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04 février 2016

Jeune mère de famille occidentale en proie au spleen à la fenêtre de son bureau

estime-toi heureux©,poèmes,poésie narrative,portrait,blog littéraire de christian cottet-emard,éditions orage lagune express,droits réservés,christian cottet-emard,mère de famille,spleen,occident,bureau,fleuve,prince charmant,relations humaines,sentiments,frustrations,tristesse,désenchantement,contradictions insurmontables,chimèresElle voudrait que son mari sportif l’accompagne au théâtre et à l’opéra

Que son amant intello l’accompagne au sport

Que son jeune amant s’habille plus classe et soit plus attentionné

Que son vieil amant s’habille plus décontracté et soit moins sentimental

Que son amant classique soit un peu rock

Que son amant rock soit un peu classique

Que son amant qui apporte des fleurs pense aussi au vase

Que son amant qui lui offre un vase pense aussi aux fleurs

Que son amant physique soit plus cérébral

Que son amant cérébral soit plus physique

Que son ami soit moins amoureux

Que son amant soit plus amical

Elle voudrait un peu d’orient dans l’occident et de l’occident dans l’orient

Depuis la fenêtre de son bureau de jeune femme cultivée professionnelle performante bonne mère de famille et talentueuse amante elle voit le fleuve qui charrie des cadavres de princes charmants

 

© Éditions Orage-Lagune-Express 2015

 Photo CC-E

 

01 février 2016

Navigation à vue

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À la sortie du ventre de ma mère on n’a pas tardé à me faire comprendre que je serai à la manœuvre plus tôt que je ne pouvais le croire

J’ai vite quitté la cale où la situation n’était pas nette pas claire et j’ai grimpé dans les cordages près des voiles qui faisaient une excellente cabane bien aérée

Pour tenter de faire bonne figure sur le pont je me suis coiffé d’une casquette de capitaine mais elle ne m’allait pas du tout et d’ailleurs elle s’est envolée à la première brise

Ce qui n’a pas empêché les voiles de se gonfler et de pousser le navire vers la ligne d’horizon aussi courbe qu’une femme enceinte en train de faire la sieste

Qu’importe

Puisque la ligne d’horizon n’est ni une ligne ni un horizon

 

© Ed. Orage-Lagune-Express

 

28 janvier 2016

Carnet / De la logique, de l’orgue, du vent et de la tentation d’exil

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Une amie au téléphone : « pourquoi une telle passion pour l’orgue ? »carnet,note,journal,autobiographie,écriture de soi,prairie journal,orgue,vent,logique,christian cottet-emard,nantua,ain,rhône-alpes,france,europe,blog littéraire de christian cottet-emard,nicolas antoine lété,facteur d'orgue,louis vierne,berceuse,joseph de bassompierre,groissiat,haut-bugey,abbatiale saint michel de nantua,site clunisien,campagne,forêt,vosges,mirecourt,organiste,philippe lefebvre,robert schumann,six fugues sur le nom de bach,musique,lisbonne,portugal Je n’ai pas su répondre avec précision mais en y réfléchissant un peu plus tard, je crois que la réponse est dans un souvenir.

Dans mon jeune âge, je venais de découvrir l’orgue de Nantua et j’avais fait la connaissance de son titulaire de l’époque, Joseph de Bassompierre. Après l’avoir écouté en répétition dans l’abbatiale Saint-Michel, je l’avais accompagné chez lui à Groissiat où il m’avait joué la Berceuse de Louis Vierne au piano dans son salon. La fenêtre était grande ouverte sur une somptueuse journée d’été et je voyais au loin onduler les foins sous une brise soutenue. C’est alors qu’une association d’idée entre la houle des foins et le rythme de la musique de Vierne s’est imposée à mon esprit. Joseph jouait au piano mais curieusement, mon oreille transposait à l’orgue. De retour chez moi, j’ai cherché la Berceuse de Vierne dans ma discothèque et je l’ai de nouveau écoutée en contemplant l’ample balancement des feuillages dans la brise d’été.

Depuis ces deux épisodes, je n’ai jamais cessé d’associer l’orgue aux mouvements du vent, ce qui est logique puisque la musique d’orgue, c’est de l’air qui passe dans des tuyaux. Lorsque je me promène en forêt les jours de grand vent, j’entends des sons d’orgue et lorsque j’écoute des œuvres d’orgue, je rêve au vent dans les arbres et dans les champs. Les orgues sont le plus souvent dans les églises dont les piliers et les voûtes évoquent évidemment la forêt. Tout cela est intimement lié dans mon esprit, surtout en ce qui concerne l’orgue de Nantua qui a été construit en 1845 à Mirecourt dans les Vosges (pays de forêts) par le facteur Nicolas-Antoine Lété. Nantua dans l’Ain est aussi en région forestière.

La restauration de l’orgue de Nantua n’est pas encore commencée que sa voix me manque déjà. Heureusement, je possède les disques enregistrés sur cet instrument exceptionnel, notamment l’œuvre pour orgue de Robert Schumann interprétée par Philippe Lefebvre. Les enregistrements ont été réalisés du 6 au 8 janvier 1976 mais je n’ai découvert cette musique que plusieurs années plus tard, en particulier les Six fugues sur le nom de Bach opus 60 auxquelles je ne cesse de revenir. Ces dernières semaines, je m’en imprègne le jour et parfois la nuit. L’œuvre m’accompagne bien sûr depuis des décennies, comme le son unique de l’orgue de Nantua.

Chaque fois que j’envisage de m’installer à Lisbonne par goût pour cette ville et ce pays mais aussi par lassitude et crainte d’une France qui peine à réagir face à l'ennemi et qui ne semble parfois plus gouvernée, j’imagine tout de même avec perplexité quelle vie serait là-bas la mienne loin de ce repère essentiel qu’est pour moi cet orgue, dans cette abbatiale qui est aussi le centre et le point névralgique de plusieurs moments décisifs de mon existence. Pour mon dernier voyage, le moment venu, il ne me déplairait pas de partir de là-bas si cela n’était pas trop compliqué pour mes proches.

Photo : orgue à Lisbonne © CC-E