Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

02 avril 2020

Demi-sommeil

(Extrait d'un roman en chantier)

chantier en cours,roman,enseigne de vaisseau mhorn,christian cottet-emard,marius le bernois,mariana,blog littéraire de christian cottet-emard,littérature,roman,atelier,écriture,narration,pistolet makarov,arme de poing,arme à feu,brocante,marine marchande,apparition,demi-sommeil,rêve

Photo Christian Cottet-Emard

Mhorn n’attachait guère d’importance à ses rêves nocturnes car il était gouverné par ceux qu’il concevait bien éveillé chaque jour depuis qu’il était conscient d’être au monde mais celui de la nuit dernière ne cessait de le tourmenter. Quelle était cette apparition qui l’avait questionné sur l’attitude de son ami Marius lorsque celui-ci avait été tenté de frapper le voyou à terre ? Pourquoi cette même apparition s’était-elle manifestée sous la forme de Marius en sa jeunesse ? Pourquoi Mhorn eût été effrayé si l’apparition avait revêtu une autre forme et laquelle ?

Ce rêve ouvrait une porte qui ne menait que dans un couloir obscur barré par une autre porte. Telle est ma vie et celle de tout le monde, pensa-t-il. Une fois de plus, il se vit incapable de rejeter ces considérations dans le néant parce que, telles des nuées de pipistrelles dérangées, elles retournèrent nicher dans un coin de son esprit où s’entassaient des rebuts, comme dans le fourgon de brocante de son ami. Parmi tout ce fatras, gisaient les breloques de la jeunesse, les photos et les vieilles lettres d’amour qui n’auraient même pas besoin d’être fixées sur du papier pour mettre une éternité à jaunir et à s’effacer, en tous cas bien plus de temps qu’il n’en faut à une vie humaine pour accomplir son cycle.

Dans leur trentaine, Mhorn et le Bernois avaient aimé la même femme, une mésaventure banale qui avait failli tout aussi banalement détruire leur amitié. Lasse de cette rivalité qu’elle jugeait archaïque, machiste et petite bourgeoise, Mariana avait résolu le problème en partant avec quelqu’un autre. L’amitié s’en était ainsi trouvée préservée mais avaient-ils gagné au change ?

Ils avaient pris leurs distances au gré de leurs activités professionnelles, le Bernois dans la brocante et Mhorn dans la marine marchande pendant quelques années durant lesquelles son caractère rugueux et son maintien un peu rigide lui avait valu le surnom ironique d’enseigne de vaisseau. Il avait beau s’être ingénié à échapper au service militaire, ce surnom l’avait poursuivi au point que la plupart de ses anciens collègues et compagnons de boisson l’appelaient toujours l’enseigne de vaisseau Mhorn quand ils parlaient de lui et plus familièrement l’enseigne quand ils le rencontraient.

Maintenant, après ce fameux rêve, Mhorn repensait aux souffrances endurées à cause de cet amour raté. Ces tourments avaient atteint leur paroxysme le jour où quelques affaires douteuses lui avaient amené dans les mains son Makarov en parfait état de fonctionnement pour une arme aussi ancienne. Après l’avoir démonté, nettoyé et entretenu, il l’avait essayé en tirant sur des plaques de tôles dans une décharge sauvage. Les impacts donnaient une idée du résultat sur un corps humain et il s’était dit qu’il pourrait toujours s’en servir pour se brûler la cervelle s’il venait à souffrir encore plus mais au même instant, il eut honte de cette idée ridicule. 

chantier en cours,roman,enseigne de vaisseau mhorn,christian cottet-emard,marius le bernois,mariana,blog littéraire de christian cottet-emard,littérature,atelier,écriture,narration,pistolet makarov,arme de poing,arme à feu,brocante,marine marchande,apparition,demi-sommeil,rêveCurieusement, le fait de porter en permanence cette arme sur lui avait émoussé son chagrin, même si la blessure n’était pas cicatrisée, comme si au milieu d’une partie de carte lugubre où il perdait tout le temps, il avait un peu repris la main.

 

 

© Club 2020 

 

01 avril 2020

Ceci n'est pas une vespasienne

 

blog littéraire de christian cottet-emard,premier avril,poisson d'avril,sardine,lisbonne,portugal,vespasienne,photo,blague,humour

 

31 mars 2020

Nouvelle / La déroute des uhlans

nouvelle,éditions orage lagune express,blog littéraire de christian cottet-emard,littérature,fiction,© orage lagune express,christian cottet-emard,fiction brève,uhlans,cavalier noir,petits soldats,office notarial,étude,enfance,droits réservés,dépôt juridique,dépôt légal,lancier,fantassin,infanterie,cavalerie,bataille

Cette fois, la terreur, la désolation, le chaos et la mort étaient à nos portes. On avait signalé les uhlans à quelques encablures. C’était la fin. On ne sortirait plus des ténèbres. On entendait des clameurs, des cris, les galops et les hennissements de leurs chevaux. Le vacarme emplissait la nuit.

Une ombre envahit d’un seul coup le mur en face de moi, un cheval qui se cabrait, et son cavalier avec sa lance. Puis une longue plainte, déchirante, les sanglots, les gémissements de qui a perdu tout espoir et puis, subitement, plus rien. Le silence.

Je me redressai et je vis le château encore debout. De nombreux combattants encombrés de leurs cuirasses gisaient comme des tortues qu’on aurait retournées sur leurs carapaces. Le seul rescapé était le grand cavalier noir.

La longue plainte reprit, plus désespérée, plus lugubre, comme si les voix des victimes des uhlans se joignaient en un choeur funèbre ultime.     

Malgré leur férocité, les uhlans n’avaient pas pu venir à bout du cavalier noir qui les avait tous mis en pièces.

J'avais fini par l'obtenir après les devoirs de vacances du jour, l’arrosage du jardin, le balayage des feuilles mortes dans la cour, le rangement de la vaisselle et pas une seule défaillance dans le lavage des mains avant et après le repas (petit déjeuner compris), avant d’aller aux toilettes et avant d’en sortir, moyennant quoi j’avais enfin pu incorporer le cavalier noir en renfort à mon armée de fantassins en plastique.

© Éditions Orage-Lagune-Express