19 octobre 2007
Sous la cascade au nom qui fait rire
(À Michel Cornaton)
Tu voudrais disparaître
Pour toujours disparaître
Disparaître
de la circulation
automobile
Mais réapparaître
à jamais perdu
pour l’auto
Réapparaître sur le chemin départemental où sèchent toujours tranquillement les feuilles de foyard et de tilleul comme au premier jour le premier jour où tu marchas dans ces feuilles sèches
Réapparaître au bord du gouffre Le Pétrin de la foudre ou dans la marmite de la cascade au nom qui fait rire
« Comme par enchantement » disparaître et réapparaître dans cette cascade et pas une autre même si cette autre s’appelle Le Saut de l’âne ou La Queue de cheval
Tu voudrais réapparaître
À jamais perdu
pour la circulation
automobile
Et rire éperdu dans la marmite de la cascade au nom qui fait rire où cerné d’arcs-en-ciel tu peux te tenir debout avec de l’eau jusqu’au menton et ressortir tout bleu dans l’été rire parce que tu aurais réussi à disparaître et à réapparaître quand ça te chantait et sourire soûl rire vivre ivre
Apparaître disparaître réapparaître comme ça te chante dans la cascade « comme par enchantement » t’enchante la cascade au nom qui fait rire
Un peu gamin sur les bords pourquoi pas si ça te chante « Colchiques dans les prés » « Vent frais vent du matin sous le vent le sommet des grands pins »
Renaître non
Juste réapparaître
dans les colchiques dans les prés sous le vent dans les grands pins noirs d’Autriche qui retiennent la falaise et ses campanules de la tentation du gouffre
Seule la cascade connaît le gouffre et en revient et s’en enchante au grand jour or et bleu et s’en enchante dans l’envol des feuilles de foyard d’érable de charme de sycomore d’alisier de sorbier seule la cascade sait apparaître disparaître réapparaître seule la cascade sait chanter au fond du gouffre comme dans la folle joie de l’automne où pour toujours tu voudrais réapparaître à jamais enchanté
© Éditions Orage-Lagune-Express 2007
20:15 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : Cascade, Vulvoz, Jura, poème, eau, gouffre, nature
16 septembre 2007
Le poète sort la cage du canari
En cet instant d’un beau septembre où tout est plus bleu que bleu où tout est plus que tout
Tu sors la cage du canari oui c’est amusant d’écrire « tu sors la cage du canari » mais attendez la suite « tu sors la cage du canari dans le jardin » et le canari a l’air de dire « comment ça se fait ? »
En temps ordinaire la cage du canari reste à la cuisine et cela fait quinze ans que ça dure
Aujourd’hui le jardin submerge le canari de la magnificence qui fait l’ordinaire des moineaux
J’écris juste à côté du canari et il se demande ce que je lui veux car il ne peut pas comprendre que je ne lui veuille que du bien comme il ne peut pas comprendre que sa cage se soit déplacée de la cuisine jusqu’au jardin sous le seul prétexte qu’en cet instant d’un beau septembre tout est plus bleu que bleu tout brille plus que ce qui brille et qu’il ne faut pas louper ça
(Ce texte va peut-être tomber un jour sous les yeux de quelqu’un qui va le trouver stupide c’est déjà arrivé stupide certes mais ni plus ni moins que le sort fait sur Terre aux vivants
C’est déjà arrivé au vieux correspondant local du quotidien qui s’est pris jadis en pleine tronche un texte de ce genre et qui a écrit « pourquoi s’abandonner à de vaines rêveries ? »
Parce que les vaines rêveries sont peut-être le sel de la vie parce qu’il n’existe réflexion faite peut-être pas grand-chose de plus intéressant que les vaines rêveries allez savoir)
À moins que le canari ait peur oui il doit avoir peur tu connais les signes de la peur chez le canari cou tendu agitation le canari est routinier et aujourd’hui en cet instant de beau septembre sa routine en prend un coup un sacré coup si l’on en croit les cloches d’un mariage que ce septembre a bien voulu choyer d’une rare lumière de fin d’été vive l’Amour
Le canari aussi est amoureux sa chérie est la cafetière italienne sur laquelle il va se percher direct lorsqu’il sort de sa cage pendant ton petit déjeuner heureusement la cafetière a déjà refroidi et il lui tourne autour se mire dans l’inox et finit toujours par se percher sur le couvercle vive l’Amour
Vive l’Amour vive le jardin « Vive le jardin » est le nom du magasin qui vend les canaris et tout ce qui va avec et bien d’autres choses encore et voilà que parfois les jours comme aujourd’hui quand dehors vaut le détour le canari se retrouve dans le jardin « pourquoi s’abandonner à de vaines rêveries ? » se demande le vieux correspondant de la presse locale qui dodeline de la tête lorsque ce genre de texte lui tombe dessus comme dodeline de la tête le canari quand lui tombe sous les yeux ce qui fait l’ordinaire des moineaux et qui alimente la source inépuisable de tes vaines rêveries
© Orage-Lagune-Express 2007
14:39 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Canari, cafetière, brouillon de texte, note, carnet, journal, blog littéraire
16 juillet 2007
Interlude maritime
Rêves tels voiliers à quai
Même fascination même inquiétude
Leurs étendards leurs flammes dans l’été appellent déjà l’adieu qu’il faut offrir sans larme avec la rose ambiguë qui sourit vers la terre en direction du jardin clos
Le départ cloue ton ombre au chaud renoncement des pierres
L’attente d’un récit laissera peut être le grand large entrouvert
(Extrait du recueil Le Monde lisible. © Éditions Orage-Lagune-Express, 2004.)
Photo : C. C-E
12:20 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Dune, mer, poésie, recueil Le Monde lisible, éditions Orage-Lagune-Express