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19 octobre 2018

À qui veut traverser la rue pour trouver mon dernier livre à Oyonnax (librairie Mille Feuilles)

 

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Je sais bien que la mention poèmes sur la couverture d’un livre produit l’effet d’un puissant répulsif, surtout dans une ville comme Oyonnax dans l’Ain où il est tout à fait normal de ne pas être prophète en son pays.

Je suis conscient d’aggraver mon cas en intégrant ce mot fatal, poèmes, au titre du recueil que je viens de publier grâce au soutien d’un éditeur qui est aussi un ami depuis trente-sept ans.

Je reconnais qu’intituler Poèmes des textes qui n’en sont pas et sous-titrer récits l’ensemble du recueil puisse être perçu comme la première atteinte de sénilité ou le dernier signe de provocation immature d’un vieil ado accroché à ses racines de frêne et d’épicéas.

Dans ce contexte dramatique, je peux quand même annoncer une bonne nouvelle aux quelques oyonnaxiens qui me font l’amabilité de me lire sans pour autant se montrer désireux de confier leur numéro de carte bleue à des sites de vente par correspondance : mon dernier livre ainsi que l’avant-dernier d’ailleurs, sont disponibles à la librairie Mille Feuilles, rue Anatole France.

Que dire de ce livre dont la couverture a été pensée tout exprès pour économiser l’énergie et le papier nécessaires à la confection d’un paquet cadeau ?

J’indique pour ma part qu’il est tout particulièrement destiné aux gens qui ont peur de la poésie mais qui ont parfois quand même envie de lire autre chose que des romans.

On y trouve des histoires qui peuvent être lues dans le désordre sans se forcer. Si vous en lisez une par jour, le livre durera un peu moins d’un an puisqu’il compte un peu plus de deux cents pages, ce qui est quand même économique. Pardon mais dès qu’il s’agit de calcul, je ne peux pas être plus clair.

Voici un extrait de la postface (pourquoi une postface plutôt qu’une préface ?) Parce qu’il y a toujours un avant et un après. C’est l’après qui a gagné.

Extrait de la postface :

... Des poèmes fabriqués avec ce que l’auteur avait sous la main, une grosse pierre, des brins d’herbe, du bois sec, des bâches qui claquent comme des voiles dans le vent, des branchages tombés, une petite cafetière italienne, des souliers usés, une encyclopédie pour enfants intitulée « Pourquoi, comment ? » , un parasol qui a déteint, une guirlande de Noël électrique, une photo d’oiseau mort, un rétroviseur de tramway de Lisbonne et un portrait de femme peint sur tôle ondulée. Car ce que nous nommons très doctement poésie, est-ce si éloigné de ce bric-à-brac ?

 

13 octobre 2018

Attignat en livres

Je serai demain dimanche dans l'après-midi en compagnie de Jean-Jacques Nuel au salon du livre d'Attignat (Ain) sur le stand des éditions Le Pont du change qui ont publié deux de mes livres, Tu écris toujours ? (chroniques humoristiques) et Dragon, ange et pou (nouvelles fantastiques et burlesques). Mes autres livres les plus récents parus chez d'autres éditeurs seront également disponibles.

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11 octobre 2018

Conseils aux auteurs locaux

tu écris toujours ?,conseils aux auteurs locaux,christian cottet-emard,éditions le pont du change,série,feuilleton,chronique,blog littéraire de christian cottet-emard,publication,édition,humourSi vous voulez mon avis, et même si vous ne le voulez pas, il faut absolument éviter de devenir un auteur local. J’en profite au passage pour préciser que mes conseils s’adressent aussi aux femmes car la vie sur la planète Terre est suffisamment compliquée pour que j’en rajoute une couche en m’imposant d’écrire « il faut éviter de devenir un (une) auteur (e) local (e) » . Et ne me parlez pas d’écrivaine ou pire d’autrice alors que nous n’arrivons pas à prononcer poétesse en public sans nous couvrir de ridicule.

Le ridicule qui, comme chacun sait ne tue pas, peut quand même envoyer un écrivain au tapis, l’un des moyens les plus sûrs pour l’infortuné plumitif étant de se retrouver dans la peau de l’auteur local. Tel est votre cas ? Je le savais. Comment ? Je l’ai lu dans la presse locale elle aussi, et je l’ai vu dans les rayons de la bibliothèque municipale où vos livres sont tous marqués du signe de l’infamie, souvent une petite étiquette d’un vert bien fluorescent pour que personne ne puisse ignorer votre déchéance. Sur l’étiquette, on peut lire la mention AUTEUR LOCAL en lettres capitales noires au cas où la bibliothèque serait fréquentée par une écrasante majorité de daltoniens en attente d’une double opération de la cataracte.
 
Sans vouloir vous affoler, je dois juste vous dire qu’il vaut mieux découvrir un poulet sans tête dans votre lit, boire à votre insu un philtre de désamour contenant de l’extrait de lombricompost lyophilisé, parler le grec ancien d’une voix gutturale dans votre sommeil alors que vous n’avez fait que Lettres modernes ou attraper le mauvais œil lancé par vos anciennes conquêtes  bien décidées à vous pourrir la vie en recourant à la science du Professeur Onvatataké, Grand Marabout au travail rapide et soigné (départ immédiat et définitif de l’être aimé) avec effet garanti sans facture au bout d’un certain temps, plutôt que de subir la malédiction d’être étiqueté auteur local.
 
Comment en êtes-vous arrivé là ? Vous avez forcément commis une erreur, même infime, allons, cherchez bien, dans votre âge tendre par exemple. N’auriez-vous pas, dans la fleur de vos seize ans, envoyé un service de presse de votre premier recueil de poèmes à un localier lui-même poète à ses heures et président de l’Amicale pétanque le reste du temps ? À moins que vous n’ayez trouvé plus judicieux d’en offrir aussi un exemplaire à la bibliothèque municipale ? J’en étais sûr, cela commence toujours ainsi une carrière d’auteur local. Après, impossible d’arrêter la machine infernale et hop, emballé c’est pesé, une étiquette verte ! Auteur local un jour, auteur local toujours ! Allons, allons, ne vous morigénez pas outre mesure, vous étiez dans l’adolescence, le temps des erreurs de jeunesse. Ah bon, un peu plus vieux ? Quel âge ? Ah, tout de même... Euh... Eh bien disons que l’erreur est humaine, même dans la force de l’âge. Finalement, on peut dire que vous avez su rester jeune. Au fait, vos poèmes, chez qui les avez-vous publiés ? À compte d’auteur à l’époque où vous avez fait valoir vos droits à la retraite ? Alors là, évidemment, difficile de faire plus auteur local. Je me trompe ou vous le faites exprès, juste pour me contrarier ?
 
Qu’importe, je vous soupçonne de bien pire car ce n’est pas au vieux sage qu’on apprend à faire des grimoires. N’auriez-vous pas laissé traîner une petite chose régionaliste dans ce piège redoutable qu’est le fonds local de la bibliothèque municipale ? Je pense à un opuscule qui fleure bon l’érudition et le terroir comme une monographie sur la construction et la rénovation du dernier four banal dans le hameau de Corneille-en-Désert après l’exode rural ou, par exemple, un machin intitulé La crise de l’artisanat oyonnaxien du peigne et de l’ornement de coiffure au temps de Charles le Chauve. On s’amuse comme on peut mais sachez que le fonds local d’une bibliothèque se comporte comme une plante carnivore. La victime est attirée, emprisonnée puis digérée. La seule différence entre l’insecte et le livre de l’écrivain local, c’est que si ce dernier connaît un jour le succès avec un chef-d’œuvre, l’opuscule oublié dans un rayon poussiéreux peut être tout aussi rapidement restitué par le piège alors que  l’auteur n’en a plus du tout le désir.

Je conseille donc au jeune écrivain prématurément choyé par la bibliothèque de sa bourgade qui se réjouit d’une première reconnaissance en tant qu’auteur local de privilégier la littérature orale en pratiquant l’heure du conte pour les bambins et la conférence Terres de contrastes pour leurs arrière-grands-parents car, ne l’oubliez pas, vos paroles s’envolent mais vos écrits, pour le meilleur et pour le pire, restent.

(Extrait de ma série TU ÉCRIS TOUJOURS ? FEUILLETON D’UN ÉCRIVAIN DE CAMPAGNE. D'autres épisodes parus en volume aux éditions Le Pont du Change .