18 novembre 2021
Carnet / Tumbleweeds
19:34 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : mai 68, soixante-huitard, politique, gauche, posture rebelle, contestation d'opérette, carnet, note, journal, blog littéraire de christian cottet-emard, idéologies mortifères, idéologie, wokisme, déclin, illusion, soumission, petite bourgeoisie, culture, héritage, racines, occident
18 octobre 2020
Les ennemis du poète
La plupart des ennemis du poète sont de passage
Ils font souche ou carrière ou roulent poussés par le vent comme des amas de brindilles et de racines coupées et sont contraints de subsister un certain temps en ces contrées paisibles qu’ils veulent changer comme ils veulent te changer toi aussi
Naturellement ils se cassent vite les dents à cette tâche lugubre et repartent un beau jour un très beau jour lassés et furieux non sans avoir cependant provoqué quelques dégâts
De leur défaite et des dégâts qu’ils ont causés ils conçoivent une nostalgie et les voici sans cesse revenant sous ces cieux qu’ils ont voulu changer mais qui les ont changés et vaincus
Et toi toujours pareil à toi-même comme ce pays profond est toujours pareil à lui-même il t’arrive parfois de les apercevoir errant sans âme au détour d’une rue ombreuse et déserte du soir
Et tu t’arrêtes un instant pour les voir passer comme on s’assoit au bord du fleuve à regarder glisser les corps des ennemis du poète bercés par l’onde sûre et tranquille
© Éditions Orage-Lagune-Express. Photo et retouche Christian Cottet-Emard.
00:31 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ennemis, ennemis du poète, résistance, combat, occident, pays, identité, racines, france, pays profond, pays natal, culture chrétienne, estime-toi heureux©, orage-lagune-express éditions, droits réservés, hymnes, christian cottet-emard, poésie, littérature, blog littéraire de christian cottet-emard, rue déserte, ombre
06 février 2015
Carnet / Pour quelques grands arbres
L’enfance du piéton
patiente
dans le grand âge de l’arbre
ai-je écrit juste après quelques pas sous l’un des plus anciens et des plus hauts feuillages du parc. J’arpente ce jardin public depuis que je sais marcher.
À l’évidence, ces grands arbres me parlent ou quelque chose ou quelqu’un me parle à travers eux. L’enfant resté au bord de la route de Jean Tardieu? Ma propre voix que je comprends si mal ? Pourquoi ne suis-je pas parti ? (puisque toujours résonne en moi le sec constat de René Char, « Écrire : s’exclure » .
Je les soupçonne, ces arbres, d’être pour quelque chose dans mon enracinement. Ce sont eux les arbres et c’est moi qui ai les racines. Pour moi, ils sont éternels puisqu’ils étaient là avant moi et que leur longévité est bien supérieure à la mienne, même si je vis jusqu’à cent ans, même si certains d’entre eux ne sont pas à l’abri d’un accident (sécheresse, tempête, foudre...), d’une attaque (bûcheron, « paysagiste »...), ou d’une maladie (champignon, insecte xylophage...) autant de péripéties qui pourraient venir contrarier leur destin. Lorsqu'ils disparaissent d’une rue ou d’une place où j’aime faire un détour, j’ai l’impression que la rue et la place s’évanouissent ou qu’elles existent moins, que le paysage a été gommé par la main brouillonne de quelqu’un qui n’arrivera pas à le redessiner.
Bien sûr, on est parfois obligé, surtout en ville, de remplacer certains arbres trop vieux et malades par d’autres qui joueront à leur tour leur rôle de témoin d’éternité pour celles et ceux qui attachent de l’importance à ces choses-là mais on ne m’ôtera pas de l’idée qu’une vie réussie est celle qui s’est épanouie du début à la fin sous les mêmes arbres. Je crois avoir eu cette chance jusqu’à maintenant et je touche du bois (!) pour que cela continue.
Il n’est guère de jours où je ne passe sous les vieux platanes noueux qui me voyaient marcher tout gosse le nez en l’air entre l’église Saint-Léger et l’école Jeanne d’Arc, peu de semaines sans une visite aux quatre sapins pectinés de quarante mètres de haut que les siècles ont légué à mes promenades en forêt (même si, du plus colossal du groupe, âgé de 225 ans, avec près de 4 mètres de tour, ne reste que la souche après ce funeste soir de la tempête du 27 décembre 1999), peu de temps, en somme, sans les marronniers des parcs et jardins qui, l’automne, me fournissaient en munitions lorsque dégénéraient les cavalcades et bagarres de sorties de classe.
Je trouve tout le reste futile. Je mesure le luxe extraordinaire qui m’est donné de pouvoir dire cela et j’en remercie je ne sais qui car je n’ai malheureusement pas la Foi mais je remercie quand même car je n’aime pas l’ingratitude.
Voilà peut-être pourquoi je ne suis pas parti, pourtant très tôt conscient que mes projets littéraires, conçus dans l’enfance, ne trouveraient pas d’humus plus pauvre, de sol plus aride et de cieux plus indifférents que ceux de ma terne bourgade recroquevillée dans sa nostalgie mortifère de gloires artisanales puis industrielles fugaces au beau milieu d’une immensité de splendeur végétale.
« Écrire : s’exclure » ou plutôt écrire : partir, ce à quoi, m’étant pourtant exclu sans regret, je n’ai pu me résoudre, sans doute pour quelques grands arbres...
Texte paru dans la revue Le Croquant. Droits réservés.
02:38 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : arbre, grands arbres, carnet, note, journal, autobiographie, écriture de soi, prairie journal, blog littéraire de christian cottet-emard, doute, question, parc, nature, promenade, oyonnax, ain, rhône-alpes, france, europe, christian cottet-emard, épicéa, sapin, orme, hêtre, sapin pectiné, frêne, église saint léger, école jeanne d'arc, platane, marronnier, érable plane, tempête 1999, écolier, rené char, jean tardieu, poésie, littérature, souvenir, nostalgie, mélancolie, paysage, évasion, racines, enracinement