20 décembre 2015
Les ennemis du poète
La plupart des ennemis du poète sont de passage
Ils font souche ou carrière ou roulent poussés par le vent comme des amas de brindilles et de racines coupées et sont contraints de subsister un certain temps en ces contrées paisibles qu’ils veulent changer comme ils veulent te changer toi aussi
Naturellement ils se cassent vite les dents à cette tâche et repartent un beau jour un très beau jour lassés et furieux non sans avoir cependant provoqué quelques dégâts
De leur défaite et des dégâts qu’ils ont causés ils conçoivent une nostalgie et les voici sans cesse revenant sous ces cieux qu’ils ont voulu changer mais qui les ont changés
Et toi toujours pareil à toi-même comme ce pays est toujours pareil à lui-même il t’arrive parfois de les apercevoir au détour d’une rue ombreuse et déserte du dimanche soir
Et tu t’arrêtes un instant pour les voir passer comme on s’assoit au bord du fleuve à regarder glisser les corps des ennemis du poète bercés par l’onde
© Éditions Orage-Lagune-Express 2015. Photo et retouche Christian Cottet-Emard.
29 janvier 2015
Comme une ombre heureuse dans le temps des images
À ce que j’étais peut-être avant de prendre corps (quelque amas de poussière sans conscience en suspension dans un recoin de l’univers) il fut écrit
« Va sur Terre en ce corps qui t’échoit et ne le fatigue pas trop
Va sur Terre un moment et regarde le spectacle auquel tu es convié mais ne monte pas sur scène tu n’es pas là pour agir
Tu n’es là que pour contempler car tu es assemblé de telle sorte que tu ne puisses rien faire d’autre
Rien d’autre que te promener et passer comme une ombre heureuse dans le temps des images »
© Éditions Orage-Lagune-Express, 2014
18:55 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vidéo, littérature, poésie, texte, image, ombre, corps, terre, poussière, univers, conscience, contemplation, spectateur, regard, blog littéraire de christian cottet-emard, récit des lisières, estime-toi heureux, christian cottet-emard
13 juillet 2014
Carnet / De l'été pourri, des fêtes qui sonnent faux et d'un passereau qui s'en sort
Tout récemment lors d’une brève éclaircie, un passereau s’est cogné contre la fenêtre en voulant gober un insecte. Je suis sorti pour le retrouver probablement mort en bas des marches et j’ai fini par le localiser au milieu des herbes détrempées. J’ai vu ses yeux révulsés mais sa petite tête qui dodelinait faiblement m’a encouragé à l’envelopper dans un mouchoir en papier pour ne pas l’imprégner de mon odeur et à le déposer sur le bord de la fenêtre. Il est resté là sous cette couverture improvisée et, au bout d’un long moment, il s’est dressé sur ses pattes et s’est envolé dans les frênes. Je n’ai pas pu identifier son espèce. En tous cas, ce n’était pas un bouvreuil comme la dernière fois. J’ignore s’il s’en est sorti (son cœur n’a peut-être pas tenu le choc et il est peut-être allé mourir un peu plus loin) mais l’espoir est permis.
Photo : premiers brouillards d'automne ? Non. Début de soirée estivale devant ma maison vers 19h ces derniers jours ! Impressionnant non ?
Le jour suivant, un gros lièvre a tranquillement traversé la pelouse devant la baie vitrée pendant que je prenais mon petit déjeuner. J’ai aussi surpris le renard à deux reprises vers deux heures du matin pendant que je me tenais immobile dehors devant l’entrée de la maison. Un autre soir pluvieux, j’ai eu la surprise de repérer un ver luisant à quelques mètres de la porte d’entrée. J’ai cru qu’il s’agissait d’un reflet dans une goutte d’eau mais non, c’était bien un ver luisant qui maintenait allumé son minuscule lampion vert bleuté dans l’espoir têtu de vivre une idylle quelle que soit la météo.
Durant la semaine qui a précédé ce week-end j’ai retrouvé, dans la pénombre de ces jours qui devraient rayonner de lumière, les gestes de l’hiver. J’ai vidé les dernières cendres que j’avais oubliées dans la cheminée en pensant que la prochaine flambée serait pour un soir d’automne et, deux soirs de suite, j’ai allumé un feu tant les averses et le brouillard avaient enveloppé la maison d’une froide humidité. Il fait si mauvais que la chatte Linette a trouvé moyen de s'enrhumer à force de chasser dans les foins mouillés.
Ma seule (et maigre) consolation en ce ténébreux juillet est de voir (de loin) toutes les sinistres et minables kermesses organisées à grand renfort de banderoles et de sonorisations ineptes autour du vélo national emportées comme l’eau sale dans l’évier. Je ne vais pas me rendre sympathique en écrivant cela mais de toute façon, je n’ai jamais de ma vie écrit une ligne pour être bien vu (même quand j’étais payé pour « rendre hommage au dévouement des bénévoles » sans qui aucun bilan ne saurait être qualifié de « globalement positif » . Je ne vais pas commencer à cinquante-quatre ans !
19:22 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : été, été pourri, météo, prairie journal, carnet, note, écriture de soi, passereau, fête, kermesse, ballon, vélo, tour de france, pluie, brouillard, juillet, état d'âme, lièvre, renard, félin, blog littéraire de christian cottet-emard, ver luisant, lampion, idylle, goutte d'eau, évier, bilan, dévouement, bénévole, vie associative, association, automne, hiver, lumière, obscurité, ombre, ténèbres