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27 avril 2010

Carnet du deuxième printemps

Personne ne semble moins fait que moi pour vivre à la campagne où l’on est toujours contraint d’effectuer un minimum de menus travaux. Ces tâches me sont pénibles car mon manque d’habileté manuelle me les rend aussi dangereuses. Je ne peux guère utiliser un outil ou une machine sans les détraquer voire les casser, et je ne parle pas du risque de me blesser de la manière à la fois la plus idiote et la plus complexe qui soit, même en brisant d’un coup de talon des branches sèches pour la réserve de petit bois. N’étant pas vacciné contre le tétanos, j’ai toujours à portée de main un flacon d’eau oxygénée dont je vide la moitié sur la moindre plaie, sur la moindre écorchure. Gare à la rupture de stock ! Enfin, il y a toujours le bar et ses alcools...

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Et c’est pourtant là, dans cette campagne, que je suis heureux, loin de la ville et de sa compétition. Juste derrière chez moi, où plus aucune maison n’est visible, je ne vois que les grands frênes et des vallonnements qui s’emboîtent jusqu’aux prochains plis du Jura. Toutes les créatures qui se croisent ici se craignent entre elles et me craignent. Il en résulte un équilibre, une sorte de pacte de non agression qui est de l’intérêt de chacun. Même situation avec les voisins. Personne n’a intérêt à trop de proximité et cette absence de promiscuité crée une entente tacite, une distance polie que j’apprécie. Seul le gros chat semi-sauvage qui a adopté la propriété vient à ma rencontre si je l’appelle mais c’est parce que je le nourris. C’est ainsi que je suis heureux ici comme je ne pourrais plus l’être en ville. Suffisamment heureux pour risquer d’arrêter d’écrire ? Non, car on n’est jamais assez heureux.

Avant que ne se déclenche le deuxième printemps, somptueux, celui des fleurs des fruitiers et des haies, celui qui succède au printemps discret des jardiniers, celui de la primevère et de la violette, j’ai vécu une étrange période durant laquelle j’ai dû organiser les obsèques d’une personne de ma connaissance. J’en ai ressenti un malaise accentué par le choix de ses proches en faveur de la crémation que je considère comme une pratique totalement étrangère à notre culture occidentale. Même si je respecte ce choix, je n’arrive pas à comprendre que cette idée s’impose de plus en plus dans les esprits. J’espère en tous cas, pour ma part, que la providence me laissera encore assez de temps pour organiser mes funérailles de telle manière que ma dépouille ne s’embrase pas dans un four « performant » ainsi que l’employée des pompes funèbres me l’a décrit, mais repose dans un caveau dans le petit cimetière du village. Je suis allé voir les prix et cela reste abordable. Tous mes chers défunts sont dans des tombes et des caveaux dont certains remontent au dix-neuvième siècle et j’aimerais bien qu’il en soit de même pour moi le moment venu. Finir dans une machine (encore une) et « performante » de surcroît, non vraiment, très peu pour moi.

Fermons cette parenthèse et revenons à ce printemps qui me permet aussi de voyager dans le temps. En effet, en petite montagne, les lilas pointent à peine leurs feuilles et leurs fleurs en enfance alors qu’en plaine, ils sont déjà bien épanouis et odorants. Ainsi ai-je l’impression, en remontant dans ma campagne après quelques courses en ville, de remonter aussi le cours du temps. « Notre besoin de consolation est impossible à rassasier » écrit Stig Dagerman...

Photo : lune du matin dans les frênes (photo C.C-E)

03 février 2010

Carnet des hautes neiges

P1000621.JPGAprès un week-end en compagnie d’invités venus skier, je tente de me remettre au courrier en retard. Hier, j’ai hésité à me lancer dans la promenade habituelle dans les bois et vallonnements au-dessus de la maison. Lorsque je me suis décidé, le crépuscule se dessinait dans les nuages lourds de nouvelles neiges. À la différence des autres jours, j’ai eu la flemme de chausser les raquettes. P1000635.JPGMal m’en a pris car je suis rentré à la nuit avec les chaussures remplies de poudreuse. Du coup, les chats on mangé en retard et le courrier en est au même point.

J’ai tout de même pu répondre à Christian Lux, auteur d’un livre intitulé Lettres à Charles Juliet (éditions Calligrammes) qui m’a proposé d’intégrer un extrait de mon texte sur Marguerite Duras paru dans le dernier Magazine des livres dans son émission Bazar culturel diffusée aujourd’hui mercredi à 19h et demain matin jeudi sur l’antenne burgienne Tropiques F.M. Je tâcherai d’insérer le lien dans ces pages pour qui voudrait écouter sur internet ce programme consacré à Duras.

Puisque l’ARALD (Agence Rhône-Alpes pour le Livre et la Documentation) l’évoque dans l’édition de février 2010 de son journal Livre & Lire, (copie de l'article ici) je peux dire sans commettre d’indiscrétion envers l’éditeur que le projet de publication de mon prochain livre entre dans une phase active. Malgré les apparences, je ne suis donc pas totalement enfoui sous les neiges de mon village jurassien !

Photos : le Crêt et mes raquettes pour y accéder en ce moment.

31 décembre 2009

Carnet de la Saint-Sylvestre

Geneviève, ma marraine qui enchanta mon enfance et ma vie d’adulte, disparue le 20 décembre dans sa soixante-septième année, souhaitait que sa mémoire fût évoquée dans la joie qu’elle sut si bien distribuer autour d’elle.

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Je termine donc cette année 2009 en pensant à elle et en la remerciant de son dernier cadeau, cette belle soirée du 27 décembre à l’opéra de Lyon où elle aurait dû aussi être présente pour assister à la comédie musicale Moscou, quartier des cerises, de Dimitri Chostakovitch. Geneviève nous avait réservé, à moi et à ma famille, les meilleures places pour apprécier cette œuvre espiègle, pétillante, colorée. Ces trois adjectifs me viendront aussi à l’esprit chaque fois que mes pensées iront vers Geneviève.

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Photos : le 27 décembre dernier à l'opéra de Lyon, pendant l'entracte.