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10 décembre 2023

Aujourd'hui, deuxième dimanche de l'Avent.

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Jean-Sébastien Bach a écrit trois cantates pour le premier dimanche de l'Avent mais j'ignore s'il en a écrit une pour le deuxième. Alors, voici l'une du premier ensemble, la BWV 36 : Élevez-vous avec allégresse.

 

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J'évoque l'Avent dans mon recueil Veilleuses paru en novembre 2022.

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Pour les personnes d'Oyonnax et de sa région, ce recueil est en vente au kiosque de l'hôpital d'Oyonnax au prix de 10 €.

 

11 juillet 2022

Légende d'été

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Photo Marie-Christine Caredda

 

Dans mon rêve l’été est une grande fleur qui s’ouvre et qui contient toutes les autres

 

comme une légende qui contient toutes les histoires

 

ou bien un parasol qui fleurit dans les rues du monde et qui contient tous les autres

 

puis sous l’averse fraîche et parfumée comme une passante inaccessible

 

un parapluie qui éclot et qui contient tous les autres

 

et dans sa brève nuit de fête où l’on erre comme une ombre heureuse avant de s’éloigner des lampions

 

un abat-jour qui veille jusqu’à l’aube et qui contient tous les autres

 

Mais peut-être n’ai-je pas rêvé

 

Extrait de mon recueil Estime-toi heureux 

© Éditions Orage-Lagune-Express

 

30 juin 2022

Carnet / Du moment à poème

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Il m’arrive d’évoquer ce que j’appelle un moment à poème. Voilà qui mérite une définition précise.
 
Ce que je nomme ainsi, faute de mieux, est un épisode de la vie, rare, souvent assez bref mais pas forcément fugace, au cours duquel les conditions se réunissent pour que naisse un poème, y compris pour quelqu’un qui n’écrit pas de poésie ou qui n’écrit pas du tout mais qui a, comme beaucoup de monde, une nature poétique ou tout au moins une forme de conscience qui s’en approche, ce qui fait encore plus de monde.
 
Je crois que n’importe qui peut vivre un moment à poème sans y prêter beaucoup d’attention ou sans s’en apercevoir tout de suite mais il suffit de se montrer attentif au discours d’un individu pour parvenir parfois à en détecter un dans son récit, le plus souvent dans le récit de ses souvenirs. Le moment à poème a beaucoup à voir avec un sentiment de plénitude intellectuelle, affective et physique bien qu’il ne relève pas d’une forme de spiritualité particulière et encore moins d’une illumination mystique ou simplement philosophique.
 
Le moment à poème survient dans un contexte très concret voire carrément dans le quotidien mais c’est justement aux limites du cadre du quotidien, un petit peu comme un enfant déborde dans ses coloriages, que l’épisode se produit dans une sorte de bulle temporelle et dans un espace qui semble lui aussi se modifier, même de la manière la plus infime. La seule certitude est qu’il se passe quelque chose et que cela restera inscrit dans la conscience et dans la mémoire jusqu’à la fin de la vie. Le moment à poème est un état très affuté de la conscience positive car s’il contenait ne fût-ce qu’une once de négativité, il n’entrerait pas dans la définition et n’aurait de la sorte ni intérêt ni bénéfice à rester gravé aussi durablement dans l’esprit. Alors serait-ce tout simplement ce qu’on appelle un moment de bonheur ou de grâce ? Pas seulement.
 
Les moments de bonheur peuvent être nombreux, aisément identifiables et aussi faciles à expliquer qu’à décrire, ce qui n’est pas le cas du moment à poème. La conscience du moment à poème ne navigue pas sur les eaux troubles de la nostalgie parce qu’en un tel cas, il serait prisonnier du passé; or cet épisode qu’on ne peut pas qualifier de révélation mais plutôt d’épiphanie si l’on veut se rapprocher d’une définition plus adaptée, se caractérise par l’intensité de son éclat et de sa permanence dans le temps d’une vie humaine dans laquelle il brille comme l’or, le diamant ou l’étoile, même s’il naît du quotidien le plus humble. L'une des principales caractéristiques de cette expérience est une sensation de parfaite présence au monde et d'adéquation avec l'environnement dans lequel elle survient.
 
J’ai identifié un moment à poème dans la vie de plusieurs membres de ma famille. Ils en vécurent peut-être d'autres au cours de leur existence ainsi qu'il en est dans la mienne. En ce qui me concerne, la pratique de l'écriture qui est une sorte de vie multiple m'aide à les détecter.
 
Pour un de mes oncles, ce fut un matin clair, très tôt, en voiture sur une petite route baignée de la lumière des beaux jours. Pour ma mère, ce fut au bord d'un lac qui n'est presque plus accessible aujourd'hui. Pour mon père, ce fut dans la forêt en hiver. C’était beaucoup plus qu’un souvenir. Il racontait qu’avec quelques camarades, au début des années soixante, il avait passé une journée à aider un ami à couper des épicéas et des sapins sur sa parcelle forestière pour le Noël de la paroisse. L’activité s’était prolongée jusqu’au soir de ce début décembre et dès la nuit tombée, une nuit très froide et très étoilée, le petit groupe avait fini la soirée par un casse-croûte et un vin chaud dans la cabane forestière, autour du poêle à bois et dans le halo de la lampe à pétrole. Mon père a eu une vie austère et semée d’embûches mais ce moment qu’il évoquait parfois avec une sorte d’étonnement était à l’évidence un des creusets de sa jeunesse, de son élan vital, de sa présence au monde et de son espérance en l’avenir. Bien que doté d’un esprit rationnel et d’une intelligence qui le portait plus vers les techniques et les sciences que vers la poésie, il avait réalisé que ce moment serait unique et qu’il le resterait jusqu’au bout ainsi que le lui murmurait cette voix discrète qu’est la nature poétique présente dans la noblesse de chaque esprit élevé.