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12 avril 2024

Hommage / Un bout de chemin avec Colette Guy (1925-2024)

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Le titre de mon hommage à Colette Gonin (épouse Guy) dont les obsèques ont eu lieu mardi 9 avril me vient spontanément en relisant la dédicace qu’elle m’avait adressée en 1992 lors de la parution de notre livre publié en collaboration avec son époux, le peintre Gabriel Guy (1925-2013) dans laquelle elle évoque ce cheminement artistique à travers un projet réalisé en commun, j’ose dire en dialogue.

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Ce dialogue avait commencé lors de mes débuts de journaliste dans les années 80 à l’époque où j’avais la naïveté de croire qu’on pouvait encore promouvoir la création artistique dans la presse régionale, entre autres l’œuvre littéraire de Colette et l’œuvre picturale de son mari. Malgré les multiples entraves d’obscurs secrétaires de rédaction mais aussi, heureusement, l’appui en son temps du directeur départemental du Progrès Claude Garbit et avec le soutien plus provisoire mais non moins réel (au début) de mon chef d’agence de l’époque François Villeminot, je pus placer une assez longue série d’articles sur les activités de Colette et Gabriel. Les deux  formaient un duo d’une grande créativité mais chacun dans son domaine, ce qui leur permettait de capter individuellement la lumière sans se faire de l’ombre comme c’est parfois le cas dans les couples d’artistes.

Pour Colette, c’était la danse (on se souvient de l'enseignement qu'elle en dispensait en toute indépendance dans son studio de la rue du Lieutenant Minet à Oyonnax, un lieu de culture libre de toute contrainte institutionnelle locale ou régionale abritant aussi les expositions de son époux) et, évidemment, l’écriture, notamment la poésie qui lui venait naturellement parce que sa personnalité, riche, forte, complexe, lui commandait de toujours tendre vers l’équilibre entre la puissance de la sensation, du sentiment et le contrôle de l’expression. 

L’esprit de Colette était traversé de courants qui pouvaient paraître en apparence contradictoires eu égard à sa nature poétique (elle avait enseigné les mathématiques, elle avait été sportive de haut niveau) mais cela exprimait l’étendue de sa culture, de son humanisme et de son ouverture d’esprit. Elle se moquait gentiment de mon aversion pour le sport et riait beaucoup du récit de mes stratégies tortueuses pour échapper à cette discipline lorsque j’étais écolier, collégien et lycéen.

L’équilibre auquel aspirait Colette, dans sa vie comme dans sa poésie, charpente ses poèmes dans lesquels passent parfois les ombres de tragédies intimes mais elle avait à cœur de rester aussi discrète sur les douleurs de l’existence que diserte sur les bonheurs de la vie. Ses thèmes de prédilection sont la féminité, la lumière des jardins, la quête de la joie, le questionnement des grands mythes et l’énigme du sentiment amoureux à propos duquel je veux lui donner le dernier mot :

Homme,

îlot sombre et distrait,
dans ton palais de nuit
tu ne sais pas que l’on t’attend.
Front contre la vitre,
guetteuse éperdue,
sur le chemin de ronde
où traînent tous les désirs.
De la fenêtre vide
à la page solitaire,
un seul pas
pour aborder le champ-clos silencieux
où traînent tous les désirs.
Et l’âme enfermée
se brise aux coins durs
des ceintures de chasteté.

Femme,

Jambes nettes aux fortes racines,
bras de tes arbres
et feuilles drues de tes mains,
grappes et tresses de ton buste,
fleurs soudain fleuries
de ton visage
dressé à la rencontre des rêves ;
par eux tu connais la sève
saisonnière
jaillie de terre jusqu’au soleil.

Extrait de : Les Rêves du scorpion, éditions Orage-Lagune-Express, 1992.

 

Note : en plus de notre collaboration dans notre livre Le Pétrin de la foudre et Les Rêves du scorpion publié en 1992 avec des illustrations du peintre Gabriel Guy, j’ai eu le plaisir de contribuer avec l’appui technique de mon épouse Marie à l’édition d’un autre ouvrage de Colette intitulé Échecs et mat (éd. Orage-Lagune-Express, 1997). Ces deux livres sont disponibles à la médiathèque municipale d'Oyonnax, centre culturel Aragon.

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Exemplaire du tirage de tête numéroté et signé par les auteurs et l'artiste (comportant son illustration originale) de notre livre à deux voix illustré par Gabriel Guy

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Réception du livre chez l'imprimeur en 1992

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05 avril 2024

Carnet / Tartufferie culturelle 

carnet,note,journal,nouvelles du front,christian cottet-emard,politique,opinion,blog littéraire de Christian Cottet-Emard,chronique,opinion,tartuffe,tartufferieJe crois qu’il ne faut pas être dupe de cette frange de la classe politique actuelle qui, pour des raisons démagogiques, ne perd pas une occasion médiatique de prétendre goûter ce qui se fait (j’emploie ce verbe à dessein) dans les couches les plus basses de ce que produit l’industrie de la variété, en particulier de la chanson. 

Même s’il arrive que l’intérêt pour la culture littéraire, musicale et artistique d’une partie de ces gens n’atteigne pas celui d’un bachelier des années soixante (et encore, c’est se montrer généreux), je suis persuadé qu’en réalité, dans leur vie privée, beaucoup de nos gouvernants savent très bien profiter et faire profiter à leurs enfants de la vraie culture, celle qui élève par la beauté, pose question sur le monde et encourage à penser, à l’opposé de la sous-culture déversée au peuple comme du fourrage, celle qui enferme au lieu de libérer. 

Il fut un temps où les politiques cherchaient à rester discrets sur leur patrimoine financier alors qu’aujourd’hui, c’est sur leurs préférences culturelles qu’ils adoptent cette discrétion tant ils ont peur d’être qualifiés d’élitistes, tant il est crucial pour eux de laisser croire au peuple qu’ils sont comme lui et qu’ils aiment les mêmes choses que lui. 

Ils oublient qu’une partie de ce peuple goûte aussi la vraie culture et que l’affichage condescendant de leur soi-disant intérêt pour la soi-disant culture populaire (qui n’est en réalité même pas la culture populaire mais le produit de machines à cash que fait tourner l’industrie du divertissement bas de gamme et, ne l’oublions pas, l’industrie du luxe qui excelle dans la récupération et le recyclage de la médiocrité) cet affichage, dis-je, ne trompe que les naïfs. 

Il ne coûte pas grand effort à ces tartuffes de siffler une canette de bière médiocre dans des vestiaires ou de se polluer quelques minutes les oreilles avec de l’infra-langage sur fond de décibels car en réalité, dans leur vraie vie, ils ont leurs meilleures places réservées aux meilleurs spectacles.

13 mars 2024

Carnet / Des virevoltants

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Tumbleweed (virevoltant) : amas sphérique de plantes sèches coupées de leurs racines roulant au gré des vents.

 

L'actualité internationale très tendue que nous connaissons en ce moment nous montre à quel point il est inquiétant d'être gouvernés par des individus trop jeunes. La limite d'âge légale pour être président de la république et ministre (surtout premier ministre) devrait être comprise entre cinquante-cinq et soixante-quinze ans, ni plus jeune ni plus vieux.

 

Les électeurs qui se sont naïvement réjouis de la jeunesse de l'actuel président lorsqu'il est arrivé au pouvoir ont sans doute oublié que la jeunesse (comme la vieillesse) n'est pas une qualité mais un état. Aux plus hautes fonctions, celles qui requièrent sang-froid, mesure du langage et conscience du pouvoir des mots, la jeunesse n'est pas un atout, surtout dans les périodes de crise et tout particulièrement dans les moments de tensions internationales.

 

Le problème d'un dirigeant trop jeune est d'être, comme tous les jeunes, plus vulnérable à la blessure narcissique qu'un individu âgé, or rien n'est plus redoutable pour un individu (comme pour un groupe) que les conséquences de la blessure narcissique car celle-ci peut conduire toute personne qui en est la proie à réagir de manière irrationnelle voire, pire encore, à agir délibérément contre ses propres intérêts ou ceux de la collectivité s'il en est un leader. Au plus haut niveau de l'État, c'est effrayant. Bien sûr, la maturité ne protège pas totalement de la blessure narcissique mais elle permet de la relativiser et, pour les personnes les plus réfléchies, de la surmonter.

 

Ce qui peut aussi réguler les mécanismes aux conséquences dévastatrices qui s'enclenchent à la suite de la blessure narcissique à laquelle nous sommes tous exposés est la transmission, notamment avoir des enfants et vouloir leur transmettre quelque chose, un héritage moral, culturel ou matériel. Les liens du sang, lorsqu'ils sont sains, sont un excellent rempart contre les tentations destructrices et auto-destructrices consécutives à la blessure narcissique. Plus question de penser « après moi le déluge » lorsqu'on a une descendance. Or nos plus hauts dirigeants politiques actuels sont non seulement trop jeunes mais encore n'ont pas d'enfants, ce qui est bien sûr leur droit mais ce qui les conduit à entretenir un rapport au monde radicalement différent de celui de l'écrasante majorité de leurs administrés.

 

L'âge apporte du recul, y compris vis-à-vis de soi-même. La descendance donne une conscience étendue des racines, celles auxquelles puise l'individu et celles qu'il crée pour sa succession. Or nous sommes gouvernés par des individus de plus en plus jeunes, de moins en moins enracinés et donc de plus en plus éloignés de la réalité et du monde de leurs administrés. Nos « élites » sont composées d'éternels adolescents qui n'ont que l'intelligence de la gestion et de la technocratie mais qui n'ont pas la stature pour gouverner parce qu'ils sont inexpérimentés, capricieux, susceptibles et narcissiques, donc dangereux.

 

Il n'est pas aujourd'hui un seul grand chantier de la société où nos actuels dirigeants ne travaillent pas ouvertement contre les désirs, espoirs et revendications populaires (le gouvernement ne veut pas limiter et contrôler l'immigration issue de pays aux cultures opposées et incompatibles, refuse de rétablir les frontières, ne veut plus de petits agriculteurs, de petits commerçants, de petits propriétaires alors que le projet d'une vie est précisément celui d'accéder à la propriété, rejette les traditions locales cultuelles et culturelles, s'oppose à la famille qui est le dernier cercle de résistance à la collectivité quand celle-ci se fait oppressive et il combat l'idée de souveraineté nationale dans tous les domaines économiques et politiques où son rétablissement est demandé).

 

Voici les deux citations qui me semblent le mieux qualifier la nature de nos gouvernants actuels et leur action :

« Malheur à toi, pays dont le roi est un enfant » (Ecclésiaste).

« Il faut que tout change pour que rien ne change » (Giuseppe Tomasi di Lampedusa, Le Guépard).

Et s'il fallait une image pour emblème de ces dirigeants, notamment le président, celle du tumbleweed (virevoltant) me paraît la plus tristement évocatrice.