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19 mars 2018

Élégie sur la maison d'enfance

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Tu naviguais à vue dans la houle d’un songe il te dicta cette élégie funèbre

 

Il était trop tard pour habiter encore la maison d’enfance

 

Le portail s’ouvrit sur ce monde de ténèbres qu’elle était devenue et tu la rachetas à prix d’or afin d’en chasser tous les inconnus

 

L’argent les dispersa comme des spectres mais plus rien ne pouvait ramener le vieux tilleul à sa place même si ses racines erraient encore sous la terre désormais sans mémoire

 

Alors tu fis raser les murs jusqu’aux fondations pour ouvrir un grand pré où tu plantas un nouveau tilleul

 

Cette colère en toi s’en apaisa ce feu d’enfer dans un bloc de glace devint la douce flamme de la bougie qui luit dans l’ombre pour éclairer et réconforter non pour brûler

 

(Extrait de mon poème Paysage / Évasion, sixième partie)

© Éditions Orage-Lagune-Express, 2018

 

02 septembre 2017

Carnet / Des rentrées à dormir debout, de la Tour rouge, des micro-sommeils et de la tentation de Venise

Je ne suis personnellement plus concerné par toute forme de rentrée mais je dois dire que ce mot me rappelle de très mauvais moments de ma vie.

J’ai un souvenir cuisant de ma première rentrée qui sentait le pipi du hall et du couloir de l’école maternelle, ce qui m’a tout de suite, et pour le restant de mes jours, conduit à associer toute forme de vie en collectivité à l’odeur des latrines.

Le cauchemar de la rentrée, c’est aussi le travail. Les dernières années de mon passage dans la presse, mes retours de vacances me jetaient en pilote automatique dans l’agence du quotidien où je travaillais. De mon appartement de l’époque à ce bureau de radotage, je n’avais qu’un grand parc à traverser. Sa large allée centrale bien droite et bien bordée des deux côtés me permettait de marcher les yeux fermés, ce qui me donnait l’impression de gagner encore quelques minutes d’un ersatz de sommeil.

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La Tour rouge, Giorgio de Chirico

La nuit, je rêvais que j’arpentais d’étranges paysages déserts, hiératiques, et je découvris un jour que l’un d’eux n’était autre, à quelques variantes près, que la Tour rouge du peintre Giorgio de Chirico.

Durant cette période, il m’arrivait à n’importe quel moment de la journée d’être saisi de micro-sommeils qui passaient la plupart du temps inaperçus à l’exception de ce jour où l’un de ces évanouissements d’à peine deux ou trois secondes se produisit face à un notable que j’interviewais. Ma tête s’abaissa lourdement, pas loin de ma tasse de café et de mon petit magnétophone Sony qui était le seul encore en état d’écouter le monsieur.

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Venise, juin 2003

Le plus étonnant de ces micro-sommeils était que des fragments des rêves de la nuit parvenaient parfois à s’y faufiler, notamment des images de mes voyages à Venise où je me promenais souvent à cette époque et où la tentation de retourner sans cesse me hantait. 

Les micro-sommeils traversés de peintures métaphysiques et de paysages vénitiens survenant bientôt au contact de personnes un peu plus nombreuses, j’en parlai à mon médecin, une jeune femme au diagnostic réputé excellent. Vous êtes en parfaite santé, me dit-elle, mais votre problème est que vous voyez trop d’emmerdeurs et de fâcheux.

 

04 mai 2017

Lac Genin / En mémoire de monsieur Jean Godet

 

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Je venais déjeuner dans cette auberge en forêt dès le milieu des années soixante du vingtième siècle et voilà que l’an deux mille est déjà dépassé.
 
Le menu spécialités au feu de bois n’a presque pas changé et rien n’a changé non plus dehors.

Ce lieu est une perle de mon collier de paysages.

Jusqu’à aujourd’hui je n'ai manqué aucun épisode du feuilleton du papier peint et des tentures murales.

Une année mythologique, ma grand-mère était revenue du centre-ville avec son permis de conduire tout neuf et m’avait payé le petit déjeuner à l’auberge du lac Genin (pain grillé maison et beurre des fermes voisines).

En ces autres temps la tenture murale était écossaise et un orage grondait comme un farceur caché dans les bois.

Je trouvais prodigieux ce matin si sombre que la serveuse avait dû éclairer en apportant le café et le lait.
 
Quel farceur cet orage qui courait les bois !
 
Et la tourbière qui faisait des ronds dans le lac et qui versait des gouttes de nuit dans le bol du jour !

Ce soir comme tant d’autres soirs le patron fait cuire la viande et le saucisson au vin dans la cheminée.
 
Enfant, je trouvais cet homme immense au milieu des années soixante à cause de la danse indienne de son ombre autour de l’odorant feu de bois.

Et ce même homme de taille tout à fait normale vient aujourd’hui à ma table me dire bonsoir monsieur, saluer d’autres habitués puis repart surveiller la cuisson au feu de bois pendant que son ombre continue sa danse indienne du milieu des années soixante.

C’est encore un beau soir pour dîner dans cette auberge.
 
Un de ces soirs à voir rappliquer le lac et la forêt dans la salle pour saluer quelques habitués si heureux que le menu n’ait pas changé.

Et rien ni personne, hormis l’archange à l’heure d’enrouler le décor, ne peut y changer quelque chose, pas même au menu spécialités au feu de bois.