Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

30 juillet 2019

Carnet / Prisonnier du roman (2)

prisonnier du roman, littérature, roman, blog littéraire de christian cottet-emard, fiction, barcelone, espagne, voyage, portrait, chantier romanesque, histoire, intrigue, rêverie, christian cottet-emard, femme au chapeau rouge, peinture, art de rue, carnet, note, journal, écriture,piquets de bois,chevaux,clôture,voix,vieux disque,grenier

En donnant un petit coup de main à une amie propriétaire de chevaux pour planter des piquets de bois, je pensais aux premiers travaux que requiert le roman.

 

On délimite un espace géographique, temporel, et on attend ce qui va se passer à l’intérieur. Ce n’est que bien après qu’on écrit. Avant, il faut taper fort pour enfoncer les piquets, sinon, la clôture ne tient pas et la « scène » du roman disparaît dans la nature avec tout ce qu’elle devait contenir.

 

C’est ce qui me faisait affirmer dans un texte plus ancien que le roman, à l’inverse de la nouvelle réclamant spontanéité, rapidité et précision, demande un labeur rustique, une forme de boulot, de lourd turbin certes nécessaire mais qui n’est pas dans ma principale conception de l’écriture.

 

Le plus intéressant ne vient qu’après, lorsque l’auteur peut enfin apporter sa petite musique, celle qui donnera peut-être à son histoire mille fois racontée par d’autres la sensation d’une voix sinon unique, au moins particulière, comme celle gravée sur un vieux disque retrouvé dans un grenier de la toute relative éternité humaine.

prisonnier du roman,littérature,roman,blog littéraire de christian cottet-emard,fiction,barcelone,espagne,voyage,portrait,chantier romanesque,histoire,intrigue,rêverie,christian cottet-emard,femme au chapeau rouge,peinture,art de rue,carnet,note,journal,écriture,piquets de bois,chevaux,clôture,voix,vieux disque,grenier

Photo 2 : Musée du Fado à Lisbonne (photo Christian Cottet-Emard)

10 juillet 2019

Carnet / Des Lusiades de Camões, de Message de Pessoa et de l'Occident

carnet,note,journal,billet,blog littéraire de christian cottet-emard,littérature,poésie,épopée,roman,message,fernando pessoa,josé corti,pour isabel,un mandala,antonio tabucchi,folio,gallimard,les lusiades,luis vaz de camões,poésie gallimard,christian cottet-emard,hyacinthe garin,vasco graça moura,eduardo lourenço,bernard comment,josé augusto seabra,bernard sesé,france,italie,portugal,occident,âme atlantiquecarnet,note,journal,billet,blog littéraire de christian cottet-emard,littérature,poésie,épopée,roman,message,fernando pessoa,josé corti,pour isabel,un mandala,antonio tabucchi,folio,gallimard,les lusiades,luis vaz de camões,poésie gallimard,christian cottet-emard,hyacinthe garin,vasco graça moura,eduardo lourenço,bernard comment,josé augusto seabra,bernard sesé,france,italie,portugal,occident,âme atlantique

Pessoa                                       Camões                                    

Les Lusiades de Luis Vaz de Camões et Message de Fernando Pessoa sont à mes yeux les deux grandes épopées occidentales.

Je conseille la lecture en français du grand œuvre de Camões dans l’édition Poésie/Gallimard avec la traduction et la préface de Hyacinthe Garin et une préface de Vasco Graça Moura. La traduction en alexandrins rimés permet une lecture aisée.

Pour Message de Pessoa, je me réfère à l’édition établie à l’enseigne de José Corti avec la préface de José Augusto Seabra et la traduction de Bernard Sesé.

Dans son roman à la publication posthume Pour Isabel sous-titré Un mandala, Antonio Tabucchi fait dire à un des personnages évoquant des années de lycée à l’époque où le Portugal avait encore des colonies : on y divisait en morceaux stupides le poème national Les Lusiades, qui est un beau poème de mer, mais qui était étudié comme s’il s’agissait d’une bataille africaine.

Je pense qu’il ne faut bien sûr pas lire Les Lusiades comme s’il s’agissait seulement d’une bataille africaine mais les lire comme un simple beau poème de mer serait tout aussi réducteur.

Plus je lis et relis les Lusiades de Camões publiées en 1572 et Message de Pessoa sorti en 1934, plus je mesure la puissance du lien entre ces deux épopées. L'une est dans l'espace et l'autre dans le temps. Ces deux œuvres débordent largement du cadre national portugais.

Pour le lecteur moyen du 21ème siècle que je suis, elles irriguent ma réflexion sur la renaissance de l’idéal occidental que j’appelle de mes vœux. À plus de trois siècles et demi de distance, les Lusiades et Message sont des balises, des repères dans ce cheminement vers le nécessaire renouveau de l’Occident.

 

06 juillet 2019

Carnet / Petit feuilleton de ma relecture du Guépard. Premier épisode.

carnet,note,journal,lecture,littérature,roman,littérature italienne,feuilleton,carnet de lecture,le guépard,Giuseppe Tomasi di Lampedusa,italie,blog littéraire de christian cottet-emard,crime et châtiment,Dostoïevski,mémoires d'outre-tombe,chateaubriand,hölderlin,là ou croît le péril croît aussi ce qui sauve,citation,christian cottet-emard,film le guépard,luchino visconti,burt lancaster,claudia cardinale,alain delon,serge reggiani,acteurs,actrices

Ces dernières semaines, j’ai consacré beaucoup de temps à ma relecture attentive du Guépard de Giuseppe Tomasi di Lampedusa. Je crois pouvoir affirmer aujourd’hui, à l’âge de cinquante-neuf ans, que dans la multitude de romans dont je me suis nourri pendant toutes ces décennies, je ne vois rien de supérieur à ce livre présenté comme le chef-d’œuvre de la littérature italienne mais qui est à mes yeux le chef-d’œuvre de la littérature européenne.

Ma première lecture du Guépard remontant à l’époque de mes seize ans, j’ai ressenti la nécessité de relire le livre après avoir vu à plusieurs reprises l’adaptation cinématographique de Luchino Visconti. Ce film est aussi un chef-d’œuvre qui peut faciliter l’accès au roman.

Entre mes quinze et seize ans, j’avais tendance à lire un peu au-dessus de mes moyens, non pas parce que j’étais plus bête qu’un autre mais parce que j’avais les yeux plus grands que le ventre et qu’il me manquait de la maturité, du vécu et des références culturelles de tous ordres pour accéder à toutes les entrées et à tous les niveaux d’œuvres qui sont aussi des mondes.

En ces mêmes années, je m’attaquai donc sans complexe à Crime et Châtiment de Dostoïevski parce que je croyais qu’il s’agissait d’un livre romantique (!) aux Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand parce que j’avais appris que Victor Hugo, mon idole de l’époque, avait déclaré à l’âge de quatorze ans Je veux être Chateaubriand ou rien et au Guépard de Lampedusa parce que j’étais fasciné par la prodigieuse capacité d’une classe sociale à transmettre ses biens les plus précieux (les terres, les maisons, les meubles, l’oisiveté et le dilettantisme) à ses descendants pendant des siècles.

Le premier enseignement de ces lectures ardues pour un très jeune homme se traduisit par la prise de conscience de mes approches fautives et futiles, ce qui en augmenta le bénéfice dès lors que j’en découvris, certes partiellement, les enjeux et les thèmes véritables.

Je compris aussi que j’allais devoir de nouveau prendre rendez-vous de manière plus ou moins tardive pour une visite plus fine et plus éclairée de ces monuments littéraires, ce que je fis au gré de mes évolutions et au fil des années.

Que le deuxième rendez-vous le plus tardif soit avec Le Guépard ne relève pas du hasard à un moment de ma vie et dans un contexte où les questions d’identité, de racines et de transmission connaissent un regain d’actualité pour le meilleur et pour le pire. Par parenthèse, Hölderlin ne sera pas de trop sur ce dernier point (Là ou croît le péril, croît aussi ce qui sauve).

Il me fallait bien cette deuxième lecture du Guépard à un âge plus approprié. Que pouvait comprendre un garçon de seize ans à la mélancolie d’un homme au destin accompli, à la fois nonchalant et fougueux, rêveur et lucide qui voit approcher, de plus en plus pressantes, les ombres du crépuscule, qu’il s’agisse du soir ou du matin ?

(À suivre)