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23 janvier 2016

Carnet / Des notes en désordre et d’un tueur lent

Lueurs incertaines des jours et des nuits. Les samares, fruits secs des frênes avec une seule aile dont les amas bruns évoquent des trousseaux de clefs, continuent de pendre aux branches en hiver. Par temps de givre, ils grésillent au moindre souffle d’air. Au redoux, le vent les agite et les frênes ont l’air de chuchoter entre eux mais je suis arrivé à un âge où je sais désormais que, comme les humains, ils n’ont pas grand-chose à se dire. carnet,note,journal,autobiographie,écriture de soi,prairie journal,blog littéraire de christian cottet-emard,littérature,états d'âme,sentiments,christian cottet-emard,destin,campagne,maison,frêne,samare,fruit,hiver,givre,redoux,arbre,nature,contemplation,retrait,vie intérieure,saudade,lisbonne

Difficultés avec la technique, l’habileté manuelle, les calculs élémentaires, l’esprit pratique. Ce sont ces manques qui m’ont poussé à choisir l’écriture au lieu de la musique ou de la peinture. Mais je travaille tous les jours à accepter cette incapacité, cette limite, et même à aimer cette incompétence puisqu’elle est malgré tout ma vie. Je connais d’ailleurs tant d’individus doués de talents variés et multiples qui ont une existence mille fois moins douillette et facile que la mienne.

Tous ces gens qui aiment souffrir au nom de grands principes et de belles idées, ils me fatiguent. Je suis las d’assister au cortège de leurs mortifications, à l’accélération de leur course au néant.

Mon destin ne consiste peut-être en rien d’autre qu’à vivre dans cette maison au milieu de la campagne et à ne pas participer, même au plus humble niveau, à ce à quoi participent les gens dits normaux. « Certains plantent, d’autres récoltent » ai-je souvent entendu dire quand j’étais enfant. Alors sans doute mon destin est-il d’habiter cette maison, cette campagne, ce lieu tant désiré et si difficilement obtenu par mon défunt père, et de me contenter d’y vivre facilement, à ma mesure, oublié de celles et ceux qui ont tenté de me comprendre sans y parvenir puis qui se sont éloignés faute de mieux parce qu’aucun autre choix n’était possible, ni pour eux ni pour moi.

Parfois dans la rue, des visages d’anges et, derrière, des paquets de névroses, une batterie de vieilles gamelles psychologiques qui s’entrechoquent dans le chaos.

Un jour, je vais finir par devenir le personnage secondaire d’une fiction impubliable.

Ce qu’on nomme aujourd’hui « musique » et « poésie » , si c’était autre chose ?

La plupart du temps, nous ne nous apercevons pas que nous vivons un moment fort de notre existence. Quand nous en prenons conscience, il est déjà trop tard pour le vivre encore mieux. Ce n’est déjà plus qu’un souvenir, un fantôme hyperactif qui ne nous laissera plus de répit.

Le chagrin est un tueur lent.

Photo CC-E

 

31 octobre 2015

Carnet / D’un inconvénient de la mémoire

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La chatte Linette les a évidemment repérées mais elles se sont positionnées suffisamment en hauteur pour être inaccessibles. Tous les jours, Linette étudie le problème sans succès parce qu’elle ne se souvient pas de son échec de la veille, alors elle passe à autre chose et se rabat vers des buts à sa portée. Du coup, les deux vespertilions vivent tranquilles et Linette ne déprime pas pour si peu.

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Voilà qui me donne à réfléchir sur mon propre cas mais en l’occurrence, ma mémoire est un handicap puisque contrairement à Linette, le souvenir de mes échecs ne me quitte pas. Avec la chatte Linette et les deux chauves-souris, je me trouve donc en présence de deux modestes espèces animales qui se débrouillent mieux que moi dans le monde et dans la vie. 

06 septembre 2015

De natura rerum

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En ce jour qui n’est plus l’été et pas encore l’automne la nature à l’affût pour dévorer tout cru un petit poète romantique

 

Mais le petit poète romantique sait quand même ouvrir l’œil quand il se balade dans la campagne aussi gracieuse que pragmatique car il est une partie de la nature comme l’amoureux est une partie de l’amour

 

De cet équilibre de la terreur peuvent naître de jolis poèmes diaprés des couleurs de l’aube et du couchant qui sont un même crépuscule ainsi que quelques plaintes plus ou moins philosophiques

 

Cela ne change rien à la beauté absurde du paysage

 

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