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18 avril 2020

Carnet / Zorro

 

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Les rediffusions télévisées de Zorro ne me laissent jamais indifférent.

Mon regard sur les épisodes de cette série n’est évidemment plus celui de l’enfant que j’étais dans les années soixante du siècle dernier. Aujourd’hui, je suis plutôt amusé de comprendre pourquoi je me retrouvais scotché devant le petit écran dès que le cavalier surgissait hors de la nuit.

Zorro était vraiment le héros de mon enfance. Son personnage dont je portais la panoplie était de tous mes jeux lorsque je ne lisais pas. Sa silhouette noire se faufilait aussi bien dans mes activités de plein air que dans ma consommation de littérature de cape et d’épée. J’étais déjà allergique au sport, aux jeux de société et aux jeux de construction, au grand désespoir de mon père qui voyait là de mauvais présages concernant mon avenir. Il n’avait pas entièrement tort. Peut-être aurait-il au moins pu se réjouir de voir son fils admirer un héros positif, un justicier, un défenseur de la veuve et de l'orphelin. Même pas.

Je n’étais pas fasciné par Zorro parce qu’il défendait le bien mais parce qu’il se déplaçait armé dans des passages secrets entre son hacienda qu’il habitait sous son vrai nom, Don Diego de la Vega, et son repaire, de quoi faire le miel d’un gamin ombrageux qui aimait s’éclipser. Pour ce genre d’enfant, rien de mieux que de ressembler à une ombre grâce à une grande cape, un chapeau large, un masque et un cheval noirs (appelé Tornado) galopant dans un crépuscule permanent !

Tous les épisodes de Zorro se caractérisent par des ambiances nocturnes et crépusculaires, même dans les scènes d’extérieur jour baignées de très forts contrastes. Cette lumière entre chien et loup est aussi prégnante dans les épisodes en noir et blanc que dans ceux qui ont été colorisés.

Comme mon terrain de jeux du boulevard Dupuy à Oyonnax était vaste et sécurisé, j’avais l’autorisation de jouer assez tard dehors, dans le calme à peine troublé par le bruit sourd des machines rythmant les longues journées de travail des adultes confinés dans les ateliers de lunetterie, de maroquinerie en vinyle et d’injection de matières plastiques jouxtant leurs grandes maisons arborées. Une ambiance idéale pour revivre en solitaire, à l’approche du couchant, déguisé de la tête aux pieds, les aventures et les passes d’armes de celui qui signe son nom à la pointe de l’épée, d’un Z qui veut dire Zorro !

La plupart des épisodes de Zorro sont riches de scènes d’action, de poursuites, de cavalcades et d’escarmouches où l’on croise le fer mais il en existe tout de même quelques-uns plus légers, moins bagarreurs, parfois un peu humoristiques.

Ceux-là me décevaient beaucoup, surtout lorsque le scénario intégrait une chansonnette poussée à la taverne en compagnie du sergent Demetrio López Garcia ou bien pire, une ébauche de romance entre Zorro et la belle Anna Maria Verdugo, amoureuse du héros dont elle ignore la véritable identité, celle de Don Diego de la Vega quant à lui réduit à taire son sentiment réciproque pour continuer ses activités héroïques.

Tel est le drame de la double vie du doux et dilettante Don Diego de la Vega alias Zorro, vaillant redresseur de torts. L’un et l’autre se retrouvent bêtement à deux rivaux dans un même corps, ce qui a pour pénible effet de les priver de celui de la femme qu’ils convoitent ! Mais à l’âge où je vibrais aux aventures de Zorro, ce dilemme amoureux me laissait évidemment de marbre.

Je me souviens d’un épisode visionné chez ma grand-mère dans lequel Zorro et la belle qu’il vient de sauver échangent un baiser furtif. À cette époque, les petits garçons réagissaient à peu près tous de la même manière navrée à ce genre de scène : « Ça y est, ça s’embrasse ! »

Alors, quand Zorro avait des faiblesses, j’allais voir chez les Trois mousquetaires, Ivanhoé et Robin des bois. Les héros ne sont-ils pas interchangeables ? Et puis, il y a ce vieux proverbe qui les a très vite corrodés dans mon esprit: plus l’oiseau est brave, plus le chat est gras...

 

17 avril 2020

Carnet / Du roman de l’enfance

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Le récit autobiographique d’enfance et de jeunesse est la peau de banane que l’auteur dépose lui-même sous son pied, surtout si l’auteur en question n’a pas publié quinze romans à succès chez Galligrasseuil et, circonstance aggravante, s’il raconte des épisodes heureux.

Je me suis donc autocensuré pendant des décennies jusqu’au jour où, surpris d’atteindre ma sixième, j’ai réalisé qu’en matière d’édition, je n’étais plus soumis à l’obligation de résultat et que je pouvais donc désormais écrire et publier tout ce qui me passait par la tête, en particulier ces fameux souvenirs d’enfance réputés n’intéresser personne.

J’ai commencé à mettre en ligne sur ce blog un extrait du recueil dans lequel je décrivais l’environnement de mon enfance, ce qui m’a valu le commentaire émouvant d’un photographe que je connaissais un peu mais qui ne faisait pas partie de mon cercle d’amis proches. Il m’expliquait qu’il n’avait pas eu la même enfance que la mienne mais que le texte l’avait beaucoup touché. (On peut le lire aussi dans le premier tome de mes carnets, Prairie Journal, page 428).

Cette réaction inattendue m’a été non seulement agréable mais encore et surtout utile car elle a réveillé en moi une vieille intuition : l’enfance, souvent plus que toute autre période de la vie, est un roman, non pas parce qu’elle peut être romancée au moyen de libertés prises avec la vérité mais parce que son récit s’organise comme celui d’une fiction. C’est sans doute principalement pour cette raison que mon commentateur photographe a pu s’intéresser à l’épisode que je racontais et, de manière secondaire, parce qu’il n’a pas eu la même enfance que la mienne.

Le récit autobiographique d’enfance a bien des raisons propres à chacun de nous toucher s’il est bien écrit. L’une de celles qui me portent le plus vers ce genre est la plongée en ce passé à la fois proche et lointain où l’on observait le monde avant d’avoir compris que le corps est la prison, l’esprit le geôlier et les rêves et désirs les prisonniers.