20 février 2023
Conseils au petit jeune auteur
Vous êtes jeune et vous portez un livre. Vous vous demandez ce qui vous arrive.
Essayez de ne pas trop penser à vos lecteurs car eux ne pensent pas à vous. Quand ils vous lisent, ils pensent à eux et non à vous. C’est normal.
Ne pensez qu’à votre livre en cours, c’est pour cela que vous êtes sur Terre. Le reste vous enquiquine, l’engagement, la politique, le bénévolat, l’économie, le sport, toutes ces salades. Ne pensez qu’à votre livre. S’il n’a pas de lecteurs ou très peu, ce n’est pas grave. S’il n’a pas d’éditeur, c’est peut-être bon signe. De toute façon, il existe des machines qui peuvent le fabriquer en petites quantités, à la demande. Même s’il n’y a que dix demandes, c’est fabuleux.
Ne pensez pas au succès et à la reconnaissance sociale, ces sucreries qui sont des poisons lents pour vous et votre livre. Méfiez-vous des sorties entre potes, votre livre en souffre. Ne cherchez pas à être aimé ou compris pour votre livre, c’est déjà bien assez compliqué en amour et en amitié, laissez votre livre en dehors de tout cela.
Votre livre est sinueux, pas vous. Votre livre c’est comme le tram, ne le laissez pas partir sans vous. Rêvassez, flemmardez et glandez tant que vous voulez mais dès qu’il s’agit de votre livre, arrêtez. Ne soyez pas sociable c’est-à-dire distrait, partez direct en ligne droite jusqu’à la fin.
Allez droit au but, ne perdez pas de temps à écrire sur les autres (bien qu’une exception pour les amis, si vous en avez, soit possible), ils ne vous en sauront pas gré. Laissez les hommages aux nécrologues et autres stratèges. Ne soyez pas journaliste.
Votre but est un signe de ponctuation : le point final.
Après, il faudra tout relire, corriger, peut-être modifier, peut-être tout réécrire, peut-être tout jeter puis recommencer une autre traversée jusqu’à un autre point final et ainsi de suite en direction du dernier point final, celui que vous n’aurez pas le temps de poser.
Le point final, vous dis-je, rien que le point final.
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06 février 2023
Carnet
Écrire revient pour moi à penser la nuit aux ciels de la journée et le jour aux ciels de la nuit. C’est une activité qui relève de la nostalgie de certains rêves éveillés bien que je ne sois pas moi-même quelqu’un de systématiquement nostalgique ou obsédé par les rêves, un état d’esprit qui s’apparente un peu à la saudade sans que je sois pour autant sûr que ce mot portugais impossible à traduire en français définisse au mieux cet étrange processus.
Vu de ma fenêtre, ces dernières semaines.
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19 janvier 2023
Carnet / Bob, lunettes, moustache et clarinette
Dans les années 80, pour une raison professionnelle, c’est-à-dire pour une raison idiote, je devais séjourner quelques jours à Paris, cette ville que je n’aime pas. Un soir avec des collègues, nous traînions un peu la savate je ne sais même plus dans quel quartier, une sorte de boulevard mais sans arbres.
Une voiture de police venait de stopper une auto minuscule dont s’extirpèrent au moins six passagers dont le conducteur, un grand type dégingandé déguisé en panthère rose suivi d’un autre de la même stature en costume de marsupilami (je ne me souviens pas des autres déguisements).
J’observais les rigolos présenter leurs papiers aux policiers quand les collègues me pressèrent de descendre un escalier abrupt et sombre aboutissant à la porte d’entrée de ce que je pris au début pour un salon plus ou moins privé garni de fauteuils et de canapés assez cossus. C’était en fait un petit club de jazz enfumé à la clientèle clairsemée en ce soir de semaine.
Nous nous installâmes pour boire un verre servi par un barman courtois à la voix feutrée. Les musiciens jouaient en sourdine lorsque le barman jeta un regard vers la porte d’entrée et les interrompit. Il éleva un peu la voix : chers amis, nous avons un visiteur de marque.
Les clients applaudirent aussitôt. Coiffé d'un bob, un petit homme moustachu au regard pétillant derrière de larges lunettes et au sourire discrètement jovial apparut, muni d’une clarinette. Il se joignit aux musiciens, joua quelques morceaux, salua gentiment, but un verre et prit congé en toute simplicité, toujours sous les applaudissements.
C’était Marcel Zanini qui vient de nous quitter. Je ne le connaissais que pour son tube Tu veux ou tu veux pas ? et Ça balance terrible mais il était surtout, plus encore que chanteur, un excellent clarinettiste (et saxophoniste), ainsi que je le découvris lors de cette étrange soirée. Moi qui avais passé la journée de mauvaise humeur, j'ai encore à l'esprit, si longtemps après, la sensation de détente, de sérénité et de légèreté qui m'enveloppa après le passage sur scène de ce bon génie de la clarinette magique.
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