté le journal, je n’ai pratiquement plus touché à un appareil photo et il a fallu l’apparition des appareils numériques pour m’y remettre parce qu’ils permettent d’avoir immédiatement et sans effort le résultat sous les yeux et que, cerise sur le gâteau, je peux tout de suite partager grâce à un petit blog de rien du tout. C’est ainsi que je conçois la technique: elle doit être au service de ma paresse, de mon incompétence et surtout de mon bon plaisir.

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À propos de plaisir, encore quelques mots sur le concert de dimanche qui réunissait en duo la remarquable pianiste japonaise Shoko Gamo et le violoniste Romain Rechetkine. Je crois qu’on peut qualifier ce virtuose de treize ans de prodige et, prodigieuse, sa prestation le fut. Il n’empêche, les très jeunes surdoués de la musique (bien que je les admire et éprouve une grande joie à les écouter) ont pour moi quelque chose d’un peu inquiétant. Je ne peux pas m’empêcher de songer au coût humain de cette implacable maturité instrumentale. Alors oui, le jeune prodige du violon m’a impressionné et ému, mais plus encore l’alliage de subtilité et de puissance tout en retenue de Shoko Gamo qui faisait beaucoup plus que l’accompagner au piano.

Quelques concerts et quelques expositions ne sont pas de trop pour sauver un peu cet été. En cette heure tardive de la nuit (ou précoce de la nouvelle journée !) des nappes de brouillard enveloppent la maison puis s’éloignent en direction du village comme un étrange troupeau.

La chatte Linette est rentrée trempée. Depuis le canapé, elle me jette des œillades lasses comme si elle se demandait pourquoi tout est encore éclairé à presque 3h. Il est vrai que dans sa vie de chat, elle n’a sans doute pas besoin de revivre sa journée en pensée par crainte de ne pas l’avoir vécue suffisamment.