24 août 2008
Le passant du grand large
Tu entendras ce que je tais ces mots qui jouent et cèdent
Tu me sauras preneur du plus pauvre des matériaux ce bois flotté qui échoit au sculpteur heureux car sans espoir de réussite
Tu ne craindras pas pour ton rang car j’accélère où nul ne court
Tu te souviendras de ma distance
L’aventure du poème n’a rien à voir avec une sortie entre copains
Choisir entre vivre dans l’oubli de l’instant propice ou essayer de le fixer il le fallait
Nous nous battons contre un ennemi énigmatique informe ténébreux qui nous réveille la nuit et nous endort le jour pour nous voler nos rêves
De chers inconnus nous ont précédés ont élu domicile au fond de nos mémoires et ont fourbi les premières armes qu’il nous faut continuer de tremper dans nos faims
(Extrait de : Le Passant du grand large, éditions Orage-Lagune-Express Aquitaine, 1995)
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15 juin 2008
Peser un peu
Vous êtes le premier ce matin te dit le nouveau curé une petite quarantaine peut-être moins en te donnant du feu
D’habitude tu trouves déjà une veilleuse rouge ou bleue pour allumer la tienne mais en ce très sombre matin de la belle saison tu es le premier on finit un jour ou l’autre par être le premier qu’est-ce que ça peut faire
Il a entendu la chute de ta pièce dans le tronc à cause de l’écho dans les chapelles peut-être croit-il que tu as la Foi pour venir de si bon matin signifier aux ténèbres qu’elles n’ont pas encore gagné et qu’après toi viendra quelqu’un d’autre et ainsi de suite jusqu’à ce que s’éteigne sous la dernière voûte la dernière bougie
Dans cette abbatiale de petites flammes taquinent l’ombre depuis le douzième siècle alors
Si le curé entrait dans la grotte primitive de tes pensées il trébucherait là-dessus : pour toi rien n’était le 24 novembre 1958 puisque tu es né le 24 novembre 1959 et un certain 24 novembre encore non écrit rien ne sera de plus que le 24 novembre 1958
Avec ta veilleuse à cinquante centimes tu as l’air d’un ver luisant qui se signale aux confins de l’univers
Dehors sur l’esplanade du grand lac glaciaire le forain laisse trembloter l’enseigne de son camion frites boissons nougats berlingots
Commande-lui un café et un hot-dog histoire de peser un peu sur la Terre
© Éditions Orage-Lagune-Express, 2008.
00:15 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : bougie, veilleuse, abbatiale saint-michel, nantua, lac glaciaire, blog littéraire christian cottet-emard
06 mai 2008
Muses inquiétantes
Tu ouvres le buffet Art Nouveau probablement un des premiers objets que tu aies pu apercevoir au début de ton existence
Tu sors un verre dans lequel ont bu tes arrière-grands-parents tes grands-parents et tes parents tu te sers une fine du Jura
Tu poses la bouteille sur la grande table Art Nouveau sous laquelle tu t’es caché avec tous les enfants de la famille et qui n’a pas bougé pendant un demi-siècle elle ne cesse maintenant de tanguer depuis que tu l’as récupérée chez toi
La stabilité de la table n’était que l’illusion d’un monde perdu
L’étrangeté ne fait plus aucun doute
© Éditions Orage-Lagune-Express 2008.
11:03 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art nouveau, fine du jura, blog littéraire, christian cottet-emard, poésie, orage-lagune-express éditions, enfance