01 février 2016
Navigation à vue
À la sortie du ventre de ma mère on n’a pas tardé à me faire comprendre que je serai à la manœuvre plus tôt que je ne pouvais le croire
J’ai vite quitté la cale où la situation n’était pas nette pas claire et j’ai grimpé dans les cordages près des voiles qui faisaient une excellente cabane bien aérée
Pour tenter de faire bonne figure sur le pont je me suis coiffé d’une casquette de capitaine mais elle ne m’allait pas du tout et d’ailleurs elle s’est envolée à la première brise
Ce qui n’a pas empêché les voiles de se gonfler et de pousser le navire vers la ligne d’horizon aussi courbe qu’une femme enceinte en train de faire la sieste
Qu’importe
Puisque la ligne d’horizon n’est ni une ligne ni un horizon
© Ed. Orage-Lagune-Express
03:11 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marine, femme enceinte, mer, navire, voilier, voile, trois-mâts, navigation, sieste, cale, cordage, brise, bateau, blog littéraire de christian cottet-emard, estime-toi heureux, poésie narrative, christian cottet-emard, éditions orage lagune express, droits réservés, recueil, variante, poème, ventre, manœuvre
22 mai 2015
Des pas dans la nuit
Un jour de bora bianca, ce vent redouté des vénitiens, il longeait la façade Renaissance de la Scuola di san Rocco avant d'entrer dans la basilique Santa Gloriosa dei Frari.
Il s’accorda quelques instants de compagnie avec Titien, Canova et Giovani Bellini lorsqu’il entendit quelques craquements dans l'obscurité où stagnaient de lourds effluves d'encens. Des notes d’orgue s'y mêlèrent bientôt, qui lui firent oublier l'Assomption du Titien.
En émergeant de l'ombre lourde de la basilique, il retrouva les ocres du quartier des Frari réconciliés avec le dernier soleil du jour. Le vent avait capitulé et abandonné dans sa déroute des souffles d'algues. L'air se radoucissait et invitait quelques touristes réfugiés dans des bars minuscules et délicieusement enfumés à retrouver le jeu de piste des itinéraires de visite balisés de flèches noires sur fond jaune, idéales pour se perdre mieux encore qu'on ne l'eût espéré. Une nuit, il avait déambulé dans ce quartier souvent désert où, enfilant une rue au hasard, il avait entendu monter de la pénombre une voix :
« Aqua ! » Une silhouette venait de l'avertir que la rue débouchait directement sur le canal et qu'entre les deux, on n'avait pas jugé utile d'installer une barrière.
Il vit alors l'ombre s'approcher. Elle appartenait à une jeune femme en imperméable qui le jaugea, amusée mais vigilante. « Attention au canal ! » Elle lui parlait en français. Il pensa qu’il devait avoir une tête de français. Elle l'accompagna le temps de lui indiquer un chemin plus sûr. Il l’observa furtivement. Elle était dans son élément. Ses escarpins surmontés d'un nœud papillon s'assuraient avec une grâce appliquée sur les dallages de pierre. Le rythme de son pas dans le silence nocturne créait cette même harmonie, ce même équilibre ténu qu'un ricercare des Gabrieli ou une canzon des Cavazzoni sur l'orgue Callido et sur l'orgue Piaggia de la basilique.
Ce pas, il l’entend encore s'éloigner, des années après, aussi nettement que ce soir-là où il dînait, dans une trattoria silencieuse, de lasagnes aux orties et de quelques poissons grillés agrémentés d'une tranche de polenta et de vin blanc.
Extrait de mon recueil L'Italie promise, © éditions Orage-Lagune-Express. Ce texte sera repris dans mon prochain recueil de nouvelles à paraître cette année.
02:18 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voyage, italie, venise, recueil, carnet de voyage, l'italie promise, christian cottet-emard, littérature, éditions orage-lagune-express, escarpin, vénétie, basilique santa gloriosa dei frari, scuola di san rocco, bora bianca, frari, titien, canova, giovani bellini, assomption du titien, encens, gabrieli, ricercare, cavazzoni, canzon, orgue callido, orgue piaggia, trattoria, lasagnes aux orties, poisson grillé, polenta, frascati, aqua, canal, escarpins à nœud papillon, algues, renaissance, droits réservés, ©, copyright, pas dans la nuit, fondamente, lagune vénitienne, musique, rêve éveillé, souvenir
18 mars 2015
La première sortie du lézard
Flamboie la gorge du lézard
Poème à vivre entre le mur et le volet
Chaleur du premier temps
(Variante à mon poème Élégie en quatre soleils et trois saisons, in L'Inventaire des fétiches, éditions Orage-Lagune-Express, 1988.)
Photo : la première sortie du lézard, mardi 17 mars (Photo © Christian Cottet-Emard,2015).
09:50 Publié dans L'INVENTAIRE des fétiches | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : printemps, premier temps, l'inventaire des fétiches, éditions orage-lagune-express, poésie, poème, instant, instantané, lézard, volet, mur, sensation, chaleur, blog littéraire de christian cottet-emard, recueil, 1988, sadag, christian cottet-emard, photo lézard




























