01 novembre 2014
Cette vie de rêve
Ce n’est pas si mal finalement cette vie de rêve
Quand les rêves des autres se fracassent si souvent contre l’épicerie du coin
Ou qu’on les boit d’un trait au grand comptoir de l’idéal
Pendant ce temps tes rêves flottent au bord du monde
Plus soyeux et frais que les jambes des femmes
Plus denses et lourds que ton squelette
Plus immobiles et plus rapides que les nuages
Aussi peu réels que le monde se rêvant monde
Mais plus fiables que la météo les amours et les voitures
Tes rêves c’est-à-dire toi quand tu ne dors pas
Photo : lanterne dans un parc à Lisbonne (photo Christian Cottet-Emard)
© éd. Orage-Lagune-Express 2014
00:05 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : récits des lisières, estime-toi heureux, christian cottet-emard, rêve, rêves, poème, poésie, publication, édition, copyright, orage-lagune-express, droits réservés, dépôt juridique, notaire, protection juridique, avocat, recueil, amours, voitures, météo, jambes, femmes, monde, squelette, comptoir, idéal, dormir, blog littéraire de christian cottet-emard, lanterne, photo lanterne, feuillage, vert tendre, square, lisbonne, parc public, nez en l'air, photo
09 septembre 2014
Extrait de mon prochain livre
La Rolls verte
Antoine se perdait souvent dans la contemplation d’une tache contre le mur de son bureau, la trace d’une grosse araignée qu’il avait écrasée quelques années auparavant et qui était restée là, tel le morne trophée d’une demi-décennie d’assemblées générales et de collisions au carrefour. Le jour où la Rolls verte se gara devant l’agence du quotidien local où Antoine végétait dans un emploi de rédacteur photographe, un rayon de soleil estival éclairait crûment la tache. La secrétaire indiqua le bureau d’Antoine à un jeune couple puis se déplaça en direction de la vitrine pour admirer la Rolls verte au volant de laquelle patientait un chauffeur. Sans chauffeur, une Rolls n’est pas tout à fait une Rolls, pensa Antoine à ce moment-là. Le jeune couple qui avait trouvé porte close à l’Office de tourisme voisin de l’agence cherchait à rejoindre une direction qu’il était impossible d’indiquer clairement en raison du plan de circulation complexe récemment inauguré. Pendant qu’Antoine réfléchissait au moyen de renseigner les visiteurs, ils se chamaillèrent un peu à propos de l’heure à laquelle ils devaient se présenter là où ils étaient attendus. Antoine apprit ainsi qu’ils s’appelaient Ricardo et Rozana. Ricardo était un jeune homme brun au teint mat et Rozana une jolie rousse aux yeux verts. Sa beauté espiègle fut sans doute pour quelque chose dans la décision d’Antoine de les accompagner pour les emmener sur la bonne route. Au volant de son Ami 6 exténuée, Antoine avait du mal à quitter des yeux le rétroviseur qui encadrait l’image de la Rolls verte glissant dans les rues désertes du centre ville. À l’embranchement, Antoine fit demi-tour et indiqua d’un geste la nouvelle direction. Ricardo et Rozana le remercièrent par de grands signes de la main. De retour à l’agence, songeur, Antoine passa le reste de l’après-midi à bavarder avec la secrétaire sur le thème de la Rolls verte. Antoine n’y entendait rien en voitures mais un pigiste qui collectait des résultats sportifs assura qu’il s’agissait d’une Rolls Corniche, probablement un modèle datant de 1971.
© CECCL 2014. Tous droits réservés.
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21 décembre 2013
Des nuages lenticulaires et du bonheur
Il était souvent vêtu d'un caban, parlait peu mais acceptait volontiers un cigare et un verre d'alcool mais pas de thé. Un jour, il sortit de sa réserve habituelle, peut-être sous l'effet d'un vieux porto, et demanda à Andrade s'il était heureux de la vie qu'il menait. Sur le moment, Andrade ne sut que répondre et se contenta de remplir de nouveau le verre de son visiteur. Quand celui-ci prit congé, il repensa à la question et la jugea indiscrète. Quant à l'adjectif « heureux », il le trouva saugrenu mais lié à deux souvenirs, l'un d'enfance et l'autre d'adolescence.
Dans le premier, il revit un nuage en forme de soucoupe volante qui s'était installé dans le ciel, et sous le ciel courait ce jeune garçon qu'il avait été. Après s'être arrêté un moment le nez en l'air, il était rentré chez lui où il avait appris dans un livre qu'il s'agissait d'un nuage lenticulaire. « Les nuages lenticulaires, en forme de pile d’assiettes, peuvent rester sur place durant plusieurs heures » disait le livre. Cette apparition l'avait comblé d'un étrange et fugace bonheur. Ainsi la formation d'un nuage lenticulaire pouvait-elle susciter le sentiment d'être heureux. Pourquoi ? Alors là, mystère...
Dans le second souvenir, celui d'une promenade dans le parc municipal, Andrade se revit en jeune homme franchissant un pont. Son regard s'était mêlé au cours tranquille de la rivière. Ce jour-là, non loin du kiosque à musique, lui apparut le mystère de cette eau claire qui dansait sur les cailloux et dans le soleil, fantasque comme le rire tumultueux d'une jeune fille. Mais la rivière n'est jamais fantasque. Seul peut l'être celui qui, sans savoir pourquoi, s'est arrêté sur le pont, le passant du parc municipal soudain traversé par l'énigme de l'eau.
Presque trente ans plus tard, celui qui reste le passant du parc s'immobilise encore sur le pont, et la rivière, toujours pareille à elle-même, lui signifie qu'il ne sait toujours rien de cette inexplicable joie à propos de laquelle les gens se questionnent parfois dans la solitude lorsqu’il leur arrive de réfléchir à leur destin.
Extrait d'un ouvrage en cours. Droits réservés. © L'auteur et Orlag, 2013.
Photo de nuages lenticulaires prise ici.
00:13 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : nouvelle, nuage lenticulaire, bonheur, joie, destin, andrade, christian cottet-emard, blog littéraire de christian cottet-emard, droits réservés, édition, publication, manuscrit déposé, extrait, fêtes lointaines, mariage d'automne, notaire